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Hospitalisation sans consentement : quid d’une irrégularité dans la procédure d’isolement et de contention ? Par Elodie Garoux, Juriste et Soliman Le Bigot, Avocat.
Parution : vendredi 23 juillet 2021
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Dans un avis tout récent en date du 8 juillet 2021 [1], la première chambre civile de la Cour de cassation s’est prononcée sur les conséquences d’une irrégularité dans la mise en place d’une procédure d’isolement et de contention.

Elle avait initialement été saisie sur la portée du contrôle du juge judiciaire concernant une mesure de soins psychiatriques sans consentement découlant sur une mesure de contention et d’isolement.

En l’espèce, la question était formulée de la façon suivante : Le constat par le juge des libertés et de la détention, à l’occasion du contrôle systématique d’une mesure de soins psychiatriques sans consentement prenant la forme d’une hospitalisation complète, ou d’une demande de levée de cette mesure ou d’une saisine d’office de la juridiction, d’une irrégularité affectant une mesure d’isolement ou de contention mise en œuvre à l’occasion de cette hospitalisation, peut-il être sanctionné par la levée de la mesure d’hospitalisation complète, en particulier lorsque l’isolement ou la contention n’est plus en vigueur lorsque la juridiction statue, dès lors qu’il est établi que l’irrégularité relevée a porté atteinte aux droits du patient ?

Pour répondre à cette question, la Cour de cassation rappelle dans un premier temps les conditions des articles L3222-5-1, I, L3222-5-1, II, al. 3 et L3211-12-1 du Code de la santé publique concernant respectivement les mesures d’isolement et de contention, leur renouvellement ainsi que leurs conditions quant à la saisine et le contrôle du juge des libertés et de la détention.

Après ce rappel, elle retient que les mesures de contention et d’isolement sont à la fois médicales (« Décidées par un psychiatre »), exceptionnelles (« ne sont pas nécessairement mises en œuvre et doivent au contraire être de dernier recours »), et autonomes (« présentent un caractère autonome à l’égard de la décision de soins psychiatriques sans consentement prise par le directeur de l’établissement de santé, le représentant de l’Etat dans le département ou l’autorité judiciaire »).

Ainsi, à la question posée, la première chambre civile répond que lorsque le juge des libertés et de la détention, saisi d’un contrôle systématique d’une hospitalisation sans consentement, constate une irrégularité concernant l’isolement ou la contention, il ne peut ordonner la mainlevée que de l’une ou l’autre de ces dernières mesures et non les deux.

Il convient toutefois de rappeler que la réponse de la première chambre civile n’est que provisoire puisque cette question fera l’objet d’une réforme du fait de l’abrogation pour inconstitutionnalité des précédents textes [2]. Pour autant, cet avis regorge d’enseignements car cette question sérieuse pourrait se poser de manière très fréquente à l’avenir.

Quoi qu’il en soit, il est nécessaire que le patient ait connaissance de la faculté de former un recours contre sa mesure d’isolement et/ou de contention. Il ne s’agit pas seulement pour les psychiatres et les personnels des hôpitaux d’avertir que la mesure est prise ou renouvelée.

Il faut renforcer l’information que le patient a le droit d’engager un recours contre cette mesure s’il l’estime injustifiée. Dans la pratique, le droit au recours n’est que très peu - voire pas - évoqué par les soignants et ce sont les avocats du patient qui s’en chargent.

Cette pratique doit changer et la possibilité d’un recours doit être mentionnée dès la mesure prononcée. Dans cette optique, certains hôpitaux mettent en place des formulaires spécifiques afin de rédiger ce recours. C’est une pratique à mettre en avant et à encourager.

Sur cette question, de plus amples informations et recommandation au service des avocats sont disponibles sur le Kit Unafam [3].

Madame Elodie Garoux (Juriste) LBM Avocats Maître Soliman Le Bigot (Avocat à la Cour)

[1Cass. 1re civ., avis n° 15012, 8 juill. 2021 (n° 21-70.010).

[219 juin 2020, décis. n°2020-844 QPC.