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3DS : mise en conformité des règlements de copropriété. Par Charles Bohbot et Benjamin Jami, Avocats.
Parution : vendredi 4 mars 2022
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La loi ELAN a imposé de mettre en conformité les règlements de copropriété avant le 23 novembre 2021 afin de tenir compte de partie commune spéciale ou à jouissance privative ou de lot transitoire mal définis.

Pourquoi l’article 89 de la loi 3DS impose à nouveau de mettre en conformité les règlements de copropriété ?

En raison du retard accumulé par les syndicats de copropriétaires justifié par la période Covid et la multiplication des textes liés aux réformes de la copropriété, lors de l’étude d’impact du projet de loi 3DS il a été relevé qu’un délai supplémentaire serait nécessaire afin de permettre de clarifier les règlements de copropriété.

D’une part, un règlement de copropriété comportant des défauts de conformité est un risque pour l’ensemble des copropriétaires présents et à venir :

Les charges spéciales approuvées en assemblée générale peuvent différer de la réalité contractuelle : des contestations sur la décision d’approbation des charges sont prévisibles. De plus, la recherche de concordance est un objectif de transparence souhaité par le législateur.

D’autre part, le risque peut concerner également certains copropriétaires dont une partie commune à jouissance privative a été concédée en assemblée générale sans que la mention figure clairement conformément aux dispositions nouvelles de l’article 6-3 de la loi du 10 juillet 1965, lequel est d’ordre public.

Le professeur Hugues Périnet-Marquet, lors d’un colloque sur les nouveautés concernant la loi ELAN a indiqué de manière prémonitoire que le corps social a besoin d’un délai souvent supérieur à trois ans pour se mettre au diapason de nouvelles réformes.

En raison du retard accumulé, l’article 209 de la loi ELAN modifié prévoit que « quand le règlement de copropriété ne mentionne pas les parties communes spéciales ou à jouissance privative existantes, le syndicat des copropriétaires inscrit à l’ordre du jour de chaque assemblée générale ».

L’importance de la transparence et de la clarté requise pour les chartes des syndicats de copropriété est réaffirmée.

Quel délai est nécessaire pour mettre en conformité ?

Le projet de loi initial avait prévu un nouveau délai de 3 ans.

Toutefois, afin de rendre effective cette obligation, sans délai, il a été prévu que :

« quand le règlement de copropriété ne mentionne pas les parties communes spéciales ou à jouissance privative existantes, le syndicat des copropriétaires inscrit à l’ordre du jour de chaque assemblée générale des copropriétaires la question de cette mention dans le règlement de copropriété ».

Certains diront qu’aucun délai n’est donc clairement prévu ou au contraire qu’un délai précis est fixé : celui de la prochaine assemblée générale.

Quelle est la sanction applicable ?

La situation est loin d’être claire à la lecture de ce nouveau texte.

En effet, l’article 209 de la loi ELAN dans sa nouvelle rédaction prévoit que le défaut de mise en conformité est sans conséquence sur l’existence des parties communes particulières.

Toutefois, il n’est pas certain que ces parties et charges n’encourent pas d’autres risques.

D’abord, l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que « Toutes clauses contraires aux dispositions des articles 1er, 1-1, 4, 6 à 37, 41-1 à 42-1 et 46 et celles du décret prises pour leur application sont réputées non écrites ».

L’article 8 d’ordre public prévoit que :

« un règlement conventionnel de copropriété, incluant ou non l’état descriptif de division, détermine la destination des parties tant privatives que communes, ainsi que les conditions de leur jouissance ; il fixe également, sous réserve des dispositions de la présente loi, les règles relatives à l’administration des parties communes. Il énumère, s’il y a lieu, les parties communes spéciales et celles à jouissance privative ».

Le risque de sanction est que ces parties soient réputées non écrites par décision d’assemblée générale ou par le juge.

Ensuite, des charges spéciales appliquées ne figurant pas expressément dans le règlement de copropriété risquent d’être contestées sur le fondement de l’article 6-2.

Enfin, des parties communes à jouissance privative conférées à une personne mais non à un lot risque d’être contestées sur le fondement de l’article 6-2 lequel prévoit que « Les parties communes à jouissance privative sont les parties communes affectées à l’usage ou à l’utilité exclusifs d’un lot ».

Texte complet.

Article 89

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique est ainsi modifiée :

1° Le II de l’article 206 est ainsi rédigé :

« II. Les dispositions relatives au lot transitoire de l’article 1er de la loi n° 65-557 du 10 Juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ne sont applicables qu’aux immeubles dont la mise en copropriété est postérieure au 1er juillet 2022.

Pour les immeubles dont la mise en copropriété est antérieure au 1er Juillet 2022, quand le règlement de copropriété ne mentionne pas la consistance des lots transitoires existants, le syndicat des copropriétaires inscrit à l’ordre du jour de chaque assemblée générale des copropriétaires la question de cette mention dans le règlement de copropriété. Cette décision est prise à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présentés, représentés ou ayant voté par correspondance. L’absence de mention de la consistance du lot transitoire dans le règlement de copropriété est sans conséquence sur l’existence de ce lot ».

2° Le II de l’article 209 est ainsi rédigé :

« II. L’article 6-4 de la loi n° 65-557 du 10 Juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis n’est applicable qu’aux immeubles dont la mise en copropriété est postérieure au 1er Juillet 2022.

Pour les immeubles dont la mise en copropriété est antérieure au 1er Juillet 2022, quand le règlement de copropriété ne mentionne pas les parties communes spéciales ou à jouissance privative existantes, le syndicat des copropriétaires inscrit à l’ordre du jour de chaque assemblée générale des copropriétaires la question de cette mention dans le règlement de copropriété. Cette décision est prise à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présentés, représentés ou ayant voté par correspondance. L’absence d’une telle mention dans le règlement de copropriété est sans conséquence sur l’existence de ces parties communes ».

Recommandations.

Afin de clarifier les règlements de copropriété en concordance avec l’état descriptif de division et les charges effectivement appliquées, il convient toujours de procéder à une consultation afin de déterminer les risques encourus et permettre aux copropriétaires de voter en connaissance de cause.

Charles Bohbot et Benjamin Jami, Avocats, Barreau de Paris