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Le sort du contrat de travail en cas de retrait d’une FIDAA. Par Cécile Villié, Avocat.
Parution : mardi 30 novembre 2021
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L’exécution du contrat de travail peut être conditionné à un agrément ou une habilitation administrative.
Tel est le cas du salarié dont les fonctions nécessitent l’accès aux centres nucléaires de production d’électricité (CNPE) subordonné à la détention d’une fiche individuelle d’autorisation d’accès (FIDAA).

L’obtention de la FIDAA se fait à l’issue d’une enquête administrative se résumant à vérifier que les antécédents et le comportement d’une personne ne sont pas incompatibles avec la fonction occupée et ses missions.

Une fois n’est pas coutume, ces enquêtes administratives sont renouvelées annuellement depuis peu. La tâche est confiée au commandement spécialisé pour la sécurité nucléaire (Cossen) qui a accès à 9 fichiers, à savoir notamment le TAJ (traitement d’antécédents judiciaires, c’est-à-dire toutes les fois où le salarié a été mis en cause dans une affaire pénale), le FSPRT (fichiers des signalements pour la prévention de la radicalisation terroriste) ou encore le FPR (fichier des personnes recherchées).

Le retrait d’une FIDAA entraîne instantanément l’interdiction d’accès du salarié à l’ensemble des CNPE. En plus de pouvoir constituer un obstacle à l’embauche, ces enquêtes administratives peuvent désormais remettre en cause la conservation d’un emploi dans le cas d’un tel retrait.

Quel est le sort du salarié dont la FIDAA fait l’objet d’un retrait par l’Administration ?

Un recours de cette décision de la part du salarié est possible, toutefois, celle-ci ne sera pas suspensive. Dès lors, l’article L114-2 du Code de la sécurité intérieure prévoit que dans un tel cas

« l’employeur lui propose un emploi autre que ceux mentionnés au premier alinéa et correspondant à ses qualifications. En cas d’impossibilité de procéder à un tel reclassement ou en cas de refus du salarié, l’employeur engage à son encontre une procédure de licenciement. Cette incompatibilité constitue la cause réelle et sérieuse du licenciement, qui est prononcé dans les conditions prévues par les dispositions du Code du travail relatives à la rupture du contrat de travail pour motif personnel ».

Le retrait de la FIDAA constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement si l’employeur souhaite rompre le contrat de travail du salarié.

Toutefois, le retrait de la FIDAA peut faire l’objet d’une annulation postérieurement au licenciement.

Dans ce cas, la jurisprudence retient que la décision du préfet de revenir sur un retrait d’agrément et d’autoriser le salarié à exercer sa profession dans le domaine de la sécurité privée confère à l’intéressé un droit définitivement acquis à être réputé n’avoir jamais perdu cet agrément. Dès lors, le licenciement prononcé avant l’annulation de la décision de retrait, est dépourvu de cause réelle et sérieuse [1].

Il arrive parfois que les hauts magistrats retiennent la faute grave du salarié pour le licencier.

Tel est le cas de l’agent de sécurité qui a dissimulé pendant plusieurs mois à l’employeur sa condamnation pénale qui lui interdisait de poursuivre son activité, le CPH avait pu en déduire que ce manquement aux obligations professionnelles rendait impossible la poursuite du contrat de travail et constituait une faute grave [2].

Aussi, justifiait légalement sa décision de confirmer le licenciement pour faute grave d’un salarié, la cour d’appel qui avait constaté que l’agrément administratif du salarié lui avait été retiré du fait de son échec au contrôle de connaissances et qu’il avait refusé les tâches proposées par l’employeur pour lesquelles l’agrément n’était pas requis [3].

Durant la période où le salarié exerce son recours, des solutions alternatives peuvent lui être proposée d’un accord commun avec l’employeur : prise de congés-payés ou de congés sans soldes. Il faudra toutefois veiller à ce que cela soit suffisant pour couvrir toute la période allant jusqu’à la décision de l’Administration.

Cécile Villié avocat - droit du travail www.villie-avocat.com [->contact@villie-avocat.com]

[1Cass. soc., 25 mars 2009, n°07-45.686.

[2Cass. soc., 18 nov. 2009, n°08-41.243.

[3Cass. soc., 12 févr. 2003, n°00-45.667.