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Se leurre qui pense pouvoir donner l’heure en toute quiétude. Par Sandrine Pegand, Avocat.
Parution : samedi 7 mai 2022
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La sérialité des vols de montres de luxe et leur traitement judiciaire.

Avec l’arrivée des beaux jours, on troque facilement doudoune contre tee-shirts et chemises tout en laissant apparaître allègrement son garde-temps. Sauf que cette période fait le chou gras des voleurs de montres de luxe, agissant sans vergogne et par ruse.

Voie publique, métro, parkings, halls d’immeuble, tels sont leurs terrains d’actions.

Repérages, attaques surprises, cagoulés et gantés pour ne laisser aucune trace de leur passage, les malfrats causent d’importants préjudices à leurs victimes, peu importe leur genre. Nul n’est épargné, du touriste au résidant.

Alors comment se prémunir de ces agressions physiques ? Comment agir en cas de vol avec violences aggravées ?

En amont, contactez votre assurance habitation et vérifiez que vous avez souscrit à une extension de garantie en cas de vol à l’extérieur de votre domicile. Vous devrez alors produire autant de factures que possible pour attester de sa valeur d’achat mais la garantie se réfèrera à la côte sur le marché de la montre volée avec numéro de série à l’appui.

Sentiment fort désagréable que de devoir payer plus cher son assurance pour être mieux remboursé en cas de vol de notre montre, dans la rue.

Parfois, ce sera une montre transmise de génération en génération, un achat coup de cœur ou l’achat de toute une vie, lissé sur plusieurs mois pour satisfaire le dictat du publicitaire Jacques Ségala « si, à 50 ans, on n’a pas une Rolex, on a quand même raté sa vie ».

En tout état de cause, le dénominateur commun est la passion de cet apparat auquel nous tenons mais dont nous nous débarrasserions sans opposition si le vol par un tiers était envisagé. Inutile d’être traîné à terre sur plusieurs mètres, ni battu pour que notre poignet soit allégé.

Ainsi, frapper une femme sous la poitrine pour lui couper le souffle, la fragiliser davantage, et n’en vouloir qu’à sa montre est juste révélateur d’une haine envers les prétendument riches, une haine envers le système, du point de vue des voleurs.

Alors qui sont-ils ?

Des délinquants juvéniles en situation précaire, isolés, des petites équipes structurées non dans le besoin, avides d’argent facile, relayés par des punch line sorties tout droit de clips de rap « une R. ouais ça t’étouffe », polluent le paysage feutré de Paris et des grandes agglomérations françaises.

Déguster son café tranquillement en terrasse est devenu mission impossible. Œil vif et hypervigilance s’y associent.

Quel est le réflexe à avoir si, en dépit de toutes ces précautions, vous êtes victime de vol à l’arraché ?

Appeler la police.

Dans le meilleur des cas, recueillir les coordonnées des témoins de la scène pour qu’ils soient entendus postérieurement.

Se rendre le plus tôt possible au commissariat de police ou gendarmerie près du lieu de commission des faits pour y déposer plainte et initier la procédure pénale dans le cadre d’une enquête de flagrance. Ainsi, les enquêteurs obtiendront des réquisitions en vue de la lecture et de la retranscription sur procès-verbal des vidéo-surveillances, s’il y en a, dans un laps de temps relativement court.

Comble de l’ironie, le temps joue la montre. Le temps, c’est de l’urgent.

Sollicitez également auprès des enquêteurs des réquisitions pour examen auprès des Unités-Médico-Judiciaires (médical et retentissement psychologique) et prenez rendez-vous auprès dudit service compétent.

Ces démarches paraissent aisées mais c’est sans compter la réalité du terrain.

A l’heure où les médias valorisent les formations accrues des policiers et gendarmes pour recevoir la parole des victimes, issues des réflexions du grenelle des violences conjugales, cela ne semble pas avoir déteint sur les autres sujets.

Manque d’empathie du gardien de la paix chargé de prendre les plaintes ; Plainte refusée au motif que l’infraction ne serait pas caractérisée, au détriment de l’article 15-3 du Code de procédure pénale.

Il est désormais connu que le management des effectifs de police par la mise en place d’objectifs, visant à lutter contre la délinquance, a engendré une manipulation des chiffres (report systématique au mois suivant de l’enregistrement des faits dès lors que l’objectif chiffré est atteint ; dissimulation de certains faits qui n’ont jamais été reportés etc.) pour avoir la critique facile sur l’inertie alléguée des gouvernements précédents.

Ainsi, face à une telle adversité, se faire assister d’un avocat devrait s’inscrire comme un réflexe incontournable : relancer entre autres l’enquêteur, se rapprocher du Procureur de la République, informer le Maire, ses adjoints et le Préfet de police.

La sérialité de ces faits cause un réel préjudice aux victimes, au-delà même du vol matériel.

Des vomissements, des maux de tête, des hématomes, de l’anxiété, des troubles du sommeil, une agoraphobie peut se développer. Aucun symptôme ne doit être ignoré mais au contraire révélé.

Si votre agresseur est interpelé, il sera placé en garde à vue pendant un délai maximum de 48 heures avec une possibilité de déferrement à l’issue et un renvoi devant le tribunal correctionnel pour comparution immédiate, CRPC ou pour l’ouverture d’une information judiciaire avec débat sur les mesures de sûreté.

Jusqu’à l’audience, vous pourrez vous constituer partie civile et demander des dommages et intérêts en caractérisant chaque poste de préjudice documenté par tout moyen.

Il faut obéir à la loi et se défendre.

Sandrine Pegand Avocat associée
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