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Effondrement d’immeuble et responsabilité des propriétaires. Par Charles Paumier, Avocat et Elisa Rouaix, Etudiante.
Parution : mardi 3 août 2021
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Il est de plus en fréquent de lire dans la presse que des immeubles se sont effondrés alors qu’ils étaient habités. Ces effondrements peuvent être impressionnants et largement médiatisés, tels que celui de Miami le 24 juin 2021 ou encore ceux de la rue d’Aubagne Marseille en novembre 2018 qui ont occasionné le décès de huit personnes.

Article actualisé par son auteur le 12 août 2021.

L’effondrement d’un immeuble amène à poser de nombreuses questions. D’une part concernant les causes, d’autre part concernant la responsabilité des propriétaires de l’immeuble sinistré.

Cette étude a pour objet de préciser les obligations et responsabilités pesant sur les propriétaires de biens immobiliers et de mettre en lumière d’éventuelles lacunes législatives.

I) Actualité.

Le 16 juin 2021, un immeuble s’est effondré dans le centre historique de Bordeaux [1]. A cinq jours d’intervalle, le 21 juin suivant, deux autres immeubles sont tombés sous le poids des vieilles pierres girondines. Aucune victime n’est alors à déplorer.

S’il est encore trop tôt pour déterminer les causes du sinistre, la ville a rapidement pris des mesures pour sécuriser les lieux. Les immeubles de première proximité ont été évacués afin de prévenir le possible effet de domino entre les différents bâtiments, tandis que les habitants ont été relogés.

La mairie de Bordeaux qui a saisi les autorités judiciaires, a lancé des expertises pour déterminer les causes exactes des effondrements. Ces audits seront effectués sur un large périmètre.

Pour que le chantier de mise en sécurité soit réalisé rapidement, la mairie a décidé de se substituer aux propriétaires en lançant les travaux de sécurisations.

Selon l’adjoint au logement, Stéphane Pfeiffer, la ville exécutera « les travaux d’office et portera aussi la responsabilité de la réalisation des travaux ». Ces travaux n’étant que provisoire, « la facture sera adressée aux propriétaires, qui attendent impatiemment les suites judiciaires et qui pourront se retourner vers leur assurance ».

Cette situation n’est cependant pas nouvelle.

En novembre 2018, Marseille a été la scène d’effondrements successifs d’immeubles provoquant la mort de huit personnes. Cette affaire a mis en lumière l’ampleur du problème des logements insalubres.

Suite à une expertise judiciaire qui faisait état d’un grand nombre de « manquements majeurs » et « d’occasions manquées », les juges d’instruction ont prononcé la mise en examen de l’ancien adjoint au maire de la ville de Marseille, d’un propriétaire d’appartement et du syndic de copropriété de l’immeuble, concernant un second appartement dont il était chargé et qui était à l’époque habité.

Aussi, le mal logement dans le secteur immobilier et la mise en péril de certains bâtiments soulèvent une question : Quelles sont les obligations des propriétaires d’immeuble pour assurer le maintien en bon état de leur bien ?

II) Les obligations du propriétaire de l’immeuble.

La loi impose certains diagnostics au propriétaire d’un bien [2] (diagnostic amiante, termites, plomb, etc) lorsqu’une vente ou une mise en location a lieu.

A défaut de se trouver dans ces situations, il n’est pas explicitement posé d’obligations permettant d’assurer le maintien de l’état d’un immeuble, le Diagnostic Technique Global (DTG) sera le seul mécanisme préventif obligatoire.

Le DTG est un diagnostic précisant l’état apparent de l’immeuble, des parties communes et équipements communs de la copropriété. Il détermine aussi les travaux à prévoir dans les 10 prochaines années.

Depuis le 1er janvier 2017, le diagnostic technique global n’est en général pas obligatoire pour la copropriété. Il n’est obligatoire que dans quelques cas (article 58 de la loi ALUR du 27 mars 2014) :
- Immeuble de plus de 10 ans mis récemment en copropriété.
- Résidence fait l’objet d’une procédure pour insalubrité.

A noter qu’il devient obligatoire pour les copropriétaires depuis le 1er janvier 2017, de se prononcer sur leur volonté de réaliser un DTG.

Néanmoins, aucune sanction n’est prévue par la loi ALUR ou le décret d’application en cas de non-respect de la législation relative au DTG.

Des recours en annulation d’assemblée générale pourraient être intentés par les copropriétaires pour non-respect des règles de vote, etc.

L’intérêt de la réalisation d’un DTG est de connaitre l’état de dégradation de l’immeuble afin d’éviter d’être pris de court par des dépenses importantes.

Durant la possession de l’immeuble et lorsqu’il n’y a pas de vente ou de location, il n’existe pas d’autre diagnostic immobilier obligatoire imposé au propriétaire du bien.

Aussi, en cas de propriété d’un immeuble entier acquis par une seule personne ou par le biais d’une Société Civil Immobilière (SCI), rien ne les oblige à faire établir un DTG.

Cette insuffisance dans la prévention des risques révèle les limites de la loi.

Il est clair que davantage de mesures préventives seraient les bienvenues pour éviter le danger qu’un immeuble en mauvais état pourrait représenter, comme cela a notamment été le cas à Marseille et Bordeaux.

III) La responsabilité du propriétaire d’immeuble.

A) La responsabilité du fait des bâtiments.

Un propriétaire peut voir sa responsabilité extra-contractuelle engagée du fait des bâtiments. Il s’agit d’une responsabilité spéciale du fait des choses.

L’article 1244 (ancien 1386) du Code civil dispose que :
« Le propriétaire d’un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu’elle est arrivée par une suite du défaut d’entretien ou par le vice de sa construction ».

- Un “bâtiment” au sens large correspond à des

« constructions de toute nature élevées au-dessus de la terre et qui constituent un assemblage de matériaux réalisé artificiellement de façon à procurer une union durable » [3].

- Le bâtiment doit être en « ruine » pour que la responsabilité du propriétaire puisse être engagée. C’est à dire que la construction doit se trouver dans un processus de dégradation pouvant aboutir à sa destruction complète.

- Pour finir, la « ruine » doit résulter d’un défaut d’entretien ou d’un vice de construction.

Concernant la mise en œuvre de l’article 1244 du Code civil, la victime ne devra pas nécessairement prouver la faute du propriétaire de l’immeuble, mais simplement établir que le défaut d’entretien ou le vice de construction a causé la ruine du bâtiment. Il s’agit d’une responsabilité objective.

Attention, l’immeuble n’est pas toujours considéré comme étant un bâtiment.

En effet, il s’agira de distinguer l’immeuble par nature (bien qui ne peut être déplacé) de ses accessoires (tuyaux d’amenée d’eau enfouis dans le sol, terres, animaux affectés l’exploitation d’une propriété) qui sont des immeubles par affectation.

De même, l’usufruit, les servitudes, les hypothèques et les actions judiciaires qui tendent à la revendication de la propriété immobilière sont des droits considérés comme étant des biens immobiliers.

Dès lors, seul l’immeuble par nature, c’est à dire la construction, ne peut engager la responsabilité du propriétaire du fait des bâtiments.

En outre, en engageant cette responsabilité (article 1244), la jurisprudence de la Cour de cassation est très claire : On exclut la disposition générale de l’article 1242 (ancien 1384) du Code Civil, c’est à dire la responsabilité du fait des choses.

La victime qui souhaite agir en justice contre le propriétaire d’un immeuble en ruine devra nécessairement intentée une action sur le fondement de la responsabilité du fait des bâtiments. Cette action étant exclusive d’une autre action.

Lorsque les conditions d’application de l’article 1244 sont réunies, la victime ne pourra pas intenter d’autres actions que celle relative à la responsabilité du fait des bâtiments, quand bien même l’article 1242 lui serait plus favorable.

En d’autres termes, la responsabilité du fait des choses sera engagée lorsque les conditions relatives à la responsabilité de l’article 1244 ne seront pas remplies.

B) La responsabilité du fait des choses.

La deuxième chambre civile de la Haute juridiction envisage la situation où le bâtiment ne constitue pas une ruine :
« Mais attendu que si l’article 1386 du code civil vise spécialement la ruine d’un bâtiment, les dommages qui n’ont pas été causés dans de telles circonstances peuvent néanmoins être réparés sur le fondement des dispositions de l’article 1384, alinéa 1er, du même code qui édictent une présomption de responsabilité du fait des choses » [4].

Dès lors, la responsabilité du propriétaire de l’immeuble sera engagée sur le fondement de la présomption de responsabilité du fait des choses, lorsque notamment un véhicule aura été endommagé par la chute de pierres provenant d’une voûte d’un immeuble.

L’article 1242 (ancien 1384) du Code Civil pose le principe de la responsabilité du fait des choses :
« On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ».

Le propriétaire, gardien de l’immeuble, doit donc faire preuve d’une extrême vigilance, puisqu’il peut voir sa responsabilité engagée à cet égard.

Enfin, la responsabilité civile est un énième fondement envisageable, obligeant le propriétaire d’un immeuble à réparer les dommages causés à autrui.

C) La responsabilité civile.

Le propriétaire d’un immeuble a l’obligation de réparer le dommage causé par son bien.

Aussi, il peut voir engager sa responsabilité civile sur le fondement des articles 1240 et 1241 du Code Civil, si des dommages sont causés par sa faute, son imprudence et ou sa négligence.

Selon l’article 1240 du Code Civil :
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

Et, au regard de l’article 1241 du Code Civil :
« Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ».

Ce fondement est confirmé depuis des années par la jurisprudence et repris dernièrement, à titre d’exemple, dans un arrêt de la Cour d’appel de Grenoble du 23 mars 2021 : « Dès lors que la clôture de M. C. a été endommagée par des chutes de neige glissant de l’immeuble des consorts A., alors que le syndicat de copropriétaires doit assurer l’entretien de la toiture, ce syndicat de copropriétaires engage sa responsabilité sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil » [5].

En outre, pour engager valablement la responsabilité civile du propriétaire d’un immeuble, il faudra démontrer le lien de causalité entre le fait générateur et le dommage.

La charge de la preuve appartient à la victime qui devra démontrer l’existence d’un lien de causalité pour obtenir réparation sur le fondement de la responsabilité civile.
Aussi, parce que la responsabilité du propriétaire d’un immeuble l’oblige à réparer le préjudice causé à autrui, il lui sera fortement conseillé, voir imposé de s’assurer.

De cette façon, l’assurance prendra en charge la réparation du dommage causé par l’immeuble et sera un moyen efficace pour garantir la protection du propriétaire.

IV) Les assurances obligatoires et facultatives du propriétaire d’un bien immobilier.

En France, l’obligation de souscrire à une assurance dépend du statut (propriétaire, locataire, copropriétaire)

Concernant le propriétaire d’un bien qui n’est pas en copropriété, il n’a pas l’obligation de souscrire à une assurance habitation, bien que cela soit fortement conseillé.

En revanche, le copropriétaire d’une résidence principale ou secondaire doit à minima, souscrire à l’assurance responsabilité civile.

D’après la loi ALUR du 24 mars 2014 et l’article 9-1 inséré dans la loi du 10 juillet 1965 :
« Chaque copropriétaire est tenu de s’assurer contre les risques de responsabilité civile dont il doit répondre en sa qualité soit de copropriétaire occupant, soit de copropriétaire non-occupant.

Chaque syndicat de copropriétaires est tenu de s’assurer contre les risques de responsabilité civile dont il doit répondre ».

Aussi, le copropriétaire qui occupe son logement ou qui loue son appartement (ou en occupation à titre gratuit), ainsi que celui qui possède un logement vide doit nécessairement souscrire à cette assurance qui lui est obligatoire.

« La responsabilité civile du copropriétaire protège les tiers (syndic, voisin, locataire, colocataire, autre tiers) d’un préjudice causé par :
- un vice de construction dans l’aménagement intérieur du logement.
- un défaut d’entretien des installations électriques, de chauffage, de plomberie, etc.
- d’éventuels troubles de jouissance (pour le locataire ou le colocataire)
 ».

Il faudra néanmoins distinguer le copropriétaire occupant du copropriétaire non occupant :
- Le copropriétaire occupant devra s’assurer en responsabilité civile.
- Le copropriétaire non occupant sera contraint de souscrire l’assurance responsabilité civile de propriétaire non occupant (PNO).

A côté de l’assurance responsabilité civile du copropriétaire, l’immeuble en copropriété doit obligatoirement être assuré par le syndic et les locataires (et colocataires). Il s’agit de contrats d’assurances adaptés à leur qualité propre.

Des assurances facultatives peuvent aussi être souscrites en complément de l’assurance responsabilité civile.

Mais l’assuré doit être vigilant.

L’article L113-1 du Code des assurances dispose :
« Toutefois, l’assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d’une faute intentionnelle ou dolosive de l’assuré. »

En effet, s’il s’abstient volontairement d’entretenir son bien, la garantie qu’il aura alors souscrite pourra lui être refusée.

« La cour d’appel, qui, dans l’exercice de son pouvoir souverain, a retenu que la persistance de M. X... dans sa décision de ne pas entretenir la couverture de son immeuble manifestait son choix délibéré d’attendre l’effondrement de celle-ci, a pu en déduire qu’un tel choix, qui avait pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage et de faire disparaître l’aléa attaché à la couverture du risque, constituait une faute dolosive excluant la garantie de l’assureur et a légalement justifié sa décision » [6].

En d’autres termes, cela signifie que si un propriétaire n’entretient pas son immeuble, alors il ne pourra pas être assuré. Cette faute dolosive (qui se distingue de la faute intentionnelle en ce que l’intention de créer le dommage n’est pas nécessaire) fait perdre à l’assuré sa garantie souscrite.

V) Les mesures curatives en cas de logement indécent, insalubre ou en péril.

La loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain) du 13 décembre 2000 a été notamment pensée pour lutter contre l’habitat insalubre et dangereux en unifiant et en modernisant les procédures.

La loi ALUR du 24 mars 2014 a repris les grands principes de la loi SRU.

L’immeuble doit être décent, des diagnostics permettent de déterminer l’état de décence du bien.

En effet, les diagnostics amiante, gaz, termites, mérule, électricité, plomb, etc, seront des indicateurs pour le locataire ou le vendeur.

Lorsque le propriétaire d’un immeuble ne vend, ni ne loue son bien, il devra néanmoins rester vigilant puisque des procédures pourront être engagées par le préfet.

Des mesures curatives permettront d’éliminer le défaut causé par le manque de diligence ou de vigilance du propriétaire.

A) Le logement indécent.

L’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 dispose :

« Le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d’espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation ».

Cette obligation légale s’applique concernant la résidence principale du locataire (article 2 de la loi du 6 juillet 1989).

Aussi, le propriétaire-bailleur doit fournir un logement en bon état d’usage et de réparation.

A titre d’exemple, une toiture non étanche, un mauvais état du gros œuvre ou des matériaux détériorés ne permettent pas de qualifier le bien de décent.

En cas de non-décence du logement, le locataire peut prendre contact avec le propriétaire responsable de l’état du bien loué. Ce dernier devra effectuer toutes les réparations autres que celles qui incombent normalement au locataire.

A défaut d’accord, le locataire pourra saisir la Commission Départementale de Conciliation.

Néanmoins, si aucune solution n’est trouvé par la Commission, un mode alternatif de règlement des litiges pourra être envisagé (conciliation, médiation).

Enfin, le locataire pourra aussi saisir le juge du tribunal des contentieux de la protection.

Rappelons que le manque de décence d’un logement reste un litige entre le locataire et le bailleur.

En effet, la décence ou non du logement ne représente pas, prima facie, un danger immédiat et suffisant important justifiant l’intervention de l’autorité publique.

B) Le logement insalubre.

Si un immeuble ou logement présente un danger pour la santé des occupants ou du voisinage, alors des mesures pourront être mises en place pour y remédier.

Toute personne qui a connaissance de l’insalubrité d’un habitat doit la signaler au préfet du département. La préfecture pourra ainsi procéder à l’évaluation des risques et si nécessaire, au traitement de l’insalubrité via un arrêté de traitement de l’insalubrité.

La procédure de classement en insalubrité pourra être déclenchée notamment en cas d’humidité importante, de présence d’amiante, de plomb, de murs fissurés…

La mauvaise qualité ou la dégradation des structures d’un bâtiment (fondations, murs, etc) sont des situations rendant le bien insalubre.

Le préfet constatera ensuite la réalisation des travaux ordonnés et prononcera la mainlevée de l’arrêté qui a prononcé l’interdiction d’habiter les lieux, de les utiliser ou d’y accéder.

Si les travaux ordonnés (démolition de tout ou partie de l’immeuble ou de la construction, réparation, etc) n’ont pas été effectué dans un délai fixé, le préfet pourra faire procéder d’office à leur exécution. Ces travaux seront à la charge du propriétaire de l’immeuble ou du syndic de copropriété.

C) Les procédures de protection du logement.

La loi ELAN du 23 novembre 2018 opère un changement dans la politique de lutte contre l’habitat indigne.

L’article 198 de la loi habilite le Gouvernement à adopter par ordonnance des mesures législatives visant à harmoniser et simplifier les polices administratives afin de répondre plus efficacement à l’urgence de telles situations.

Aussi, le 16 septembre 2020, l’ordonnance n°2020-1144 relative à « l’harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations » a été prise par le Gouvernement.

A partir du 1er janvier 2021, une police administrative spéciale unique est instaurée, réunissant ainsi les objectifs de sécurité et de salubrité des immeubles bâtis. Cette police rassemble ainsi plus d’une dizaine de procédures, auparavant dispersées dans le Code de la construction et de l’habitation (CCH) et le Code de la santé publique (CSP).

A noter que les dispositions de l’ordonnance ne sont applicables qu’aux arrêtés notifiés à compter du 1er janvier 2021 selon l’article 19 de l’ordonnance n°2020-1144.

Le Code de la construction et de l’habitation prévoit dans son Titre Ier, un Chapitre unique consacré à la sécurité et la salubrité des immeubles, locaux et installations (articles L511-1 à L511-22).

La sécurité publique exige des immeubles qu’ils ne présentent pas de défauts de solidité pouvant exposer les occupants ou les tiers à un danger grave.

A défaut, une procédure pourra être engagée par le maire ou le préfet (article L511-4).

Des mesures d’urgence pourront aussi être prises (démolition, évacuation, etc) dans le cas où l’immeuble ou une partie qui le compose (plancher, balcon, etc) menace de s’effondrer.

Toute personne qui a connaissance de faits révélant une situation menaçante devra les signaler à la mairie par tous moyens.

Deux procédures peuvent être mises en place :
- La procédure hors cas d’urgence (articles L511-4 à L511-18 du CCH)
- La procédure d’urgence (article L511-19 à L511-21 du CCH)

VI) Les risques pour le propriétaire d’un logement insalubre ou ne répondant pas aux obligations de sécurité.

L’article L511-22 du CCH expose clairement les sanctions pénales applicables à la personne ne répondant pas à ses obligations de sécurité et salubrité de son immeuble, local ou installation.

Le propriétaire s’expose aux mêmes sanctions qui étaient auparavant appliquées. Les risques pour lui ne changent pas, tandis que la procédure se dé-complexifie, permettant aux pouvoirs d’adopter plus rapidement les mesures adéquates face à la situation de danger.

Ces sanctions sont :

- Refus volontaire de réaliser les travaux :
- 1 an d’emprisonnement ;
- Une amende de 50 000 euros.

- Refus volontaire de reloger le locataire :
- 3 ans d’emprisonnement ;
- Une amende de 100 000 euros.

- Dégrader le logement pour faire partir le locataire :
- 3 ans d’emprisonnement ;
- Une amende de 100 000 euros.

Dans ces trois situations, les juges peuvent aussi décider de confisquer l’immeuble ou le logement et/ou interdire pour 10 ans maximum le propriétaire d’acheter un bien immobilier pour le louer. A titre d’exemple, la Cour d’appel de Paris a rendu un jugement le 12 mars 2002 condamnant un prévenu ayant continué à louer malgré l’interdiction d’habiter et d’utiliser un local insalubre [7].

Conclusion.

En définitive, les premiers effondrements survenus à Marseille ont mis en lumière un véritable fléau : les carences législatives concernant l’entretien des immeubles.

Une menace encore plus dangereuse que la simple et très prévisible usure du temps.

Si la France découvre qu’elle regorge aujourd’hui d’habitat indigne et dangereux, menaçant la santé et la sécurité de sa population, n’aurait-elle pas pu l’éviter en prévenant plutôt qu’en cicatrisant ?

La législation actuelle fait défaut quant aux obligations des propriétaires d’immeuble. S’ils doivent effectivement maintenir leur immeuble en bon état, rien ne les oblige véritablement, avant que celui-ci ne soit insalubre ou ne tombe en ruine.

Or, il suffirait d’exiger un DTG pour les immeubles anciens afin d’obtenir une excellente connaissance de l’habitat d’une commune et que soient mises en place, si nécessaire, les mesures conservatrices garantissant la sécurité et la santé de tous.

Parce que « Toute petite tâche quotidienne et quotidiennement accomplie, donne de meilleurs résultats que de sporadiques travaux d’Hercule ».

Le législateur doit réagir et garantir définitivement par des règles claires et précises, le bon état des immeubles.

Charles Paumier, Avocat https://avocat-paumier.fr Elisa Rouaix, Stagiaire Master 2 https://www.linkedin.com/in/elisa-rouaix-41aa1618b

[3Définition du bâtiment donnée par CA Paris, 26 nov. 1946, Deurbergue : JCP G 1947, II, 3444.

[4Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 22 octobre 2009, 08-16.766, Publié au bulletin.

[5Cour d’appel, Grenoble, 2e chambre civile, 23 Mars 2021 - n° 19/01417.

[6Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 25 octobre 2018, 16-23.103, Publié au bulletin.

[7CA Paris, 12 mars 2002, n°2001/03725.

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