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Faut-il conclure une rupture conventionnelle ? Par Cécile Villié, Avocat.
Parution : jeudi 25 février 2021
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La rupture conventionnelle est le seul mode de rupture amiable du contrat de travail à durée indéterminée.
A première vue, la rupture conventionnelle peut sembler attractive dans la mesure où elle permet au salarié de quitter son employeur contre une indemnité tout en bénéficiant du chômage.
Cependant ce mode de rupture du contrat de travail peut présenter des inconvénients pour le salarié.

1. La rupture conventionnelle limite les poursuites devant le conseil de prud’hommes.

En principe, la rupture conventionnelle peut être remise en cause pour obtenir la requalification de la rupture du contrat de travail en licenciement abusif susceptible d’être indemnisé, ce dans un délai de 12 mois à compter de l’homologation de la rupture par la DIRECCTE.

Cependant, l’annulation d’une rupture conventionnelle est difficile à obtenir.

Le salarié peut contester la validité d’une rupture conventionnelle, aux motifs que les circonstances dans lesquelles elle a été signée ont altéré son consentement qui n’a pas pu être libre et éclairé, en cas de pression de l’employeur sur le salarié pour signer la rupture conventionnelle ou dans l’hypothèse d’un harcèlement par exemple.

Au demeurant, malgré la conclusion d’une rupture conventionnelle, le salarié reste libre de saisir le conseil de prud’hommes pour une demande concernant l’exécution du contrat de travail.

Ces demandes peuvent porter notamment sur le paiement d’une prime ou des heures supplémentaires.

2. Les différés d’indemnisation du chômage.

Si la rupture conventionnelle présente l’avantage pour le salarié de bénéficier du chômage, l’allocation des indemnités versées par Pôle Emploi ne sont pas immédiates.

En premier lieu, un délai d’attente de 7 jours est applicable lors de toute prise en charge au titre de l’assurance chômage.

En deuxième lieu, si lorsque le contrat de travail se termine, le salarié n’a pas pris tous ses jours de congés, son employeur doit lui verser une indemnité compensatrice de congés payés. Cette indemnité décalera le début du versement des allocations chômage à hauteur du nombre de jours de revenu que cette indemnité représente.

A ce délai, un différé spécifique peut s’ajouter. Ce différé spécifique d’indemnisation sera appliqué si, lors de la rupture du contrat de travail, le salarié perçoit des indemnités supra-légales, c’est-à-dire dont le montant dépasse le minimum prévu par la loi.

En matière de rupture conventionnelle, un différé spécifique d’indemnisation s’appliquera lorsque l’indemnité de rupture conventionnelle est supérieure à l’indemnité légale de licenciement à laquelle aurait pu avoir droit le salarié.

La durée maximale du différé spécifique est de 150 jours calendaires.

A titre d’exemple, si dans le cadre d’une rupture conventionnelle, un salarié perçoit une somme totale de 30 000,00 euros et que les indemnités légales et obligatoires représentent 18 000,00 euros de cette somme totale.
Le différé spécifique sera alors de 133 jours : (30 000 euros - 18 000 euros) ÷ 90 = 133,33.

Compte tenu de ces différés d’indemnisation, la rupture conventionnelle est plus avantageuse pour les salariés qui retrouvent rapidement un nouvel emploi.

3. L’absence de préavis.

Contrairement au licenciement ou à la démission, il n’y a pas de préavis légal dans le cas de la rupture conventionnelle.

Entre le début de la négociation de la rupture conventionnelle jusqu’au départ effectif de l’entreprise, il faut compter un délai de près d’un mois et demi.

Le salarié qui aurait droit à un préavis de trois mois peut donc être lésé par une rupture conventionnelle ne lui laissant que peu de temps pour retrouver un emploi.

Cependant, le salarié et l’employeur peuvent parfaitement se mettre d’accord pour convenir d’une date de sortie de l’entreprise qui soit postérieure à l’homologation de la demande de rupture conventionnelle.

En définitive, la rupture conventionnelle est bien souvent avantageuse pour l’employeur qui limite le risque de contentieux ultérieur. Si le salarié ne retrouve pas rapidement de nouvel emploi, la rupture conventionnelle peut ne présenter que peu d’avantage pour lui.

Cécile Villié avocat - droit du travail www.villie-avocat.com