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La restitution des animaux vivants confisqués. Par Gauthier Lecocq, Avocat.
Parution : vendredi 23 septembre 2022
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Dans le cadre d’une procédure pénale, il n’est pas rare que des animaux vivants fassent l’objet d’une confiscation.
Comment solliciter la restitution des animaux vivants confisqués ?

I- Quels sont les autorités compétentes pour prononcer la restitution des animaux confisqués ?

A- Antérieurement à la saisine d’une Juridiction de jugement.

Selon l’article 99-1 du Code de procédure pénale, le Juge d’instruction ou, à défaut de saisine de ce dernier, le procureur de la République près le Tribunal Judiciaire du lieu de l’infraction, peut décider du placement de l’animal dans un lieu de dépôt prévu à cet effet ou de le confier à une fondation ou à une association de protection animale reconnue d’utilité publique ou déclarée.

Lorsque les conditions du placement sont susceptibles de rendre l’animal dangereux ou de mettre sa santé en péril ou de ne plus répondre à la satisfaction des besoins physiologiques propres à son espèce, le Juge d’instruction peut ordonner que l’animal soit cédé à titre onéreux ou confié à un tiers ou bien qu’il sera ultérieurement procédé à son euthanasie.

Attention ! Ces dispositions peuvent s’appliquer aussi bien aux animaux agressifs ayant joué un rôle causal dans une infraction qu’animaux victimes de mauvais traitements saisis ou retirés.

Il ressort de ce texte qu’une décision de cession ou encore d’euthanasie peut être édictée uniquement lorsque les conditions du placement de l’animal dans le lieu de dépôt seront susceptibles de :
- le rendre dangereux ou ;
- mettre sa santé en péril ou ;
- ne plus répondre à la satisfaction des besoins physiologiques propres à son espèce.

Dans le cas particulier où l’animal a fait l’objet d’un placement et qu’il a été décidé de sa cession à titre onéreux en raison des conditions de ce placement, il est expressément prévu que le produit de la vente de l’animal est restitué à la personne qui était propriétaire de l’animal au moment de la saisie si celle-ci en fait la demande en cas de non-lieu ou de relaxe.

Il convient de préciser que le produit de la vente de l’animal est consigné pendant une durée de 5 ans.

Dans le cas particulier où l’animal a été confié à un tiers, son propriétaire peut saisir le Juge d’instruction d’une requête tendant à la restitution de l’animal [1].

Par ailleurs, les frais exposés pour la garde de l’animal dans le lieu de dépôt sont à la charge de son propriétaire, sauf décision contraire du magistrat saisi d’une demande d’exonération qui peut également être accordée en cas de non-lieu ou de relaxe.

Il est encore prévu qu’au cours de la procédure judiciaire, lorsque la conservation de l’animal saisi ou retiré n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité et que l’animal est susceptible de présenter un danger grave et immédiat pour les personnes ou les animaux domestiques, le juge d’instruction, ou à défaut de saisine de ce dernier le procureur de la République, peut ordonner la remise de l’animal à l’autorité administrative afin que celle-ci mette en œuvre les mesures prévues au II de l’article L211-11 du Code rural et de la pêche maritime.

Plus précisément, cet article du Code rural et de la pêche maritime prévoit qu’en cas de danger grave et immédiat pour les personnes ou les animaux domestiques, le maire ou à défaut le préfet peut ordonner par arrêté que l’animal soit placé dans un lieu de dépôt adapté à la garde de celui-ci et, le cas échéant, faire procéder à son euthanasie.

Enfin, l’article 41-4 du Code de procédure pénale prévoit que le procureur de la République ou le procureur général est compétent pour décider, d’office ou sur requête, de la restitution de ces objets (lorsque la propriété n’en est pas sérieusement contestée) dans le cadre d’une enquête pénale sans ouverture d’information judiciaire ou lorsqu’aucune juridiction n’a été saisie ou que la juridiction saisie a épuisé sa compétence sans avoir statué sur la restitution des objets placés sous main de justice.

Dans ces dernières hypothèses, il n’y a pas lieu à restitution lorsque celle-ci est de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens, lorsque le bien saisi est l’instrument ou le produit direct ou indirect de l’infraction ou lorsqu’une disposition particulière prévoit la destruction des objets placés sous main de justice.

Attention ! Si la restitution n’a pas été demandée ou décidée dans un délai de 6 mois à compter de la décision de classement ou de la décision par laquelle la dernière juridiction saisie a épuisé sa compétence, les objets non restitués deviennent propriété de l’État, sous réserve des droits des tiers.

Il en est de même lorsque le propriétaire ou la personne à laquelle la restitution a été accordée ne réclame pas l’objet dans un délai d’un mois à compter d’une mise en demeure adressée à son domicile.

B- Postérieurement à la saisine d’une Juridiction de jugement.

- S’agissant du Tribunal correctionnel :

Conformément aux dispositions des articles 478 et 479 du Code de procédure pénale, le prévenu, la partie civile ou la personne civilement responsable, peut réclamer au Tribunal correctionnel saisi de la poursuite la restitution des objets placés sous la main de la justice.

Le Tribunal correctionnel peut ordonner d’office cette restitution.

Toute personne autre que le prévenu, la partie civile ou la personne civilement responsable qui prétend avoir droit sur des objets placés sous la main de la justice, peut également en réclamer la restitution au Tribunal correctionnel saisi de la poursuite.

Dans cette dernière hypothèse, seuls les procès-verbaux relatifs à la saisie des objets peuvent lui être communiqués.

- S’agissant du Tribunal de police :

L’article 543 du Code de procédure pénale prévoit que les articles 475-1 à 486 concernant les frais de justice et dépens, la restitution des objets placés sous la main de la justice et la forme des jugements sont applicables à la procédure devant le Tribunal de police.

- S’agissant de la Cour d’assises :

Selon l’article 373 du Code de procédure pénale, la Cour d’assises peut ordonner, d’office ou sur demande d’une partie ou de toute personne intéressée, la restitution des objets placés sous la main de la justice.

Toutefois, s’il y a eu condamnation, cette restitution n’est effectuée que si son bénéficiaire justifie que le condamné a laissé passer les délais sans se pourvoir en cassation, ou s’il s’est pourvu, que l’affaire est définitivement jugée.

La Cour d’assises peut toutefois refuser la restitution lorsque celle-ci présente un danger pour les personnes ou les biens ou lorsque le bien saisi est l’instrument ou le produit direct ou indirect de l’infraction.

En cas de demande de restitution émanant d’une personne autre que les parties, seuls les procès-verbaux relatifs à la saisie des biens peuvent lui être communiqués.

II- Que faire en cas de refus de restitution de restitution d’un animal confisqué ?

La décision de non-restitution prise pour l’un de ces motifs précédemment évoqués (lorsque celle-ci est de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens, lorsque le bien saisi est l’instrument ou le produit direct ou indirect de l’infraction ou lorsqu’une disposition particulière prévoit la destruction des objets placés sous main de justice) ou pour tout autre motif, même d’office, par le procureur de la République ou le procureur général peut être déférée par l’intéressé au président de la Chambre de l’instruction ou à la Chambre de l’instruction, dans le délai d’un mois suivant sa notification, par déclaration au greffe du Tribunal ou de la Cour ou par LRAR.

Le recours est suspensif.

Les jugements des Tribunaux de police et des Tribunaux correctionnels refusant la restitution de l’animal confisqué doivent être portés devant la Cour d’appel.

Les décisions tendant à la cession à titre onéreux ou à ce qu’il soit confié à un tiers ou au prononcé de son euthanasie peuvent également être déférée au premier président de la Cour d’appel.

En effet, la Chambre des appels correctionnels de la Cour d’appel est incompétente pour connaître de ces recours [2].

Toutefois, la Chambre de l’instruction est compétente pour connaître du recours exercé à l’encontre d’une ordonnance du Juge d’instruction.

Dans cette hypothèse, le recours est ouvert au seul propriétaire de l’animal objet de l’ordonnance.

Gauthier Lecocq Avocat au barreau de Versailles Cabinet Bariseel-Lecocq & Associés Aarpi Inter-Barreaux

[1CA de Pau, 24 janvier 2008 - CA de Douai, 23 octobre 2008.

[2CA d’Aix-en-Provence, 19 septembre 2007 : JurisData n° 2007-351440.

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