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Incubateur d’entreprise : attention au risque de parasitisme économique. Par Thomas Ramon, Avocat.
Parution : mercredi 27 juillet 2022
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La jurisprudence a reconnu la qualification de parasitisme économique à l’encontre d’une entreprise s’étant indument appropriée le travail de l’un de ses salariés en alternance.

Les faits.

Monsieur X, employé en qualité de vendeur dans le cadre d’un contrat d’alternance au sein d’une grande chaîne de vente de prêt à porter, a développé, dans le cadre de son mémoire de fin d’études, une ligne de vêtements masculins enfant/adulte baptisée « Mini moi », reposant sur le concept de vêtir de manière similaire et amusante un père et son fils.

Monsieur X a présenté son projet aux membres de l’incubateur du groupe destiné à aider les jeunes entrepreneurs à développer leur projet. La société, qui ne commercialisait pas de gamme de vêtements similaire, s’est montrée très intéressée par le projet et avait alors proposé à Monsieur X de commercialiser sa ligne de produits au sein des magasins du groupe, ainsi qu’en ligne.

Monsieur X a parallèlement déposé sa marque et créé son entreprise de vente de vêtements.

Puis, Monsieur X a eu la désagréable surprise de découvrir que l’entreprise avait décidé de commercialiser des produits similaires à ceux qu’il avait conçus, à son insu, en reprenant à son compte les éléments présentés dans son mémoire de fin d’études.

Monsieur X estimait que l’entreprise lui avait volé son concept.

La décision.

Par une décision du 7 juillet 2022, le Tribunal Judiciaire de Lille a reconnu la faute délictuelle de l’entreprise dans les termes suivants :

« Ainsi, le requérant justifie suffisamment de la valeur économique du travail qu’il a réalisé et proposé à la société […] laquelle a commis des actes de parasitisme en le copiant ».

Le Tribunal a sursis à statuer en ordonnant la communication par la société des éléments comptables permettant l’évaluation du préjudice économique subi par Monsieur X.

La société a également été condamnée à des dommages et intérêts à hauteur de 6.000 euros au titre du préjudice moral subi par Monsieur X.

Cette décision n’est pas sans rappeler l’affaire qui avait opposé la Société Générale à un ancien étudiant qui accusait cette dernière de lui avoir volé son concept innovant « Transcompte ».

A l’issue de la procédure, la Cour de cassation avait déclaré que la valeur économique de l’emprunt des éléments développés par l’étudiant par la banque était établie et confirmé la condamnation de la Société Générale à verser à l’étudiant la somme de 80.000 euros [1].

La décision du Tribunal Judiciaire de Lille corrobore la jurisprudence de la Cour de cassation, ce qui est très encourageant pour tous les étudiants qui développent et investissent dans des projets innovants et voient leur travail être indument approprié.

Tribunal Judiciaire de Lille, 7 juillet 2022, 20/02131.

Thomas Ramon Avocat au barreau d'Aix-en-Provence www.ramon-avocat.fr Magistère de droit des affaires, fiscalité et comptabilité Master 2 Droit et fiscalité des entreprises [->thomasramon@netcourrier.com]

[1Cass. com., 31-03-2015, n° 14-12.391, F-D, Rejet.