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Cession de fonds de commerce et inexactitude des mentions obligatoires. Par Anthony Guindet, Avocat.
Parution : mercredi 3 février 2021
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L’article L141-3 du code de commerce dispose que « Le vendeur est, nonobstant toute stipulation contraire, tenu de la garantie à raison de l’inexactitude de ses énonciations dans les conditions édictées par les articles 1644 et 1645 du Code civil ».

L’inexactitude des énonciations obligatoires contenues dans l’acte de cession est assimilée à un vice caché par renvoi aux articles 1644 et 1645 du Code civil.

Le régime juridique de cet article, dont les termes ne sont pas toujours respectés dans le cadre des négociation, doit être précisé.

Le terme "inexactitude" doit être pris dans l’acception restreinte que lui donne le texte, par opposition à l’omission visée à l’article L141-1 du Code de commerce, aujourd’hui abrogé. Il y a par exemple inexactitude et non omission lorsque sont indiqués les bénéfices forfaitaires fiscaux à la place des bénéfices réels [1] ou lorsque sont indiqués des bénéfices ne se rapportant pas exclusivement à l’activité cédée, l’acheteur en serait-il informé [2].

La garantie du vendeur ne peut pas être restreinte ou écartée par une clause du contrat [3].

L’acheteur doit justifier que :
- les mentions sont inexactes ;
- l’inexactitude constatée lui a causé un préjudice [4], ce qui n’est pas le cas lorsque les bénéfices réels sont supérieurs au bénéfice fiscal seul indiqué [5], lorsqu’il a revendu le fonds de commerce avec une majoration de 15 % [6] ou lorsqu’il a doublé, puis triplé le chiffre d’affaires les deux années qui ont suivi la cession [7] ;
- l’inexactitude constatée a déterminé son consentement [8].

L’acheteur doit intenter l’action dans le délai d’une année à compter de la prise de possession du fonds [9].

Ce délai est préfix [10]. L’expiration de ce délai interdit à l’acquéreur d’invoquer les inexactitudes même par voie d’exception [11].

L’acheteur peut demander [12] :
- soit la restitution du prix contre remise du fonds de commerce au vendeur ;
- soit une diminution du prix et garder le fonds (action estimatoire).

Il peut même exercer l’action rédhibitoire et l’action estimatoire à charge pour le juge de choisir, en fonction de la gravité de l’inexactitude invoquée, l’action recevable [13].

Si le vendeur est de mauvaise foi, autrement s’il connaissait l’inexactitude des mentions, l’acquéreur peut, en outre, demander l’allocation de dommages-intérêts [14].

Il peut aussi rechercher la responsabilité de droit commun du vendeur, notamment pour dol, quand bien même les manœuvres alléguées auraient trait à l’inexactitude des énonciations obligatoires portées à l’acte [15].

Mais l’acquéreur ne peut pas demander la nullité de la cession [16].

Les intermédiaires, rédacteurs d’actes et leurs préposés, sont tenus solidairement avec le vendeur s’ils connaissent l’inexactitude des énonciations faites [17].

Maître Anthony Guindet Avocat en droit des affaires [->anthony.guindet@jaso.fr] https://anthony-guindet-avocat.business.site

[1Cass. com. 29 avril 1997 n° 1081.

[2Cass. com. 3 décembre 2002 n° 2021 F-D.

[3C. com. art. L141-3, al. 1.

[4Cass. com. 21 mars 1966 ; Cass. com. 13 janvier 1998 n° 76 D, Ghandour c/ Vassilev.

[5Cass. com. 21 mars 1966 : précité.

[6Cass. com. 13 janvier 1998 n° 76 D : précité.

[7Cass. com. 13 mars 2001 n° 534 F-D.

[8Cass. com. 6 mai 2008 n°07-14.321.

[9C. com. art. L141-4.

[10Cass. com. 31 mars 2004 n° 602 F-PB.

[11Cass. com. 31 mars 2004 n° 602 F-PB, précité.

[12C. com. art. L141-3, al. 1 et C. civ. art. 1644.

[13Cass. com. 6 mars 1990 : Bull. civ. IV n° 75.

[14C. com. art. L141-3, al. 1 et C. civ. art. 1645.

[15Cass. com. 15 janvier 2002 n° 118 FS-P.

[16Cass. com. 1er décembre 1992.

[17C. com. art. L141-3, al. 2.