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Airbnb, propriétaires de résidence principale, Paris assigne ! Par Lorène Derhy, Avocat.
Parution : vendredi 6 novembre 2020
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La ville de Paris assigne désormais les propriétaires de résidence principale au titre de leur activité Airbnb dès lors qu’ils dépassent la durée légale de 120 jours/an.

Depuis octobre 2020, la Ville de Paris continue la chasse aux loueurs airbnb en s’intéressant également aux propriétaires de résidence principale.

Quels sont les enjeux d’une telle assignation ?

Comment louer licitement ma résidence principale sur une plateforme de type Airbnb ?

Si les propriétaires de résidences secondaires doivent respecter la procédure de changement d’usage fixée par l’article L631-7 du Code de la construction et de l’habitation, il en va différemment pour ceux qui souhaitent louer leur résidence principale. Ces derniers sont dispensés d’une telle procédure mais sont contraints de respecter une durée de location de maximum 120 jours par an, sauf juste motif, conformément à l’article L 324-1-1 IV du Code du tourisme.

Dans quels cas je peux louer légalement plus de 120 jours/an ?

Vous devez avoir un juste motif pour louer plus de 120 jours/an votre résidence principale en meublé touristique.

3 exceptions sont prévues légalement : cas de force majeur, raison de santé ou raisons professionnelles.

Dois-je respecter d’autres formalités en ma qualité de loueur de meublé touristique ?

a) Déclarez votre meublé.

Depuis 2017, vous devez déclarer votre bien en meublé touristique auprès de la Ville. A l’issue de cette déclaration, vous obtenez un numéro d’enregistrement à 13 chiffres qui doit être reporté sur toutes vos annonces.

Cette obligation peut également s’appliquer dans toutes les communes qui ont instauré une procédure de changement d’usage soumise à autorisation si elles le souhaitent.

b) Vérifiez le règlement de copropriété.

Avant de louer votre résidence principale en meublé touristique, il est indispensable de vérifier préalablement le règlement de copropriété pour éviter d’être assigné notamment par le syndicat des copropriétaires. L’aide d’un avocat indispensable pour lire les stipulations de votre règlement de copropriété.

c) Obtenez l’accord de votre bailleur en cas de sous-location.

Si vous êtes locataire, vous devez obtenir l’accord de sous-location et du montant du sous-loyer de votre bailleur par écrit, lequel ne peut être supérieur au loyer principal, faute de quoi vous pouvez être exposé à lui rembourser l’intégralité des fruits civils que vous aurez perçus au titre de votre activité de sous-location airbnb [1], par une jurisprudence constante.

A quelles sanctions je m’expose si je ne respecte pas la réglementation ?

En cas de procédure judiciaire, vous vous exposez à une amende pouvant aller jusqu’à :
- 5 000 euros en cas de défaut d’enregistrement,
- 10 000 euros en cas de location de plus de 120 jours/an, si vous n’avez pas de juste motif.

Par ailleurs, depuis le 1er décembre 2019, la Ville de Paris peut, jusqu’au 31 décembre de l’année suivant celle au cours de laquelle le meublé a été mis en location, peut vous demander de lui transmettre vos décomptes sous un délai d’un mois au maximum, faute de quoi vous vous exposez à une amende maximale de 10 000 euros.

Egalement, des sanctions pénales sont possibles en cas de fausse déclaration, dissimulation ou tentative de dissimulation des locaux soumis à déclaration, à savoir 5 ans d’emprisonnement et une amende de 75 000 euros, en application de l’article 441-2 du Code Pénal.

Puis je bénéficier du gel des procédures jusqu’à l’arrêt de la cour de cassation à venir ?

Pour mémoire, toutes les personnes qui ont été assignées par la Ville de Paris en raison de la mise en location de leur résidence secondaire, sans avoir respecté la procédure de changement d’usage imposée par l’article L631-7 du Code de la construction et de l’habitation ont vu leur procédure suspendue jusqu’à l’arrêt de la Cour de justice européenne, laquelle devait se prononcer sur la conformité de la réglementation encadrant la location saisonnière des résidences secondaires au droit européen.

La Cour de justice s’est prononcée le 22 septembre 2020 et a renvoyé à la cour de cassation le soin de trancher sur la conformité du dispositif de compensation du modèle parisien au regard de plusieurs critères européens [2]. La cour devrait se prononcer d’ici le mois de février 2021.

Ainsi, se pose la question de savoir si ces nouvelles assignations qui concernent la violation de la réglementation des locations saisonnières applicable pour les résidences principales seront également suspendues jusqu’à l’arrêt de la cour de cassation à intervenir.

S’il est trop tôt pour le confirmer, il n’en reste pas moins qu’il semble inévitable que les Tribunaux s’accorderont pour prononcer un sursis à statuer dès lors que le texte fondateur régissant la réglementation des résidences principales, 324-1-1 III et IV du Code du Tourisme, renvoie expressément de l’article L631-7 précité.

En effet, si par extraordinaire, Cour de cassation invalidait le dispositif parisien encadrant les résidences secondaires, il est aisé de supputer que le régime applicable aux résidences principales sera rejeté par voie de conséquence, les deux articles étant intrinsèquement liés.

L’assistance d’un avocat est-elle nécessaire ?

La procédure nécessite l’assistance obligatoire d’un avocat depuis le 1er janvier 2020.

N’hésitez pas à préparer votre défense dès lors que des outils existent pour faire rejeter ou minorer le montant de l’amende sollicitée [3].

Lorène Derhy, Avocat www.derhy-avocat.com