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La nouvelle procédure de traitement de sortie de crise. Par Assia Medrouni, Avocat.
Parution : jeudi 3 février 2022
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Nouvel outil à disposition des entreprises rencontrant des difficultés conjoncturelles dues à la crise sanitaire, la nouvelle procédure de traitement de sortie de crise du livre 6 du Code de commerce sur la prévention et le traitement des difficultés d’entreprises permet de présenter en quelque semaine un plan de restructuration des dettes de toutes nature dont le PGE et de les étaler sur une période pouvant aller jusqu’à 10 ans.

La nouvelle procédure de traitement de sortie de crise instituée par la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 (JO, 1er juin) a pour objectif de permettre aux entreprises qui connaissent des difficultés conjoncturelles liées à la crise sanitaire de présenter un plan de sortie de crise en quelques semaines.

Il s’agit d’une procédure temporaire, rapide et volontariste applicable à compter du 2 juin 2021 pour une durée de deux ans, soit jusqu’au 2 juin 2023.

Les entreprises éligibles au dispositif doivent être en état de cessation des paiements mais devront disposer des fonds disponibles pour payer leurs créances salariales et justifier être en mesure d’élaborer un projet de plan tendant à assurer la pérennité de l’entreprise dans le court délai prévu par la loi.

Cette procédure de traitement de sortie de crise pourrait être qualifiée de procédure de redressement judiciaire accéléré car elle renvoie largement aux dispositions du redressement judiciaire en le simplifiant et en accélérant son déroulement. Une différence, majeure outre sa rapidité, réside dans l’absence de régime de prise en charge des créances salariales.

Deux décrets n° 2021-1354 et n° 2021-1355 du 16 octobre 2021 (JO, 17 oct.) apportent les précisions nécessaires à sa mise en œuvre, en particulier les seuils d’application.
Les entreprises éligibles sont celles employant moins de 20 salariés à la date de la demande et dont le total de passif hors capitaux propres est inférieur à 3 millions d’euros. Ce dernier critère doit être apprécié à la date de clôture du dernier exercice comptable.

Le tribunal saisi par l’entreprise concernée ouvrira une période d’observation de 3 mois.
Il désignera un juge commissaire et pourra désigner un mandataire de justice, administrateur ou mandataire judiciaire, en charge d’une mission de simple surveillance.
Ainsi, le dirigeant ou l’entrepreneur indépendant gardera le contrôle et assurera l’administration de son entreprise.

Cette courte période d’observation de trois mois est rendue possible par l’absence de régime de déclaration des créances auprès du mandataire judiciaire et du processus de contestation des créances.
L’entreprise débitrice établit la liste des dettes de toutes natures (financières, sociales et fiscales, fournisseurs…) qui sera déposée au greffe et pourra faire l’objet d’une contestation de la part des créanciers dans un format réduit en termes de délais.

A l’issue de cette période de 3 mois, un plan de restructuration et d’apurement des dettes sur une durée pouvant aller jusqu’à 10 ans sera présenté, les annuités ne pouvant être inférieures à 8% du passif. Les créanciers sont consultés au préalable sur ce projet de plan.

A défaut de plan arrêté dans ce délai, le tribunal, à la demande du débiteur, du mandataire s’il en a été désigné ou du ministère public, ouvrira une procédure de redressement judiciaire, ou prononcera la liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible.

Voici donc un nouvel outil à disposition des entreprises, notamment celles rencontrant des difficultés à faire face au remboursement de leurs prêts garantis par l’Etat (PGE) dans les délais légaux lesdits PGE pouvant être restructurés dans ce cadre.
Espérons que les juridictions feront preuve d’une certaine bienveillance en cas de léger dépassement des délais de la période d’observation car il serait dommageable de réduire son efficacité par une approche trop stricte en présence de perspectives réelles de redressement à très court terme.

En tout état de cause, le plan de sortie de crise doit être préparé, au moins dans ses grandes lignes, au moment du dépôt de la demande d’ouverture de la procédure de traitement de sortie de crise.

Assia MEDROUNI Avocat à la Cour Barreau de Paris Mastère HEC Entrepreneurs [->a.medrouni@avocaffaires.fr]