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Dépôt de bilan : les risques du dirigeant. Par Ketty Leroux, Avocate.
Parution : jeudi 9 septembre 2021
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Lors de l’accompagnement des chefs d’entreprise dans leurs problématiques de procédures collectives, la question la plus souvent posée est : qu’est-ce que risque le dirigeant lors d’une procédure collective ?

Evidemment, si le dirigeant a commis une faute de gestion, ce qui n’est pas forcément acquis à l’ouverture de la procédure, une telle faute sera peut-être démontrée par le ministère public ou par le mandataire judiciaire en cours de procédure.

Il existe trois niveaux de sanctions pour le dirigeant.

La première, la moins grave, est une interdiction de gérer. Elle peut être modulée par le tribunal et tout simplement elle interdit au dirigeant non seulement de diriger une entreprise, mais également une société. Il faut savoir que lors des débats sur une audience de sanction de ce type, on peut demander à ce que certaines sociétés soient exclues de l’interdiction de gérer. Par exemple, c’est le cas si un dirigeant est dirigeant de deux sociétés, dont l’une est en procédure collective et l’autre in boni.

On pourrait alors par exemple, démontrer que le dirigeant a tout intérêt à conserver la direction de la deuxième société in boni et qu’il ne devrait pas être atteint par cette interdiction de gérer.

Le deuxième niveau de sanction est la faillite personnelle. La faillite personnelle emporte les mêmes conséquences que l’interdiction de gérer, mais avec un niveau de gravité un peu supérieur ; en effet, le dirigeant ne pourra pas non plus diriger une association et il peut être privé de fonctions électives ; et surtout cela peut engendrer comme conséquence pour le débiteur personne physique la reprise des poursuites individuelles par le créancier pendant un délai que détermine le tribunal.

En clair, si une faillite personnelle est prononcée, par exemple contre un commerçant, pendant une durée de cinq ans, cela signifie que pendant ce délai de cinq ans, n’importe quel créancier de la procédure collective pourrait décider de reprendre les poursuites à l’encontre de ce dirigeant personne physique. Il s’agit donc d’une sanction qui est plus lourde que l’interdiction de gérer et beaucoup plus stressante.

Le troisième niveau de sanction est l’action en comblement du passif ; ceci permet au mandataire judiciaire de demander à ce que le dirigeant contribue en totalité ou partiellement à l’insuffisance d’actifs de la société. Lorsque cette action est entreprise, elle donne lieu à des débats, ainsi qu’à une audience, au cours desquels on va juger les fautes de gestion, la gravité des fautes et surtout le lien de causalité entre ces fautes et l’insuffisance d’actifs. Il faut savoir que le tribunal a un grand pouvoir de modulation, autant en fonction de la situation personnelle du dirigeant que de la gravité des fautes.

Ainsi, clairement, un dirigeant pourrait être condamné à payer 10%, 20%, 30% du passif, et la sanction peut même aller jusqu’à 100% du passif après ce genre d’audience.

Mais le tribunal a en fait une obligation de moduler cette condamnation, tout dépendra concrètement des antécédents du dirigeant : a-t-il déjà été dirigeant d’une entreprise en procédure collective ou est-ce la première fois qu’il est confronté à une procédure collective, quel est le montant du passif, etc.?

Bien évidemment, il serait prudent de se faire rapidement accompagner afin de tenter de limiter les risques si une telle audience devait finalement avoir lieu et qu’une sanction soit demandée à votre encontre en tant que dirigeant d’entreprise ou de société.

Maître Ketty Leroux, avocate, droit des affaires et des sociétés Cabinet Naïm & Leroux avocats, Fiscalité et droit des affaires www.jedeposemonbilan.com