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Copropriété et « Loi Climat et Résilience » : les obligations applicables à compter du 1er janvier 2023. Par David Nabeth, Avocat.
Parution : jeudi 29 septembre 2022
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Il résulte de la loi « Climat et résilience » qu’à compter du 1er janvier 2023, de nouvelles obligations vont peser sur les syndics et les propriétaires. Petit point sur les contraintes à venir et la nécessité de les anticiper.

Le secteur du bâtiment est le plus gros consommateur d’énergie en France, toutes activités confondues.

Selon l’Agence de l’environnement et de l’énergie (l’ADEME), la consommation énergétique des bâtiments représente 44% de l’énergie finale totale utilisée en France.

A l’occasion des travaux parlementaires, la loi dite « Climat et résilience » (loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique), il a été constaté que près de 5 millions de logements pouvaient être qualifiés de « passoires énergétiques », parmi lesquelles 1,5 million relèvent du parc locatif.

Il était urgent d’agir, et c’est ce que la loi « Climat et résilience » tente de faire, en consacrant un titre V à la rénovation énergétique des bâtiments.

Si des contraintes pèsent désormais sur les propriétaires de logements pouvant être qualifiés de « passoires énergétiques » (I), le syndic de copropriété se trouve au cœur de la mise en œuvre des objectifs du législateur en matière de rénovation énergétique du parc immobilier (II).

I. Les obligations pesant sur les propriétaires.

A titre liminaire, il convient de rappeler que les bâtiments à usage d’habitation sont classés en fonction de leur niveau de performance énergétique et de performance en matière d’émissions de gaz à effet de serre [1].

L’autorisation de louer.

Depuis la loi n°2014-366 du 24 mars 2014 dite « loi ALUR », dans certaines zones, la mise sur le marché locatif d’un logement peut être encadrée et précédée d’une autorisation en raison d’une proportion importante d’habitations dégradées dans la zone concernée [2].

La délivrance de l’autorisation est désormais conditionnée à un critère de décence [3].

Or, à compter du 1er janvier 2023, la performance énergétique sera intégrée aux critères de qualification de la décence d’un logement, permettant ainsi d’obtenir, ou non, l’autorisation de mise en location [4].

Le contenu de l’annonce de mise en location.

Depuis le 1er janvier 2022, toute mise en location d’un bien à usage d’habitation classé F ou G doit mentionner l’obligation de faire en sorte que le bien atteigne au minimum la classe E avant le 1er janvier 2028 [5].

A compter du 1er janvier 2023, l’information liée à l’état des risques devra figurer dans toute annonce relative à la mise en location d’un bien, et être fournie au potentiel locataire lors de la première visite [6].

L’encadrement du loyer.

Depuis le 24 août 2022, les propriétaire ont l’interdiction d’augmenter le loyer de leurs logements classés F et G.

Ainsi, le loyer de leur nouveau locataire ne pourra pas excéder le dernier loyer appliqué au précédent occupant.

II. Les obligations pesant sur le syndic de copropriété.

Les contraintes mises à la charge des syndics de copropriété visent à accélérer la rénovation du parc immobilier.

L’extension de l’obligation d’établir un DPE.

Les copropriétés d’habitation avaient déjà l’obligation d’établir des diagnostics de performance énergétique (« DPE ») ou des audits énergétiques avant 2017, mais cette obligation était limitée aux copropriétés disposant d’un équipement de chauffage ou de refroidissement collectif.

La nouvelle rédaction de l’article L126-31 du CCH soumet l’ensemble des bâtiments d’habitation collective dont le permis de construire a été déposé avant le 1er janvier 2013 à l’obligation d’établir un DPE.

Ces DPE collectifs devront avoir été élaborés entre 2024 et 2026 en fonction du nombre de lots.

L’élaboration d’un plan pluriannuel de travaux.

Découlant directement de l’obligation d’établir un DPE, la loi « Climat et résilience » a modifié l’article 24-4 de la loi du 10 juillet 1965 afin d’imposer au syndic l’inscription à l’ordre du jour de l’assemblée générale suivant l’établissement dudit diagnostic la question de l’élaboration d’un plan pluriannuel de travaux.

Le plan pluriannuel de travaux devient obligatoire pour toutes les copropriétés à destination partielle ou totale d’habitation, dans un délai de 15 ans à compter de la réception des travaux de construction de l’immeuble [7].

Cette obligation précédemment limitée aux immeubles équipés d’une installation collective de chauffage ou de refroidissement sera progressivement généralisée à compter de janvier 2023.

Il faut noter que c’est l’élaboration du projet qui devient obligatoire et non son approbation par l’assemblée générale des copropriétaires [8].

Le projet de plan pluriannuel de travaux comprend les éléments suivants :
- La liste des travaux nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble, à la préservation de la santé et de la sécurité des occupants, à la réalisation d’économies d’énergie et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre ;
- Une estimation du niveau de performance au sens de l’article L173-1-1 du CCH ;
- Une estimation sommaire du coût de ces travaux et leur hiérarchisation ;
- Une proposition d’échéancier pour les travaux dont la réalisation apparaît nécessaire dans les dix prochaines années [9].

Au-delà de ces questions devant être inscrites à l’ordre du jour des assemblées générales de copropriétaires, le syndic devra également veiller à intégrer les travaux résultant du plan pluriannuel de travaux, accompagnés de leur échéancier, dans le carnet d’entretien de l’immeuble [10].

Ces mesures entrent en vigueur le 1er janvier 2023 pour les copropriétés de plus de 200 lots.

Elles seront progressivement étendues aux copropriétés plus petites.

L’élargissement de l’obligation de constituer un fonds de travaux.

Si la constitution d’un fonds de travaux n’est pas nouvelle [11], son champ d’application a été étendu :
- Aux immeubles dont la date de réception des travaux remonte à 10 ans ;
- A tous les immeubles soumis aux statuts de la copropriété, peu important le nombre de lots.

Enfin, les options d’affectation des sommes collectées ont été élargies.

Le fonds de travaux est régi par l’article 14-2-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Ces dispositions entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2023 pour les copropriétés de plus de 200 lots.

Le 1er janvier 2023 est donc une date majeure pour la mise en œuvre des dispositifs prévus au titre V de la loi « Climat et résilience ».

De nouvelles obligations vont peser sur les syndics et les propriétaires, qui devront les avoir anticipées, sous peine de voir leur responsabilité être engagée.

David Nabeth Avocat au Barreau de Paris Associé chez Dom & Associés https://domassocies.com/

[1La notation va de la classe A pour les logements les plus performants à la classe G pour les moins performants.

[2C. Coutant-Lapalus, Quelles sont les répercussions de la loi « Climat et Résilience » pour le bailleur d’un bien à usage d’habitation ?, Actes Pratiques et Ingénierie Immobilière n°1, Janvier 2022, 1.

[3Art. L635-3 du Code de la construction et de l’habitation (ci-après « CCH »).

[4Art. 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986.

[5Art. L173-2 du CCH.

[6Art. L125-5 du Code de l’environnement.

[7Art. 14-2 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeuble bâtis.

[8C. Ivars, Les nouvelles obligations du syndic de copropriété en matière sanitaire et environnementale, Actes Pratiques et Ingénierie Immobilière n°4, Octobre 2021, 4.

[9Article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965 précitée.

[10Ibidem.

[11La loi n°2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », avait mis en place un fonds de travaux obligatoire au sein des copropriétés à destination partielle ou totale d’habitation à l’issue d’une période de 5 ans suivant la date de réception des travaux.

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