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La résiliation de l’abonnement internet/téléphonie, quelques rappels. Par Dimitri Seddiki-Défossé, Avocat.
Parution : samedi 11 septembre 2021
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Pour le consommateur désireux de se délier du contrat le liant à son fournisseur d’accès à internet ou de téléphonie à l’issue de sa période d’engagement, le parcours est long (I) et les frais de résiliation apparaissent comme une étape incontournable (II).

Pourtant, le Code de consommation comporte un certain nombre de raccourcis.

Pour le consommateur désireux de se délier du contrat le liant à son fournisseur d’accès à internet ou de téléphonie à l’issue de sa période d’engagement, le parcours est long (I) et les frais de résiliation apparaissent comme une étape incontournable (II).

Pourtant, le Code de consommation comporte un certain nombre de raccourcis.

I. L’obtention de l’adresse à laquelle adresser le courrier de résiliation.

Il suffit de quelques minutes et d’une carte bancaire pour souscrire un abonnement. Sans le moindre contact humain donc. Magie de la technologie.

Il faudra en revanche une bonne heure au téléphone et une indéfectible patience pour obtenir l’adresse à laquelle adresser le courrier notifiant (il ne s’agit pas d’une « demande » !) la résiliation de l’abonnement.

Ce véritable parcours du combattant devrait pourtant être du passé.

L’article L224-42 du Code de la consommation, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2021-650 du 26 mai 2021 portant transposition de la directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 énonce : « Les informations sur les conditions et procédures de résiliation des services et, le cas échéant, de restitution du matériel, sont communiquées au consommateur de manière directe, facilement accessible et sans qu’il soit besoin pour le consommateur de se mettre en relation avec le fournisseur, de sorte qu’elles ne constituent pas un obstacle au changement de fournisseur ».

Il n’est pas habituel qu’une disposition prenne soin d’indiquer l’objectif qu’elle poursuit.

En l’occurrence la volonté d’éviter que le consommateur se heurte à « un obstacle au changement de fournisseur » témoigne d’une parfaite connaissance des procédés des fournisseurs qui tentent de dissuader les consommateurs de se délier du contrat en usant de méthodes douteuses : questionnaire extrêmement long, annonce de prétendus frais, proposition d’options exotiques, rupture de la communication…

Las, force est de constater qu’au jour de la rédaction de cet article, ces manœuvres persistent.

II. Les frais de résiliation.

Dès la conclusion du contrat, le fournisseur va communiquer au consommateur une grille tarifaire indiquant notamment les frais que ce dernier devra supporter en cas de résiliation à son initiative.

Et le fournisseur ne manquera pas d’ajouter une ligne correspond à cette indemnisation forfaitaire et contractuelle sur l’ultime facture de clôture.

C’est oublié les dispositions de l’article L224-40 du Code de la consommation qui prévoient : « Le fournisseur de services proposant au consommateur, directement ou par l’intermédiaire d’un tiers, un service de communications électroniques, ne peut facturer au consommateur, à l’occasion de la résiliation, que les frais correspondant aux coûts qu’il a effectivement supportés au titre de la résiliation, sans préjudice, le cas échéant, des dispositions contractuelles portant sur le respect d’une durée minimum d’exécution du contrat.
Ces frais ne sont exigibles du consommateur que s’ils ont été explicitement prévus dans le contrat et dûment justifiés
 ».

L’imputation de frais de résiliation suppose donc la réunion de 2 conditions :
1. Une disposition contractuelle expresse
2. Une justification des frais réels

Inutile de préciser que cette seconde condition est systématiquement occultée.

Pourtant, la jurisprudence veille et refuse l’imputation de « frais appréciés globalement » [1] :

« Sur les frais de résiliation :

Considérant que les CGV et la brochure tarifaire stipulent la perception de frais de résiliation d’un montant de 49 euros, étant observé qu’il n’est pas contesté que les abonnements aux services de FREE sont souscrits pour une durée initiale déterminée et qu’ensuite en se renouvelant tacitement, ils deviennent à durée indéterminée, de sorte que chaque contractant peut unilatéralement sans faute y mettre un terme en respectant un délai raisonnable de prévenance, dont la durée est généralement déjà prévue par les parties ;

Que c’est dans ce contexte général qu’il convient d’interpréter l’article L 224-40 [2] du Code de la consommation qui dispose qu’en cas de résiliation à l’initiative du consommateur, on ne peut lui facturer que les frais dûment justifiés effectivement supportés au titre de la résiliation, les seuls frais pris en compte devant être en relation directe avec la résiliation par le client considéré sans pouvoir y inclure des frais appréciés globalement qui, en faisant partie des charges générales d’exploitation de l’entreprise, ne sont pas directement générés par une résiliation particulière ».

Par la suite la Cour se livre à une analyse précise des frais initialement imputés afin d’en écarter un certain nombre.

A coté de cette disposition de portée générale, d’autres textes permettent également d’écarter les frais de résiliation dans des circonstances particulières, et notamment :

A. En cas de projet de modification tarifaire.

Il s’agit généralement de la situation où le consommateur est destinataire d’un mail l’informant d’une grande nouvelle : moyennant 3 euros par mois il va pouvoir bénéficier d’une heure d’appel vers des pays dont il ignorait l’existence jusque-là.

Une mention en caractères minuscules va préciser au consommateur qu’il peut refuser cette modification contractuelle et résilier le contrat dans un délai de 4 mois.

Il s’agit d’une information incomplète quant au contenu de l’article L224-33 du Code de la consommation qui énonce :

« Tout projet de modification des conditions contractuelles est notifié par le fournisseur de services de communications électroniques au consommateur, de manière claire et compréhensible, sur support durable au moins un mois avant son entrée en vigueur. Ce même projet informe le consommateur qu’il peut, s’il n’accepte pas ces nouvelles conditions, résilier le contrat sans aucun frais et sans droit à dédommagement dans un délai de quatre mois suivant la notification du projet de modification ».

On ne saurait faire plus clair.

B. La défaillance du service.

Il s’agit ici de l’hypothèse classique où les performances ne son pas au rendez-vous.

Alors, l’article L224-34 du Code de la consommation énonce :

« Le consommateur peut résilier le contrat, sans aucun frais, en cas d’écart significatif, permanent ou fréquent, entre les performances réelles d’un service de communications électroniques, autre qu’un service d’accès à l’internet, et les performances mentionnées dans le contrat.

Lorsqu’en application de l’alinéa précédent, un consommateur résilie un contrat portant sur un service de communications électroniques accessible au public avant la fin de la durée contractuelle, aucune indemnité ne peut lui être demandée ».

Pour éviter tout contentieux ultérieur, le consommateur aura tout intérêt à se ménager la preuve des dysfonctionnements et de ses réclamations.

Ainsi, il résulte des dispositions précitées qu’en dépit du ton péremptoire des fournisseurs, le consommateur n’est pas démuni au moment de se délier du contrat.

Il importe désormais que les consommateurs se saisissent de ces textes et que les pouvoirs publics sanctionnent plus sévèrement les abus de fournisseurs pariant sur l’ignorance de leurs droits par les consommateurs.

Dimitri Seddiki-Défossé Avocat au Barreau de Lille Enseignant en droit des obligations et procédure civile

[1Ex : Paris, Pôle 5, chambre 11, 12 Octobre 2018 - n° 16/08227.

[2Ancien article L121-84-7.