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La sollicitation de l’expertise médicale. Par Hélène Pichereau Samson, Avocat.
Parution : jeudi 28 janvier 2021
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Le recours à l’expert en responsabilité médicale suppose qu’il y a un litige. Les litiges existent depuis l’origine de l’humanité. Au fil du temps le législateur a souhaité voir se développer le principe de la réparation des préjudices subis par une victime. Ce besoin de réparation entraîne d’une part la recherche d’un responsable et d’autre part, la recherche d’une satisfaction, le plus souvent pécuniaire, destinée à compenser le préjudice subi. L’expertise médicale est alors déterminante.

La responsabilité médicale a pris bien du corps depuis que l’arrêt Mercier du 20 mai 1936 a fait disparaître la discrétion d’une responsabilité médicale qui se développait en hésitant sur ses fondements. La jurisprudence, longtemps seule base du droit médical, a bien évolué depuis. Les médecins, de plus en plus efficaces au prix d’une agressivité croissante, se voient reprocher les défauts de leurs résultats : l’objet de leurs soins, l’homme, est en soi matière périssable et à tout le moins fragile.

Est-il l’objet d’une agression, le patient demande réparation de ses préjudices, ceux du corps et ceux de l’âme. La médecine évolue et le droit s’efforce de s’adapter.

Parfois il précède, le plus souvent il suit, au plus près par la jurisprudence, plus à distance par la loi. La justice, l’un des quatre piliers régaliens de l’Etat, est ancrée au sein de la société. Or, nos sociétés occidentales se caractérisent par un individualisme et par une logique consumériste.

Cette évolution se retrouve dans la relation médecin patient. La jurisprudence qui a aidé. Elle a introduit le droit de la consommation en droit médical. C’est l’attitude du patient qui a changé à l’égard du corps médical. A l’origine, le patient est celui qui attend, de manière passive et qui se remet au savoir et à la bienveillance du médecin.

Aujourd’hui, il n’hésite plus à revendiquer et souhaite une reconnaissance de sa qualité de victime, ce que facilite la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé qui ne s’attache pas à la qualité de sujet mais des usagers.

Aujourd’hui, le progrès scientifique, mais surtout la vulgarisation de ce progrès, tend à accréditer dans l’opinion l’idée que tout est possible. Il est devenu de plus en plus insupportable pour la société qu’une personne qui s’est adressée au système de soins pour y trouver guérison puisse ressortir avec une infirmité, voir en mourir.

La médecine contemplative est devenue invasive : du risque à la faute, de la réparation des dommages à l’indemnisation d’un aléa, de l’obligation de moyens à l’obligation de résultat, l’expert judiciaire est placé au point de convergence des soucis du demandeur, du défendeur et du juge. Le recours à l’expert en responsabilité médicale suppose qu’il y ait litige.

Selon le lexique des termes juridiques Dalloz, le litige est souvent synonyme de procès. Les litiges existe depuis la l’origine de l’humanité. Au début, leur résolution passait par la loi du talion, puis avec le développement de la société les Romains ont prévu une réparation forfaitaire des dommages corporels par le responsable.

Le litige se trouve au carrefour des déviances de la communication : l’information ne passe plus, elle est manipulation. L’autre a tort et il faut l’en convaincre, ou avoir recours à un tiers pour qu’il soit jugé.

On se trouve dans le rapport dominant dominé.

Hélène PICHEREAU SAMSON Avocat au Barreau de Poitiers https://pichereauavocat.com