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La société à mission. Par Myriam Benarroche, Avocat.
Parution : jeudi 5 novembre 2020
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La qualité de société à mission a été introduite par l’article 176 de la Loi PACTE promulguée en mai 2019 pour reconnaître la possibilité aux entreprises qui le souhaitent de se doter d’une raison d’être dans leurs statuts, intégrant la prise en compte des impacts sociaux, sociétaux et environnementaux de leurs activités.

La finalité est de concilier voire trouver l’égalité entre la recherche de la performance économique avec la contribution à l’intérêt général.

Trois engagements :
- S’engager à produire un impact sociétal positif,
- Avoir une mission sociale, scientifique ou environnementale précise,
- Etablir un modèle économique cohérent.

Le Décret n°2020-1 du 2 janvier 2020 a précisé les modalités de cette nouvelle qualité.

I. C’est une qualité.

La société à mission est une qualité ce n’est pas un statut comme aux Etats Unis ou en Italie.

Cela signifie qu’il ne s’agit pas d’un nouveau statut de société ou une nouvelle catégorie juridique. Les entreprises volontaires n’ont donc pas besoin de changer de forme juridique pour devenir des sociétés à mission.

Elles doivent inclure dans leurs statuts les éléments suivants :
- la notion de raison d’être de l’entreprise au sens de l’article 1835 du Code civil c’est-à-dire constituée des principes dont elle se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité,
- le ou les objectifs sociaux et environnementaux que la société se donne pour mission de poursuivre dans le cadre de son activité,
- les modalités du suivi de l’exécution des missions. Pour les entreprises de plus de 50 salariés, une gouvernance spécifique doit être mise en place pour contrôler l’adéquation entre la raison d’être de l’entreprise et les pratiques. Ce comité de mission est distinct des organes sociaux et doit comporter au moins un salarié. Il est chargé exclusivement du suivi de la mission, il vérifie que chaque décision prise prend bien en compte les critères sociaux et environnementaux et rédige un rapport annuel.Pour les entreprises de moins de 50 salariés les statuts de la société peuvent prévoir qu’un référent de mission se substitue au comité de mission qui peut être un salarié de la société.

Le comité ou le référent présente annuellement un rapport, joint au rapport de gestion, à l’assemblée chargée de l’approbation des comptes de la société.

II. A déclarer au RCS.

L’entreprise doit déclarer sa qualité de société à mission au greffe du tribunal de commerce du siège social de la société pour publication au Registre du commerce et des sociétés et mention sur l’extrait K-Bis. Cela permettra de rendre cette qualité opposable aux tiers (clients, partenaires, institutions...).

Cette démarche peut intervenir au moment de la création de l’entreprise de la vie de l’entreprise par une demande d’inscription modificative.

III. Qui est soumise à contrôle par un organe indépendant ?

La réalisation du ou des objectifs sociaux et environnementaux que la société se donne pour mission de poursuivre dans le cadre de son activité fait l’objet d’une vérification par un organisme tiers indépendant (OTI). Cet organisme tiers est désigné, sauf clause contraire, par l’organe en charge de la gestion, pour une durée initiale qui ne peut excéder six exercices comptables. Cette désignation est renouvelable, dans la limite d’une durée totale de douze exercices.

Cet organisme est désigné parmi ceux accrédités à cet effet par le Comité d’accréditation (Cofrac) ou par tout autre organisme d’accréditation signataire de l’accord de reconnaissance multilatéral établi par la coordination européenne des organismes d’accréditation.

L’organisme de contrôle procède, au moins tous les 2 ans à la vérification de l’exécution des objectifs que la société se donne pour mission de poursuivre.

La première vérification a lieu dans les 18 mois suivant la publication de la déclaration de la qualité de société à mission au Registre du commerce et des sociétés. Pour les plus petites sociétés (de moins de 50 salariés), cette première vérification a lieu dans les 24 mois suivant cette publication.

L’organisme rend un avis. L’avis de l’organisme doit également être publié sur le site internet de la société et demeurer accessible publiquement pendant au moins 5 ans.

Si de l’avis de l’organisme tiers indépendant, la société ne remplit pas ses objectifs une procédure de retrait de la qualité de société à mission pourra être engagée par le ministère public ou toute personne ayant un intérêt auprès du tribunal de commerce du ressort du siège social de la société.

Le Président du Tribunal statuera alors en référé aux fins d’enjoindre, le cas échéant sous astreinte, au représentant légal de la société de supprimer la mention de « société à mission » de tous les actes, documents ou supports électroniques émanant de la société.

A ce jour plus d’une trentaine d’entreprises se sont déclarées sociétés à mission parmi lesquelles, La Camif, Danone, le Groupe Yves Rocher, la MAIF.

La crise sanitaire au lieu de ralentir ce mouvement n’en a été que le meilleur accélérateur.

La bienveillance, le partage, donner du sens à son activité poussent un bon nombre de TPE et PME à se doter de cette qualité pour tisser des relations à long terme avec leurs salariés, clients, fournisseurs, territoires géographiques.

Selarl MAB AVOCAT Myriam BENARROCHE Avocat 9 rue Le Tasse 75116 Paris [->www.mab-avocat-fiscaliste.com]