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Plus-value immobilière : modalités de calcul et cas d’exonération. Par Fanny Quilan, Juriste.
Parution : mercredi 21 avril 2021
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Lorsque vous vendez un bien, qu’il s’agisse d’une maison, d’un appartement ou d’un terrain, vous réalisez le plus souvent une plus-value immobilière, c’est-à-dire, un « bénéfice fiscal ».
Ce bénéfice est imposé au titre de l’impôt sur le revenu (19%), mais aussi, des prélèvements sociaux (17.2%), c’est ce que l’on nomme l’impôt à la plus-value.

Sont, notamment, concernés par l’impôt à la plus-value, les biens faisant l’objet d’une mutation à titre onéreux et qui ne sont pas soumis aux différents cas d’exonération [1].

Concrètement, cette plus-value est égale à la différence entre le prix net de vente et le prix d’achat de l’époque (ou « valeur déclarée » s’il s’agit d’un bien acquis par succession ou donation).

Il s’agit donc de faire une soustraction dans l’ordre suivant : prix net de vente - prix d’achat de l’époque.

Ce résultat à la plus-value, qui est brute, n’est pas la plus-value imposable. Il s’agit en réalité de l’assiette fiscale permettant de calculer la plus-value nette imposable.

Exception faite du cas où le vendeur serait un professionnel, la déclaration et le paiement de cette plus-value auront lieu au moment de la vente directement chez le notaire. Elles feront l’objet d’une déclaration spécifique sur le formulaire n°2048-IMM [2] que le notaire effectuera pour le compte du vendeur.

De cette façon, le prix de vente distribué sera déduit de l’impôt sur le revenu et de celui sur les prélèvements sociaux.

Pour autant, le montant net de la plus-value devra être déclaré par le vendeur sur sa déclaration en ligne des revenus [3], ou s’il ne dispose pas d’accès internet sur sa déclaration papier de revenus [4].

Comprendre la méthodologie de calcul de la plus-value vous permettra de donner des conseils éclairés à votre vendeur et d’établir ensemble une liste de frais réels (I). Dans certaines situations, votre vendeur pourra être exonéré d’impôt à la plus-value, mieux vaut donc connaître ces cas d’exonérations pour lui permettre à votre vendeur de faire une « juteuse » opération (II).

Attention : le champ de compétence de la loi Hoguet n’autorise pas les agents immobiliers et les négociateurs, à faire des calculs d’imposition à la plus-value. Cette compétence est celle des comptables et des notaires.

I. La plus value immobilière : comprendre la méthode de calcul.

A/ Etape n°1 : déterminer la plus value brute.

La plus-value brute n’est pas la plus-value imposable. Il s’agit en réalité de l’assiette fiscale permettant de calculer la plus-value nette imposable.

La plus-value brute est égale à la différence entre le prix de vente « corrigé » (a) et le prix d’acquisition « corrigé » (ou valeur déclarée s’il s’agit d’une succession ou donation) (b).

Il s’agit donc du calcul suivant : prix de vente corrigé - prix d’acquisition corrigé = plus-value brute.

L’intérêt de « corriger » le prix de vente et celui d’acquisition, est de diminuer l’écart entre ces 2 montants, et conséquemment, de diminuer le montant de la plus-value brute.

a) Le prix de vente corrigé [5].

Le prix de vente peut être « corrigé », c’est-à-dire qu’il peut être diminué des frais que le vendeur devra supporter lors de la mise en vente.

Ce « prix de vente au réel » devra être stipulé dans l’acte comme tel par le rédacteur dans un paragraphe spécifique (cf : voir avec votre notaire rédacteur).

Conformément à l’article 41 duovicies H CGI annexe 3 ces frais s’entendent exclusivement :
- des frais versés à un intermédiaire ou à un mandataire (commission charge vendeur) ;
- des frais liés aux certifications et diagnostics rendus obligatoires par la législation en vigueur au jour de la cession ;
- des indemnités d’éviction versées au locataire par le propriétaire qui vend le bien loué libre d’occupation ;
- des honoraires versés à un architecte à raison des études de travaux permettant d’obtenir un accord préalable à un permis de construire ;
- des frais exposés par le vendeur d’un immeuble en vue d’obtenir d’un créancier la mainlevée de l’hypothèque grevant cet immeuble.

Pour le vendeur professionnel il peut également s’agir de déduire le montant de la TVA acquittée.

Il faudra justifier de l’existence de ces frais pour que le notaire (et l’administration) accepte d’en tenir compte. Le vendeur devra conserver les justificatifs pendant 3 ans.

Enfin, n’oubliez pas que la valeur du mobilier n’est pas prise en compte pour la détermination de la plus-value immobilière, il est donc conseillé d’établir une liste de mobilier distincte du prix de vente et justifiée (production de facture, inventaire de commissaires-priseurs, etc.).

b) Le prix d’acquisition corrigé [6].

Le prix d’acquisition de l’époque peut être « corrigé » c’est-à-dire qu’il peut être augmente d’un certain nombre de frais et de dépenses limitativement énumérés par la loi.

Ces frais et dépenses sont les suivants :
- Des frais d’acquisition de l’époque (commission, frais d’acte) qui peuvent être évalués forfaitairement à 7,5 % du prix :
- s’ils sont supérieurs à ce forfait et qu’ils peuvent être justifiés, des frais d’acquisition pour leur montant réel ;
- en cas de bien reçu par donation ou succession, le forfait de 7,5 % n’est pas applicable. On tiendra compte des frais de notaire pour leur montant réel.
- Du montant des travaux exclusivement de construction, reconstruction, agrandissement, amélioration, démolition, réalisés sur le bien, à condition de pouvoir en justifier par la production de factures émanant d’entreprises fournissant à la fois (cumulatif) le matériel et la main d’œuvre (art.150VB CGI) :
- à défaut, et si le bien est détenu depuis plus de 5 ans, une majoration forfaitaire de 15% du prix d’achat sera appliquée.
- Autre frais justifiés : frais de voirie, frais de viabilisation, réseaux de distribution….

Une fois cette plus-value brute obtenue, vous aurez votre assiette fiscale. Cette assiette servira à déterminer la plus-value nette imposable (B).

B/ Etape n°2 : déterminer la plus value nette imposable.

La plus-value nette imposable est obtenue après déduction sur la plus-value brute d’un pourcentage d’abattement au titre de l’impôt sur le revenu (a), et des prélèvements sociaux (b).

Attention, un agent immobilier (ou négociateur) n’est pas compétent pour faire ce calcul !!

a) Le pourcentage d’abattement pour l’impôt sur le revenu.

Explications : Une plus-value brute de 25 000 euros est réalisée sur un bien détenu depuis 18 années pleines.
L’impôt sur le revenu au titre de la plus-value est calculé de la manière suivante :
- Un abattement de 19 500 euros soit 78% de la plus-value brute (25 000 x 0.78 = 19 500) ;
- La plus-value nette imposable sera de 5 500 euros (25 000 - 19 500 = 5 500) ;
- L’impôt sur le revenu au titre de cette plus-value sera de 1 045 euros (5 500 x (19%) = 1 045).

b) Le pourcentage d’abattement pour les prélèvements sociaux.

Explications : Une plus-value brute de 25 000 euros est réalisée sur un bien détenu depuis 18 années pleines.
L’impôt sur les prélèvements sociaux au titre de cette plus-value est calculé de la manière suivante :
- Un abattement de 5 362.5 euros soit 21.45% de la plus-value brute (25 000 x 0.2145 = 5 362.5) ;
- La plus-value nette imposable sera 19 637.5 euros (25 000 – 5 362.5 = 19 637.5) ;
- L’impôt sur les prélèvements sociaux au titre de cette plus-value sera de 3 377 euros (19 637.5 x (17.2%) = 3 377).

Dans certaines situations, le vendeur pourra être exonéré de l’impôt à la plus-value, il pourra donc se permettre de vendre à un prix plus élevé (II).

II. La plus value immobilière : les cas d’exonération [7].

L’article 150 U du CGI prévoit plusieurs cas d’exonération des plus-values de cession de biens ou droits immobiliers.

a) La cession de la résidence principale [8].

L’immeuble doit constituer la résidence principale et effective du vendeur au jour de la cession. Cette qualification pouvant être donnée au bien occupé au minimum 6 à 7 mois avant sa mise en vente.

Lorsque le droit de propriété est démembré (usufruitier/nu propriétaire) l’exonération ne profite qu’à l’occupant de la résidence principale (il sera exonéré d’impôt sur sa quote-part). Il en va de même lorsque le bien est détenu par une SCI, l’exonération ne profite qu’à l’associé occupant à titre de résidence principale ledit bien.

Lorsque le vendeur a déménagé l’exonération reste acquise

« si l’immeuble a été occupé jusqu’à sa mise en vente [..] que la cession intervient dans des délais normaux et sous réserve que le logement n’ait pas, pendant cette période, été donné en location ou occupé gratuitement par des membres de la famille du propriétaire ou des tiers.
Aucun délai maximum pour la réalisation de la cession ne peut être fixé a priori. Il convient donc sur ce point de faire une appréciation circonstanciée de chaque situation, y compris au vu des raisons conjoncturelles qui peuvent retarder la vente, pour déterminer si le délai de vente peut ou non être considéré comme normal.
Dans un contexte économique normal, un délai d’une année constitue en principe le délai maximal
 ».

b) Exonération en faveur des personnes qui résident dans un établissement médical, social, d’accueil de personnes âgées ou d’adultes handicapés [9].

Le vendeur doit remplir les conditions suivantes :
- Le logement cédé doit avoir constitué la résidence principale du cédant avant son entrée dans un établissement spécialisé ;
- L’ancienne résidence principale du cédant ne doit avoir fait l’objet d’aucune occupation depuis que le bien a cessé de constituer sa résidence principale. Le logement doit rester inoccupé (ni loué ni mis à la disposition gratuite d’un tiers, y compris pour une courte période). L’exonération n’est pas remise en cause lorsque les membres du foyer fiscal du cédant continuent à occuper le logement alors même que le cédant n’y réside plus ;
- L’établissement accueillant le vendeur doit appartenir à l’une des catégories suivantes : EHPA ; EHPAD ; logements foyers ; petites unités de vie ; unités pour personnes désorientées ; Etablissement d’accueil d’adultes handicapés ;
- La cession doit intervenir dans un délai inférieur à 2 ans suivant la date d’entrée dans cet établissement ;
- Le client ne doit pas être passible de l’ISF, ni dépasser les plafonds fiscaux de référence.

c) Exonération de la 1ère cession d’un logement autre que la résidence principale sous condition de remploi de tout ou partie du prix de cession dans un délai de 2 ans à compter de la cession, à l’acquisition ou la construction d’un logement affecté à la résidence principale [10].

Le vendeur ne doit pas avoir été propriétaire de sa résidence principale, directement ou par personne interposée au cours des 4 années précédant la cession.

Le vendeur doit procéder au remploi du prix de vente dans un délai de 2 ans courant à compter du jour de la cession effective pour acquérir ou faire construire un logement affecté à son habitation principale.

Si le remploie est partiel, alors l’exonération sera proportionnée à la fraction du prix de vente effectivement remployé.
Cette exonération devra être renseignée dans la déclaration de revenus n°2042-c case 3vw.

d) Exonération liée au montant de la cession [11].

Les plus-values résultant de la cession d’immeubles, parties d’immeubles ou droits relatifs à ces biens sont exonérées d’impôt sur le revenu, et par suite de prélèvements sociaux dus au titre des produits de placement, lorsque le prix de cession est inférieur ou égal à 15 000 euros.

e) Exonération liée à la durée de détention [12].

Par l’effet de l’abattement pour durée de détention, mentionné au I de l’article 150 VC du code général des impôts (CGI), la plus-value est exonérée à l’issue d’une durée de détention qui diffère selon la date de la cession.

L’exonération totale au titre des prélèvements sociaux est ainsi acquise lorsque la durée de détention du bien est égale ou supérieure à 30 années pleines (de date à date).

L’exonération totale au titre de l’impôt sur le revenu est acquise bien plus tôt, puisqu’il suffit que la détention du bien soit égale ou supérieure à 22 années pleines (de date à date).

Autres exonérations :
- Exonération liée à la qualité du cédant BOI RFPI PVI 104090.
- Exonération résultant de la cession d’un droit de surélévation sous condition que le cessionnaire s’engager à achever les locaux destinés à l’habitation dans un délai de 4 ans à compter de l’acquisition BOI-RFPI-PVI-10-40-40.
- Exonération résultant de la cession d’un logement situé en France par des contribuables non résidents BOI-RFPI-PVI-10-40-50.
- Exonération liée à la nature des opérations réalisées (DUP) BOI-RFPI-PVI-10-40-60.
- Exonération liées à certains partages BOI RFPI PVI 10-40-100.

Fanny Quilan Responsable juridique du réseau immobilier AXO