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Harcèlement moral et couple : état des lieux des pratiques de la Police et de la Justice. Par Cyril Braniste, Avocat.
Parution : jeudi 25 mars 2021
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La Loi du 9 juillet 2010 constitue le premier acte d’une prise en compte par les pouvoirs publics de la question de la violence psychologique au sein du couple.
Ainsi, celles et ceux qui sont insultés, humiliés, rabaissés au quotidien peuvent porter plainte, et espérer voir l’auteur de ces comportements réprimé pénalement.

Ce n’est plus impunément qu’on peut se voir reprocher son physique, son intelligence, son âge, son utilité, son aptitude à s’occuper des enfants etc.

Ces agissements qui émanent bien souvent de personnes qui donnent le change socialement, et se font passer à l’extérieur comme de bons pères ou mères de famille, peuvent conduire au suicide.

Il faut rappeler que les homicides au sein du couple représentent 20% de la totalité des homicides en moyenne, et que les chiffres sont alarmants en matière de suicide de femmes liés au harcèlement moral du conjoint.
Dans une période où la parole se libère sur les réseaux sociaux et dans les médias, s’agissant de la violence morale faite aux femmes et du harcèlement sexuel, il est intéressant de se poser la question de l’application par les procureurs et juges, du texte de loi relatif à la violence psychologique dans le couple [1].
Les victimes doivent être armées pour faire face aux difficultés de la procédure.
Quelques conseils leurs sont donnés dans le présent article, et ce dans le prolongement de mon article « harcèlement moral et divorce ».

Rappelons le texte de Loi :

« Le fait de harceler son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie, se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont entraîné aucune incapacité de travail et de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende lorsqu’ils ont causé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours.
Les mêmes peines sont encourues lorsque cette infraction est commise par un ancien conjoint ou un ancien concubin de la victime, ou un ancien partenaire lié à cette dernière par un pacte civil de solidarité.
 »

Les violences psychologiques sont aussi réprimées par l’article 222-14-3 du Code pénal.
Il y a lieu en outre de rajouter à cet article du code pénal, un nouvel article 373-2-11-6 du code civil, qui prévoit que :
« Lorsqu’il se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge prend notamment en considération :
6° Les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre.
 ».

Ainsi, si l’on s’en tient à la simple lecture des textes législatifs, il y a lieu de crier victoire quant à cette avancée considérable.

On pourrait même en déduire que le Juge aux affaires familiales est amené, dans le cadre d’une séparation ou d’un divorce, à tenir compte de la violence psychologique dans le couple au moment de prendre une décision, concernant la garde d’un enfant, ou l’organisation de sa vie future.
Pour autant, au-delà de ces avancées formelles, il y a lieu de se poser la question de l’effectivité de ces textes de loi, c’est à dire de leur application dans la pratique.

Une étude de la jurisprudence montre que la majorité des cas où les tribunaux ont fini par reconnaître les violences psychologiques, sont ceux dans lesquels la victime a fini par se suicider, ou était sur le point de le faire, et où il est démontré que l’acte suicidaire est lié à l’emprise et à la violence psychologique.
Il y a tout de même lieu de tenir compte de certaines avancées, du fait que les professionnels (experts, policiers, juges) amenés à se pencher sur ces cas sont incités par les faits d’actualité, à prendre au sérieux ce type de situation.

S’agissant de l’incrimination pénale (article 222-33-2-1 du code pénal).

En pratique, la dénonciation de la violence psychologique relève le plus souvent du parcours du combattant, se heurtant à une forme d’incompréhension choquante.
Le but du présent article est d’aider les victimes à affronter ce parcours, à présenter au mieux leur dossier, afin d’être prises au sérieux.

Plusieurs cas se présentent :

a. Si les services de police banalisent la situation et refusent de prendre la plainte.

En dépit de certains efforts (des directives ont été adressées et des formations ont été organisées), les agents de police sont peu formés aux violences intra familiales, et à la maltraitance psychologique.

Beaucoup trop nombreux sont les témoignages de victimes, qui relatent une attitude peu adaptée des services de police : mur de l’indifférence, banalisation, propos irrespectueux tels que « ça c’est vos problèmes de couple, ça ne regarde pas la police, chacun doit y mettre du sien...vous avez sans doute votre part de responsabilité… ».

C’est ainsi que certaines victimes sont invitées tout simplement à rentrer chez elles, ou, en guise de lot de consolation, à déposer une main courante, ce qui peut être une manière de se débarrasser du dossier.
Cette main courante n’est qu’une déclaration unilatérale, sans aucune valeur probatoire, elle ne débouche sur rien.

Au mieux, elle constitue un précédent symbolique avant une plainte ultérieure.
Si le policier ou le gendarme est de bonne volonté, il peut accepter de transcrire la mention « vu exact », après que la victime lui a fait constater un SMS injurieux, un mail agressif ou menaçant. Ainsi, il est très important de ne pas effacer ce type de SMS, et de demander aux policiers de le constater.

En tout état de cause, il faut savoir que les fonctionnaires de police et gendarmes n’ont pas à évaluer la gravité de l’état de la victime requérante, ils ne sont ni médecin ni psychiatre ni juge. Ils agissent sous le contrôle du Procureur de la République, qui a seul l’opportunité des poursuites.
Dans une telle hypothèse, c’est à la victime de demander à l’agent de l’adresser au service des urgences médico-judiciaires, afin de consulter un médecin psychiatre.

Cet expert, rattaché aux services de police, pourra ainsi évaluer le degré d’incapacité totale de travail (ITT), ce qui constitue une étape majeure dans l’instruction d’une future plainte.

b. Si le policier ou le gendarme accepte de prendre la plainte.

En principe, le fonctionnaire doit remettre à la victime un récépissé de dépôt de plainte, ce qu’il ne fait pas toujours.

Surtout, il doit adresser la victime aux urgences médico judiciaires (UMJ – service rattachée à la justice), afin de faire constater les dommages sous la forme d’une incapacité totale de travail (ITT), qui peut être physique et/ou psychologique.

Or, il arrive fréquemment que les policiers ou gendarmes se contentent d’enregistrer la plainte, sans adresser la personne au service concerné.
La victime se voit ainsi privée de la possibilité de prouver les violences qu’elle a subi.

Il est donc ainsi paradoxal de constater qu’avant de se présenter aux services de police ou de gendarmerie, la victime doit être déjà armée psychologiquement pour convaincre le service du bien fondé de sa demande, et de la vérité de son cas !

C’est pourquoi en amont, il peut être utile de se présenter au commissariat ou à la gendarmerie avec un premier certificat médical de son propre médecin traitant ou psychiatre, constatant l’état de stress, et prescrivant un arrêt de travail. Il est probable que la lecture de ces documents influencera les services de police dans le sens d’une prise en considération du dossier.
En tout état de cause, il est fondamental que la victime se rende aux urgences médico-judiciaires. C’est aux services de police ou de gendarmerie de l’y adresser.

C’est en effet la constatation par un médecin expert spécialisé rattaché aux services de police et de justice, qui fera que la demande sera prise en considération, et constituera un élément de preuve suffisant pour déclencher une procédure de divorce ou de séparation en urgence, ou une demande d’ordonnance de protection (cf infra).
Il est donc important que la victime ne se censure pas, et ne se laisse pas censurer par le fonctionnaire qui reçoit son audition.

Conséquences de la plainte.

- 1ère hypothèse : la victime ne se voit pas diagnostiquer d’ITT :
L’affaire est classée sans suite, il ne se passera rien.

- 2ème hypothèse : la victime se voit diagnostiquer une ITT psychologique de 1 à 3 jours.
Dans ce cas, s’il s’agit d’une première fois, l’affaire est la plus part du temps classée sans suite, ou adressée en médiation pénale. (cf infra)
S’il y a eu des précédents, l’affaire peut être renvoyée en médiation pénale ou devant une juridiction.

- 3ème hypothèse : la victime se voit délivrer une ITT supérieure à 3 jours et inférieure à 8 jours.
Le ministère public à alors l’opportunité de :
• renvoyer l’affaire devant une juridiction correctionnelle ;
• ordonner une médiation pénale ;
• ordonner un rappel à la loi.

- 4ème hypothèse : la victime se voit délivrer une ITT supérieure à 8 jours :
L’affaire sera renvoyée, en principe selon toute probabilité, devant une juridiction correctionnelle.

C’est malheureusement la deuxième et la troisième option qui sont les plus couramment utilisées.

L’enquête de police.

Il y a lieu de relever un déséquilibre entre les droits de la victime, et les droits de la personne mise en cause.
Lorsque la personne mise en cause (l’auteur des faits) est convoquée en vue d’une audition libre, elle a le droit d’être assistée d’un avocat.
S’agissant de la victime, elle ne peut bénéficier de l’assistance d’un avocat que dans le cadre d’une confrontation avec l’auteur des faits.
Ainsi, au moment de sa première audition, elle est donc seule face aux policiers enquêteurs, et ne bénéficie pas du soutien juridique et moral d’un avocat.
On peut se demander pourquoi le législateur a prévu des dispositions plus protectrices des droits de l’auteur que de la victime !
C’est pourquoi, il est vivement conseillé aux victimes de consulter un avocat avant tout dépôt de plainte, et ce afin de préparer les futures auditions, au cours desquelles elle devra faire face dans la solitude.

Le rappel à la loi.

L’auteur présumé des violences se voit rappeler à ses obligations légales d’une manière solennelle.
Autrement dit, le policier sur délégation du procureur de la république, lui dit officiellement que « ce qu’il a fait est mal », et l’incite à ne pas recommencer.
Cette mesure, qui est symbolique, n’a aucune conséquence juridique.
Elle ne vaut pas déclaration de culpabilité.
A ce titre, il est intéressant de considérer que la Cour de Cassation a été amenée à se prononcer récemment sur cette question, et a considéré qu’un rappel à la loi ne constituait pas la preuve d’une faute dans le cadre d’une procédure de divorce contentieuse.
On peut s’étonner, voire se choquer de cette évaluation bienveillante faite par la Cour de Cassation du comportement harcelant.
Il s’agit d’une forme de banalisation, qui pose question.

La médiation pénale.

Les parties sont invitées à se présenter devant un médiateur (un travailleur social ou un ancien magistrat le plus souvent).
Celui-ci cherchera à inciter les parties à parvenir à un accord, afin d’éviter la saisine d’une juridiction.
En réalité, il s’agit d’un moyen de désengorger les tribunaux.
La présence de la victime n’est pas obligatoire, mais si elle ne se présente pas l’affaire sera très probablement classée sans suite.
Or, il y a également de très grandes chances que l’affaire soit classée sans suite, même si la victime est présente.
La médiation pénale ne constitue que très exceptionnellement le préliminaire à une procédure correctionnelle.
Le médiateur peut inciter l’auteur à s’excuser ou à verser une somme à titre de dommages et intérêts, dans cette hypothèse l’affaire s’arrête là.
Là encore, il y a lieu de s’inquiéter de cette pratique quasi systématique des parquets qui tendent à étouffer dans l’œuf les plaintes.

L’audience correctionnelle.

Ce n’est pas parce que l’audience correctionnelle est programmée que tout est gagné !
Il faut se défendre.
Il est déconseillé de se présenter seul, la présence d’un avocat est vivement recommandée.
Encore faut-il que l’auteur soit déclaré coupable.
C’est pourquoi il est nécessaire de bien connaître les éléments de l’infraction.
Il y aura en effet un débat contradictoire entre la partie civile, le ministère public et la défense, portant sur l’infraction et sa preuve.
S’agissant d’un acte par définition intime se passant au sein de la famille à l’abri des regards, il est particulièrement difficile de rapporter la preuve de la violence psychologique.

Les éléments de l’infraction.

Pour retenir la qualification du délit prévu par l’article 222-33-21 du code pénal, la jurisprudence retient à l’encontre de l’auteur des faits : « des propos, comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de vie du compagnon ou du conjoint, se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale ».

Que faut-il entendre par « propos ou comportements répétés » ?

Pour retenir la qualification, les parquets et tribunaux retiennent les injures, les menaces, les propos dégradants.
La preuve en est le plus souvent rapportée par les relevés d’appels téléphoniques malveillants, sms, mails, et correspondances.
Il s’agit le plus souvent d’attaques sur le physique, l’aptitude professionnelle, l’aptitude à élever les enfants.
La question est de savoir quel type de message peut être pris en considération.
Ils doivent revêtir une certaine forme de gravité.
Or, très souvent, le conjoint ou la conjointe pervers et manipulateur est suffisamment habile pour ne pas laisser de traces.
C’est toute la problématique du harcèlement moral dans le couple.
Ainsi se pose très fréquemment la question du harcèlement, dans le cadre d’un conflit portant sur l’autorité parentale.
Au terme d’une séparation, un parent harcelant instrumentalise l’enfant commun pour persécuter l’autre parent, par des mails et des sms intempestifs et quotidien, relatifs à la santé, l’éducation et la vie de l’enfant.
Cette technique est assez insidieuse, car de la part du parent harcelant il n’est officiellement question que de l’enfant et de son quotidien, il n’y a ni injures ni menaces mais une communication outrancière quotidienne insupportable à vivre.
La victime, qui se trouve déstabilisée, ne sait pas si elle doit répondre ou non, et à qui répondre.
Pour autant, il est important pour la victime de garder toutes les preuves, et de prouver qu’il agit sur la durée (plusieurs mois, voire années).
Dans cette situation, et selon les cas, il est conseillé de répondre le moins possible afin d’éviter d’alimenter le contentieux : le silence étant une arme redoutable.
En tout état de cause, là encore, il convient de montrer le dossier à un avocat.

« Comportements répétés » : il faut donc rapporter la preuve de l’acharnement dans le comportement.
Ainsi, la production de mails ou sms successifs s’étalant sur une longue période est requise.

« Ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de vie du compagnon ou du conjoint » : il est donc nécessaire de rapporter la preuve de son préjudice moral ou physique, cette preuve devant être rapportée par un certificat médical. Etant précisé que la preuve principale est rapportée par le certificat médical des urgences médico judiciaires précitées.

« Se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale. »
Pour le législateur, il faut que la dégradation des conditions de vie soit concrètement prouvée.
A ce titre, il est particulièrement révélateur de constater un déséquilibre très important entre ce délit de violence psychologique familiale, et le délit de harcèlement moral au travail prévu par l’article 222-33-2 du code pénal.

En effet, l’article concernant le harcèlement moral au travail incrimine « des propos ou comportements qui ont pour pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible d’altérer la santé physique ou mentale de la victime ou de porter atteinte à sa dignité, ses droits, ou à son avenir professionnel. »

En ce sens, un arrêt de la Cour de Cassation du 13 décembre 2016, dispose que la dégradation des conditions de travail n’a pas à être la suite nécessaire du harcèlement, puisqu’il suffit qu’elle ait été voulue par l’auteur.
Ce qui signifie que même si la victime ne prouve pas, par un certificat médical la dégradation de son état mental et/ou physique, elle peut voir son ex employeur condamné pour harcèlement moral, du moment que la preuve a été rapportée que ce dernier ait voulu la harceler.

Or, s’agissant d’une victime du harcèlement moral dans le couple, il est nécessaire pour que le délit soit constitué, que la conséquence se soit produite de manière effective, c’est-à-dire que la victime soit vraiment tombée malade (dépression), voir se soit fait hospitalisée, ou ait au moins un certificat médical des urgences médico judiciaires suffisamment probant.
Il s’agit d’une différence de traitement particulièrement injuste, qui ne s’explique pas, si ce n’est par le souci d’alléger le contentieux des tribunaux correctionnels et de décourager les plaintes pour violences psychologiques.
En tout état de cause, le résultat est que du point de vue de sa stricte application pénale, les condamnations pour violences psychologiques restent relativement rares.

S’agissant des conséquences civiles.

La question se pose lors d’un divorce ou d’un contentieux familial portant sur la sur la résidence d’un enfant.

Sur la base d’un dossier suffisamment probant de violences psychologiques avec certificat médical des urgences médico judiciaires et récépissé de dépôt de plainte, la victime peut se voir autoriser à assigner en divorce son conjoint en urgence, afin d’obtenir des mesures provisoires rapides. (cf « harcèlement moral et divorce »)

Elle peut aussi se voir attribuer une ordonnance de protection en urgence, qui lui permet d’obtenir la jouissance du domicile conjugal et des mesures de protection face au conjoint violent. (cf « harcèlement moral et divorce »)
Comme indiqué précédemment, au terme de l’article 373-2-11-6 du code civil, il est expressément prévu que : « Lorsqu’il se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge prend notamment en considération les pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre ».

Il faut rappeler que le moteur de la décision du juge aux affaires familiales est l’intérêt de l’enfant.
Or, cet intérêt de l’enfant, dans l’esprit du juge, est pris isolement, il est apprécié au regard de différents critères qui ne vont pas nécessairement de paire avec l’intérêt du conjoint harcelé.
Autrement dit, ce n’est pas parce qu’une personne rapportera la preuve de la violence psychologique qu’elle subit, qu’elle obtiendra nécessairement la résidence de son enfant, ou pourra mettre en échec la résidence alternée demandée par l’autre.
C’est en effet plus compliqué que cela.
Le juge aux affaires familiales prend en considération un grand nombre de facteurs, dont la violence psychologique fait partie.
C’est pourquoi il est nécessaire de constituer un dossier, et ne pas se contenter de sa parole de victime.
A ce titre je vous renvoie à mon article « harcèlement moral et divorce ».
Il est important de tenir compte de la réalité de la pratique judiciaire :
Les travailleurs sociaux et experts qui sont amenés à rendre des rapports pour le compte de la justice, refusent bien souvent de prendre parti, et évoquent des concepts génériques, qui deviennent dans certains cas des éléments de langage : conflit de loyauté, conflit parental.
Il est ainsi demandé aux parents renvoyés dos à dos de faire preuve de maturité, et de dépasser leurs conflits.
Il peut être dans certaines situations, particulièrement douloureux pour une victime de violences psychologiques de se voir ainsi donner la leçon, et d’être jugée exactement au même niveau que le conjoint harceleur alors qu’elle a besoin d’être protégée.
C’est pourquoi il est particulièrement important dans ce type de situation de démontrer que c’est de l’enfant qu’il s’agit, de sa souffrance, et non pas de soi. Là est toute la difficulté.
Dans son évaluation de l’intérêt de l’enfant, le juge aux affaires familiales est amené, bien évidemment, à prendre en considération l’attitude des parents l’un envers l’autre, et notamment en présence des enfants. C’est surtout ce dernier aspect des choses qui sera pris en considération, outre bien sûre la violence psychologique directe du parent vis-à-vis de l’enfant.
A ce titre, et il faut le souligner, on voit apparaître une jurisprudence encourageante, au cas par cas.
Ainsi, un père a-t-il été jugé récemment au tribunal correctionnel de Lyon pour manipulation de ses enfants dans un conflit conjugal.
Dans cette affaire, l’expert psychiatre avait décrit précisément « le syndrome d’aliénation parentale ».

Conclusion.

Même si la lutte reste âpre, les mentalités ont changé, et le terme de violence psychologique a désormais une résonance dans l’esprit des professionnels de justice.
Il faut donc continuer à mener ce combat avec courage et ténacité, et ne pas hésiter à dénoncer ce type d’agissement qui ne relève pas que de la sphère privée, mais constitue un trouble à l’ordre public qui nécessite une réponse judiciaire ferme et adaptée.

Cyril BRANISTE Avocat

[1Article 222-33-2-1 du Code pénal / loi n°2010/769 du 9 juillet 2010.

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