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Marques de l’Union européenne et drogues : les explications de l’Office européen pour éviter un refus. Par Laetitia Cardi, CPI.
Parution : lundi 12 septembre 2022
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Lors de la diffusion d’un webinar par l’EUIPO le 10 mai dernier, il a été rappelé ce qui peut être déposé à titre de marque de l’Union européenne lorsque celle-ci fait référence aux drogues (termes et/ou images).

Tout dépend en réalité du type de drogue concerné par la marque en question.

Il faut distinguer les drogues et substances légales comme les médicaments, l’alcool, le tabac, etc…, des drogues illégales comme la cocaïne, l’héroïne, le LSD, l’ecstasy, le cannabis et bien d’autres.

Les premières ne posent pas de problème particulier. L’EUIPO rappelle que les marques pourront être déposées dans les classes pertinentes :
- classe 05 pour les médicaments et autres produits pharmaceutiques
- classes 32 et 33 pour les bières et autres boissons alcooliques
- classe 34 pour les produits du tabac

En revanche lorsqu’il est question de drogues illégales, l’EUIPO distingue plusieurs cas de figure pour rejeter ou non ladite marque, sur la base de l’atteinte à l’ordre public ou aux bonnes mœurs.

Une marque qui sera perçue comme banalisant ou favorisant la consommation de drogues illégales sera refusée sur la base de l’atteinte à l’ordre public ou aux bonnes mœurs. A titre d’exemple la demande de marque de l’Union européenne n° 013590948 a été refusée.

A l’inverse, une marque faisant référence à une drogue dure illégale (héroïne, cocaïne, etc…) pourra échapper au rejet sur la base de ce fondement, dès lors qu’elle aura manifestement pour but de lutter contre la drogue en question.

On peut citer, à titre d’exemple, la marque de l’Union européenne « no cocaïne here » n°018013263 déposée en 2019, et notamment enregistrée pour des objets d’art en classes 6, 16, 20 et 21, et des services d’organisation d’expositions en classe 41, ou encore la marque de l’Union européenne « cocaïne anonymous » n° 000121087 notamment enregistrée pour des services de désintoxication en classe 42.

Parmi les drogues illégales, certaines sont qualifiées de drogues douces ; il s’agit de toutes les drogues regroupées sous le terme de cannabis.

Une marque faisant référence au cannabis, à la marijuana, sera nécessairement refusée à l’enregistrement si elle désigne des produits du tabac (classe 34), des services de vente de ces produits dans le but de les fumer (classe 35), ou des services de divertissement (classe 41).

En revanche, et sous réserve d’être distinctive dans son ensemble, elle pourra potentiellement être acceptée à l’enregistrement pour des produits des classes 03 (produits cosmétiques), 05, 10 (pharmaceutiques, médicaux), 31 (plantes), et des services en classe 35 (vente de ces produits dans un but autre que celui de fumer) ou encore 44 (services médicaux).

Pour qu’une telle marque ne soit pas censurée sur le fondement de l’atteinte à l’ordre public ou aux bonnes mœurs, il faudra notamment que le dépôt soit effectué de bonne foi, mais aussi que le signe déposé n’induise aucun message, aucune interprétation possible promouvant ou incitant à l’usage de drogues illégales.

Enfin dans les classes 29, 30, 32 et 33 (nourriture et boissons) et 43 (fourniture de nourriture et boissons), il faudra distinguer selon le type de drogue en cause. Une marque faisant référence à la marijuana et laissant penser au consommateur que le produit lui permettra de ressentir des effets psychotropes, par exemple, sera en principe refusée à l’enregistrement.

Dans une décision rendue le 12 mai 2021, le Tribunal de l’Union Européenne a validé le rejet de la demande de marque n° 017997323 pour des services relevant des classes 35, 39, 42 et 44 en relation avec la commercialisation de cannabis à usage thérapeutique (entre autres).

Dans ce cas précis, le terme « weed », terme d’argot utilisé pour désigner la marijuana illégale, avait été jugé comme faisant référence à un usage récréatif prohibé dans de nombreux états membres, et non à un usage thérapeutique.

Bien que la question de la légalisation du cannabis à des fins thérapeutiques et récréatives fasse l’objet de débats dans de nombreux Etats membres, sa consommation et son utilisation restent à ce jour illégales dans la plupart d’entre eux.

Il convient donc d’être particulièrement prudent en cas de projet de marque faisant référence à des drogues

Pour visionner le webinar en question nous vous renvoyons au site Internet de l’EUIPO et à la page dédiée.

Source : EUIPO, Juan Antonio Morales Paredes, The good and bad side of drugs : accepted principles of morality under Article 7(1)(f) EUTMR.

Laetitia Cardi, Conseil en Propriété Industrielle - Marques, Dessins et Modèles Novagraaf - Conseils en Propriété Intellectuelle Brevets - Marques - Dessins & Modèles https://www.novagraaf.com/fr