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Variant Omicron : impact sur les droits des passagers aériens. Par Anaïs Escudié et Guilhem Della Malva, Juristes.
Parution : jeudi 2 décembre 2021
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La pandémie de covid-19 n’est manifestement pas terminée, comme le prouve les inquiétudes partagées par de nombreux gouvernements à propos du variant Omicron.
Celui-ci est en effet jugé susceptible de provoquer une nouvelle flambée épidémique. De multiples cas d’infections par le nouveau variant ont déjà été recensés à travers le monde.
Article vérifié par l’auteur en septembre 2023.

L’Europe ne semble encore une fois pas épargnée : les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l’Espagne, la Belgique, l’Allemagne, l’Italie ou encore la République Tchèque ont tous annoncé la détection d’infection par ce variant sur leurs territoires.

Bien que toute la lumière n’ait pas encore été faite sur les risques associés au variant Omicron, les doutes et les inquiétudes ont provoqué la fermeture des frontières par les gouvernements de nombreux pays : Royaume-Uni, Japon, Australie, Maroc… Le transport aérien fait donc à nouveau face à des restrictions importantes, et de nombreuses annulations et retards sont à prévoir pour les passagers aériens. Face à ces nouveaux obstacles au voyage, quels sont les droits des voyageurs victimes de retards ou d’annulations ?

Pas d’indemnisation pour les passagers concernés.

Le règlement européen n°261/2004 du 11 février 2004, accompagné de la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) « Sturgeon contre Condor Flugdienst GmbH » (C-402/07) du 19 novembre 2009, permet aux passagers dont le vol a été retardé ou annulé d’exiger une indemnisation indexée sur la distance du trajet. L’article 5, 3. du règlement dispose cependant que le transporteur est exempté de cette obligation d’indemnisation du passager s’il est en mesure de prouver que la perturbation du vol est due à des circonstances extraordinaires qui n’auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises.

La définition de ces circonstances extraordinaires a été précisé à plusieurs reprises par la CJUE. Il est désormais reconnu que la circonstance extraordinaire est un évènement inhérent à l’exercice normal de l’activité du transporteur aérien concerné qui échappe à la maîtrise effective de celui-ci (voir en ce sens le point 37 de l’arrêt 11 juin 2020 dans l’arrêt « Le contre Transportes Aéros Portugueses », aff. C-74/19).

En l’espèce, la fermeture des frontières par les Etats en réaction à une nouvelle flambée pandémique est un cas d’école de la circonstance extraordinaire. Même dans un contexte de pandémie long, depuis bientôt 2 ans, l’apparition d’un variant à l’origine de nouvelles restrictions justifie parfaitement l’exemption pour les transporteurs d’indemniser les passagers touchés par des éventuelles annulations ou retard de vol.

Le remboursement du vol annulé.

Il est à prévoir que l’isolation volontaire de différents Etats sera à l’origine de l’annulation d’un nombre conséquent de vols. A cette occasion, il est important de rappeler que l’article 5 du règlement, par renvoi à l’article 8, dispose que les passagers doivent alors se voir proposer un choix entre un remboursement et un vol de réacheminement à une date ultérieure et dans des conditions similaires. Si la compagnie peut proposer un avoir aux passagers, elle ne peut en aucun cas l’imposer, ainsi que l’a rappelé la commissaire européenne aux Transports Adina Valean [1].

Logiquement, ces dispositions font que les passagers ne seront pas en droit d’exiger un remboursement si le vol n’a pas été annulé, et ce même s’ils ne peuvent plus voyager pour toute raison (confinement dans l’Etat de départ, restrictions à leur destination rendant le voyage inutile, etc). Dans cette situation, il est recommandé de contacter sa compagnie dès que possible, et de tout même tenter de réclamer un remboursement. A défaut, il est conseillé de réclamer un avoir valable sur un prochain vol ; cette solution est généralement acceptée par les compagnies.

La prise en charge des besoins des passagers par leur compagnie aérienne.

Les passagers qui verraient leur vol annulé ou fortement retardé voient également certains de leurs besoins pris en charge par le transport, ainsi que l’y oblige le règlement.

En cas de retard, l’article 6, 1. opère un renvoi vers l’article 9 dispose que les passagers doivent se voir proposer la possibilité de se rafraichir et de se restaurer.

En cas d’annulation, les dispositions précédentes sont également valables dans l’attente d’un prochain vol promis par la compagnie, mais l’article 5 rajoute également, par renvoi à l’article 9, 1. b) que les passagers peuvent bénéficier de la prise en charge de la ou des nuits d’hôtel ainsi que du transport entre l’aéroport et l’hôtel. Comme rappelé par la CJUE dans l’arrêt « McDonagh contre Ryanair Ltd » en date du 31 janvier 2013 (aff. C-12/11), quelle que soit la nature ou la durée de la circonstance extraordinaire en cause, le transporteur aérien n’est pas libéré de son obligation de prise en charge des besoins du passager, compris des frais d’hébergement à l’hôtel supportés à la suite de l’annulation d’un vol.

Si la compagnie ne fournit pas tous ses services, malgré l’obligation qui lui est faite par le règlement européen, il est alors conseillé de conserver les factures pour tout rafraichissement, restauration, transport jusqu’à l’hôtel et nuitées payés de sa propre poche par le passager. La compagnie sera ensuite dans l’obligation de vous les rembourser sur présentation de justificatif.

Attention cependant, elle ne lui remboursera pas les dépenses jugées excessives !

Anaïs Escudié, Présidente de RetardVol et Guilhem Della Malva, Juriste expert chez RetardVol