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Que faire en cas d’opposition à l’enregistrement de ma marque ? Par François Godfrin, Avocat.
Parution : mardi 8 novembre 2022
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Vous souhaitez enregistrer votre marque et vous avez procédé au dépôt de celle-ci sur le site de l’INPI ou de l’EUIPO.
Suite à ce dépôt, le titulaire d’un droit antérieur (marque, dénomination sociale, etc.) a initié une procédure d’opposition ou vous a envoyé un courrier de mise en demeure vous demandant de retirer votre demande de marque, soit dans son intégralité, soit de manière partielle.
Dans une telle situation, comment réagir ?

Lorsqu’on dépose une demande de marque, les titulaires de droits antérieurs (marque, dénomination sociale, enseigne, nom commercial, nom ou pseudo, AOP, IGP, droit d’auteur, dessin ou modèle, etc.) peuvent s’opposer à l’enregistrement de celle-ci.

Cette procédure d’opposition est souvent soit précédée, soit accompagnée, d’un courrier de mise en demeure enjoignant le déposant à retirer sa demande de marque, soit dans son intégralité, soit de manière partielle pour certaines classes de produits et services.

Analyser le courrier de mise en demeure et le bien-fondé de l’opposition.

Dans une telle situation, pas de panique ! Contrairement à la probable formulation du courrier de mise en demeure, il ne faut pas agir dans l’urgence, mais bien prendre le temps d’analyser le bien-fondé de ce courrier avant d’y répondre.

Hélas, il n’est pas rare qu’un déposant prenne peur en lisant le courrier de mise en demeure et accepte sans réserve de retirer sa marque, alors même que la procédure d’opposition ne présente pas de forte chance de succès, ou que des arguments peuvent être opposés en défense, afin d’aboutir par exemple, à un accord de coexistence entre les différentes marques.

C’est pourquoi, il est fortement recommandé de solliciter l’accompagnement d’un professionnel du secteur, qui a l’habitude de ce type de procédure et qui saura vous éclairer sur le risque de succès de la procédure d’opposition, et pourra vous orienter vers la stratégie la plus adaptée à votre situation.

En effet, il n’est pas exclu que la procédure d’opposition ne soit pas fondée, du fait de l’absence de risque de confusion résultant de l’analyse globale des différentes marques :
- Soit parce que les signes sont suffisamment différents visuellement, phonétiquement ou encore conceptuellement,
- Soit en raison d’une absence de similarité entre les produits et services visés respectivement par les marques.

Par ailleurs, quand bien même la procédure d’opposition aurait quelque chance de prospérer, il est essentiel de connaitre les arguments que l’on pourrait opposer en défense, à savoir par exemple et sans être exhaustif :
- Intenter une action en nullité de la marque de l’opposant pour défaut de distinctivité, ce qui revient à démontrer que la marque est descriptive des produits et services en question,
- Opposer en défense le caractère générique de la marque en démontrant que le terme/signe utilisé correspond à la désignation habituelle du produit ou service, ce qui rend impossible son appropriation monopolistique par un seul acteur du marché.

Enfin, il est également possible de soulever ces arguments dans le cadre d’un processus de négociation avec l’opposant, qui permettra d’éviter les désagréments inhérents à ce type de procédure, en vue d’aboutir à une coexistence paisible des 2 marques !

Privilégier la négociation entre l’opposant et le déposant.

En effet, que ce soit devant l’INPI [1], ou devant l’EUIPO [2], la procédure d’opposition prévoit un temps de négociation entre les parties.

Bien souvent, une simple discussion permet de rassurer l’opposant sur l’impossible confusion dans l’esprit du public entre sa marque et la nouvelle marque, en raison par exemple de domaines d’activité différents quand bien même les classes de produits et services seraient identiques ou similaires, ou encore en proposant certaines garanties.

Ainsi, il est souvent possible d’éviter la procédure d’opposition :
- En limitant sa demande de marque, soit par le retrait de certains produits et services, soit par l’ajout d’une mention au sein du libellé,
- En signant un accord de coexistence ou une lettre d’engagement, précisant les modalités convenues entre l’opposant et le déposant, afin d’éviter tout risque de confusion entre les marques en question.

Une telle stratégie a le mérite d’éviter la lourdeur et le coût d’une procédure d’opposition pour chacune des parties (taxe d’opposition pour l’opposant, frais de conseils pour chacune des parties, incluant notamment la rédaction des mémoires, et l’analyse approfondie des arguments adverses et de la jurisprudence).

Enfin, rappelons qu’une procédure d’opposition implique nécessairement un aléa.

En effet, la décision est soumise à l’appréciation d’un examinateur de l’office saisi, qui se fonde « froidement » sur une analyse objective résultant de la comparaison presque mathématique des signes, ainsi que des produits et services, faisant abstraction de tout argument subjectif, tel que par exemple les activités respectivement exercées par les parties.

Ainsi, en matière d’opposition, et à l’instar de nombreux litiges, adaptons sans hésiter le célèbre adage d’Honoré de Balzac, et privilégions un bon accord, qu’un mauvais procès !

François Godfrin Avocat au Barreau de Paris Email:[->fg@avocat-godfrin.com] [->https://www.avocat-godfrin.com/]

[1Institut national de la propriété industrielle Office Français de la propriété intellectuelle.

[2Office de l’Union Européenne pour la propriété intellectuelle.