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Professionnels du droit : développez vos softskills !
Parution : mercredi 27 juillet 2022
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Souvent mal comprises et considérées comme nébuleuses, les softskills font pourtant partie du paysage professionnel et sont aujourd’hui essentielles à l’exercice des métiers du droit. Afin que les études et les cabinets puissent s’en saisir et les développer, il est primordial d’en déterminer les contours et d’expliquer en quoi elles sont importantes pour l’évolution des collaborateurs et que, bien maîtrisées, elles participent in fine, au bon développement et à la performance des organisations.

Après avoir animé récemment une conférence en ligne co-organisée par l’AFJE et l’Incubateur des avocats du Barreau Rennais intitulée « Les softskills, un enjeu pour les professionnels du droit », la rédaction de cet article est une suite logique afin de partager ce sujet au plus grand nombre et d’interpeller la profession sur la nécessité de développer une démarche en ce sens.

Vous avez dit softskills ?

Les softskills ou « compétences douces » dans sa traduction la plus proche, sont des habiletés comportementales. Elles traduisent notre capacité à se questionner, à se mobiliser, à mieux connaître nos attitudes et nos comportements mais aussi à être attentifs à ceux des autres pour interagir au mieux avec son environnement. Plus concrètement, cela peut être la capacité à s’adapter aux situations, à pratiquer l’écoute active, à avoir le sens du collectif ou encore gérer ses émotions.

On a souvent tendance à opposer les softskills aux hardskills (le savoir-faire) : en réalité, ce sont deux notions complémentaires. Contrairement à ce que l’on pense, nos softskills viennent mettre en « mouvement » nos savoir-faire et les accompagnent dans une utilisation pertinente et efficiente.

Le monde du droit évolue, il faut s’y adapter.

Les professionnels du droit évoluent dans un monde en pleine mutation : digitalisation des métiers, accroissement des flux et des échanges d’informations, accélération des délais et de la réglementation...Dans ce contexte de mouvance permanente, la maîtrise des savoirs légaux et l’obtention de diplômes ne suffisent plus. Alors, comment y faire face ?

Il faut initier un changement de posture : d’un expert « sachant » on évolue à un « partenaire-conseil ».

D’un point de vue individuel, il faut agir au-delà de l’expertise juridique en se dotant de capacités relationnelles et d’adaptation. L’une des clés pour y arriver est d’initier un changement de posture : d’un expert « sachant » on évolue à un « partenaire-conseil ». Ce travail personnel permettra de construire une relation de confiance et mieux comprendre les enjeux des clients. L’objectif ici est d’être le plus possible à l’écoute de son client pour prendre en compte l’ensemble de ses problématiques (réglementaires, techniques, politiques, environnementales, financières, mais aussi humaines) pour lui apporter le meilleur conseil possible.
Cette posture nécessite aussi de percevoir ce que j’appelle la « capacité au risque » de son client. Là encore, savoir mobiliser son écoute, son intelligence situationnelle et émotionnelle pour aller au-delà de l’analyse technique du dossier permet de s’orienter pleinement vers cette posture « de partenaire-conseil » qui est à forte valeur ajoutée.

Du côté des organisations, il s’agit de faire des softskills un sujet majeur dans les approches managériales et RH de la structure, et ce, dès le recrutement des futurs collaborateurs. Un travail sur l’identification et les besoins en compétences doit être mené pour intégrer les softskills comme un nouveau critère d’évaluation et de décision pour les recrutements et les évolutions au sein des organisations. L’accompagnement des managers est également important car ils ont en la matière un rôle essentiel à jouer dans le développement des softskills de leurs collaborateurs. Savoir mener un feed-back régulier et de qualité est, par exemple, un vrai levier pour y parvenir.

Concrètement, comment développer ses softskills ?

Bien évidemment, il n’y a pas de recette magique ! Développer ses softskills n’est pas une démarche mécaniste. Mais je vous rassure : les softskills peuvent s’acquérir et se développer à condition de prêter attention à sa manière de faire et en s’entraînant. Pour cela, il y a 2 phases distinctes : la conscientisation et l’expérimentation active.

Par exemple, si vous souhaitez développer votre posture partenariale envers vos clients :

1. Conscientisez.

- Quelles sont les attentes de mon client au-delà de la conformité règlementaire ?
- Quel est mon propre rapport au risque (ai-je des freins ?)
- Quelles approches distinguent les « meilleurs juristes » ? (posture partenaire-conseil)
- Quelles sont les conséquences potentielles imaginées dans mes recommandations juridiques (est-ce que je me sécurise moi ou mon client ?)
- Analysez un cas que vous avez vécu et voyez ce que vous auriez pu améliorer dans votre approche au bénéfice de votre client

2. Pratiquez l’expérimentation active.

- Interrogez en profondeur par des questions ouvertes votre client sur l’ensemble des enjeux qui affectent sa problématique (est-ce technique, relationnel, stratégique, politique… ?) afin de recueillir le maximum d’informations ;
- Partagez avec votre client la portée des risques et les bénéfices retirés face à la solution proposée ;
- Faites reformuler à votre client la bonne compréhension du risque finalement assumé.

Pour conclure, la maîtrise des softskills n’est plus une condition mais une nécessité absolue pour tout juriste d’aujourd’hui. La maîtrise, aussi forte soit-elle, des techniques juridiques n’est plus suffisante : la posture d’expert se révélant dans la durée moins pertinente que celle de partenaire pour le client, mais aussi pour les autres interlocuteurs (collaborateurs quand il existe une situation de management, partenaires, etc.).

On peut bien évidemment acquérir et développer des softskills à certaines conditions : l’humilité d’en prendre conscience (soi-même ou par le biais d’avis de tiers que l’on aura sollicité) et une volonté profonde de changer ses pratiques en procédant à l’expérimentation active.

Tout cela est à portée, à vous de jouer !

Franck Simon Coach professionnel et co-dirigeant, Happy-Up Performance http://happy-up-performance.fr/