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L’entreprise solidaire de ses salariés aidants familiaux : bilan et propositions. Par Francine Summa, Avocate.
Parution : vendredi 1er octobre 2021
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Le 28 septembre 2021, le 2ème Colloque de l’Observatoire Solidaire organisé par la Mutuelle Générale en partenariat avec Les Échos s’est tenu pour faire le bilan de l’année écoulée sur les actions solidaires menées par l’entreprise en faveur des aidants familiaux salariés. Ce colloque a été inauguré par Madame Brigitte Bourguignon, ministre déléguée chargée de l’Autonomie auprès du ministre des Solidarités et de la Santé en partenariat avec plusieurs autorités du monde de l’entreprise et de la solidarité, et de l’assurance.
Ce colloque a fait le bilan de l’année 2020- entravée par la période Covid-bilan mitigé.

Un rappel des droits existant dont certains liés au statut salarial (I) permet de recadrer le champ d’action de l’entreprise, restreint par la difficulté de cerner les salariés concernés et de trouver les mesures utiles à cette catégorie de personnel de façon à alléger leur charge, de leur permettre d’avoir tous les moyens possibles pour être à 100% de leurs capacités et d’éviter un absentéisme préjudiciable à l’entreprise. Plusieurs options ont été évoquées (II).

1 - Rappel des droits existant dont certains liés au statut salarial.

1-1 : La définition légale date de la Loi n°2015-1776 du 28 décembre 2015- article 51 relative à l’adaptation de la société au vieillissement.

Intégré dans l’article L 113-1-3 du Code de l’action sociale et des familles,le critère est lié à l’aide sans distinction du lien familial : “Est considéré comme proche aidant d’une personne âgée son conjoint,le partenaire avec qui elle a conclu un pacte de solidarité ou son concubin, un parent, un allié, définis comme aidants familiaux, ou une personne résidant avec elle ou entretenant avec elle des liens étroits et stables, qui lui vient en aide , de manière régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne.

L’aidant familial est défini à l’article R 245-7 du Code de l’action sociale et des familles : Est considéré comme aidant familial, pour l’application des l’article L 245-12, le conjoint, le concubin, la personne avec laquelle la personne handicapée a conclu a conclu un pacte civil de solidarité, l’ascendant, le descendant ou le collatéral jusqu’au 4ème degré de la personne handicapée, ou l’ascendant, le descendant ou le collatéral jusqu’au 4ème degré de l’autre membre du couple qui apporte l’aide humaine définie en application des dispositions de l’article L245-3 du présent code et qui n’est pas salarié pour cette aide.

En 2017, les aidants étaient dénombrés à 11 millions. La majorité est constituée de retraités. Si les retraités ont du temps, la charge est importante par la répétition et la pénibilité d’actes d’aides-soignants que comporte l’aide quotidienne.

Elle est aussi rendue difficile pour des personnes plus jeunes, salariées par le cumul des tâches, professionnelles et familiales dans un espace temps limité.

1-2. Les dispositifs pour les aidants salariés.

Des dispositions ont été prises par la Loi pour soulager les salariés en leur donnant la possibilité de congés supplémentaires donnés par les salariés de l’entreprise sur leurs RTT - Article L.3142-25-1 du Code du Travail (Loi n°2018-84 du 18 février 2018).
Et la Loi n°2019-485 du 23 mai 2019 a ouvert des droits sociaux aux salariés du privé et du public par l’aménagement d’un congé -dit droit au répit- pouvant aller jusqu’à trois mois, indemnisé par l’assurance maladie et non par l’employeur.
Ces congés devant permettre à l’aidant de se reposer, de concilier sa vie personnelle et professionnelle. Outre des dispositifs de formation et d’accompagnement.

2 - Un bilan mitigé.

Les études faites par l’Observatoire Solidaire - Questionnaires à un échantillon de 2800 personnes et auprès du personnel de la Mutuelle Générale ont montré une réticence à répondre, qui n’a pas été comprise par les entreprises. Pourquoi ne pas se faire connaître à une personne de la Direction du personnel alors que cette démarche n’est faite que pour le bien commun de chacun ?
L’absentéisme, le mal-être au travail sont un problème tant pour l’employeur que pour le salarié qui n’arrive plus à gérer son temps et risque un “burn out”.

Trois objectifs ont donc été posés par les intervenants :
- Informer le personnel de l’action aidante décidée par l’entreprise
- Détecter les salariés aidants familiaux afin de les accompagner
- Agir : quelles actions complémentaires de celles de l’assistante sociale peuvent être engagées ?

A cette fin, une personne pourrait être désignée- mission supplémentaire ou poste à créer- chargée de centraliser les informations sur les aides existantes, d’aider à monter les dossiers administratifs, d’être à l’écoute, de réconforter par son action humaine et bienfaisante. Valoriser la charge des aidants par une reconnaissance de l’entreprise est très important pour eux, cette chaleur morale redonne une énergie à ces personnes qui se sentent comprises et approuvées.

Si le nom trouvé à ce poste “Technicien Accompagnateur Coordinateur…” TACSA” a été raillé avec raison par l’assemblée- comment parler “technique” pour une qualification de cœur et humaine ?- l’idée de concentrer dans l’entreprise une personne comparable à l’assistante sociale qui puisse aider et accompagner l’aidant est à retenir.
Rappelons que les grandes entreprises ou institutions ont déjà des assistants sociaux à la disposition des salariés pour les informer et les aider pour la maladie, le congé maternité, les droits sur la retraite…etc. Il leur reviendrait de droit l’information sur les droits des aidants.
Les participants ont bien insisté sur la différence entre les grandes entreprises et les entreprises de taille inférieure. Si les structures permettent aux grandes entreprises d’offrir plus de moyens, par contre le relationnel, l’aspect humain dans les petites entreprises est très fort et la solidarité entre collègues s’en ressent.
En outre, des structures financières- un compte solidaire dans l’entreprise pour financer des actions solidaires, un plan d’épargne dépendance à proposer au salarié, déductible, transmissible à un proche, toutes ces options ont été envisagées.

Conclusion.

L’entreprise confirme sa volonté de reconnaître la dépendance et d’aider l’aidant salarié dans cette charge quotidienne de long court. En valorisant le travail de l’aidant, l’entreprise apporte sa participation au traitement de la dépendance, désormais 5ème risque de l’assurance maladie.

Francine Summa, Avocate, Médiatrice familiale.