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Cautionnement : fin de la distinction entre les exceptions personnelles et celles inhérentes à la dette. Par Annabelle Germain-Alamartine, Avocat.
Parution : mardi 26 avril 2022
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Afin de ne plus traiter plus sévèrement les cautions ayant souscrit leur engagement avant l’entrée en vigueur de la réforme, la Cour de cassation considère désormais que la prescription biennale de l’article L218-2 du Code de la consommation constitue une exception inhérente à la dette dont la caution, qui y a intérêt, peut se prévaloir.

Dans un arrêt rendu le 20 avril dernier, la Première chambre civile de la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en matière de cautionnement, en interprétant les textes applicables à l’espèce à la lumière de la réforme du droit des sûretés.

Dans cette affaire, la Banque a consenti un prêt immobilier garanti par un cautionnement. La Banque assigne la caution en paiement des sommes restant dues au titre de ce prêt, mais voit sa demande rejetée par la Cour d’appel. La Cour estime en effet que la dette étant éteinte en application de l’article L218-2 du Code de la consommation, cette extinction serait opposable à la caution.

La Banque forme alors un pourvoi en cassation, faisant valoir que la prescription biennale prévue à l’article L218-2 du Code de la consommation est une exception purement personnelle au débiteur principal, inhérente à sa qualité de consommateur, de sorte que celle-ci ne peut être opposée au créancier par la caution.

La Cour de cassation, qui rappelle néanmoins les textes applicables à l’espèce, confirme l’arrêt d’appel en ces termes :

« si la prescription biennale de l’article L218-2 du code de la consommation procède de la qualité de consommateur, son acquisition affecte le droit du créancier, de sorte qu’il s’agit d’une exception inhérente à la dette dont la caution, qui y a intérêt, peut se prévaloir ».

Cette interprétation des textes à l’aune de la réforme du droit des sûretés est motivée par la Cour, qui, faisant état de sa jurisprudence classique, précise :

« Une telle solution exposait le débiteur principal au recours personnel de la caution, le privant ainsi du bénéfice de la prescription biennale attachée à sa qualité de consommateur contractant avec un professionnel fournisseur de biens ou de services, outre qu’elle conduirait à traiter plus sévèrement les cautions ayant souscrit leur engagement avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance précitée, laquelle permet en principe à la caution d’opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur ».

Il résulte en effet du nouvel article 2298 du code civil (issu de l’ordonnance du 15 septembre 2021 et entré en vigueur le 1er janvier 2022) la possibilité pour la caution d’opposer toutes les exceptions, qu’elles soient personnelles au débiteur ou inhérentes à la dette.

Ce nouvel article 2298 du Code civil, mesure phare de la réforme du droit des sûretés, a pour objectif de renforcer le caractère accessoire du cautionnement.

La caution ne peut donc être tenue que dans les strictes limites dans lesquelles peut l’être le débiteur principal.

Le législateur a souhaité intégrer ce fil directeur dans l’ensemble des textes adoptés par la réforme, le tiers acquéreur ayant désormais la possibilité d’opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal.

Annabelle Germain-Alamartine Avocat Collaborateur - Axiojuris Avocats Droit bancaire | Garanties & Sûretés | Ventes judiciaires Email: [->avocat.germain-alamartine@axiojuris.com] Linkedin: https://www.linkedin.com/in/aga153/