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La primauté de la liberté d’expression sur le droit à l’image du Président de la république
Parution : mercredi 5 novembre 2008
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Le Tribunal de grande instance de Paris a jugé en référé que la diffusion d’une poupée vaudou ne caractérise pas une atteinte fautive au droit à l’image du Président de la république, ni un trouble manifestement illicite au sens de l’article 809 du Code de procédure civile.

Certes, le jugement n’a été donné qu’en référé mais il témoigne de l’importance et de la préservation de la liberté d’expression. En effet, selon le tribunal, la représentation de l’image d’une personne sous forme de poupée vaudou pouvant être piquée s’inscrit dans les limites de la liberté d’expression et du droit à l’humour et surtout, ne constitue pas une atteinte à la dignité humaine.

Dans le domaine classique du droit à l’image, il est acquis que « la balance des intérêts » opérée par les juges consiste à opposer d’un coté, le droit au respect de la vie privée dans lequel s’inscrit encore le droit à l’image à défaut de texte autonome, et de l’autre, la liberté d’expression et d’information qui comprend la liberté de création. Opposant implicitement deux textes de la convention européenne des droits de l’homme, à savoir l’article 8 de la convention relatif à au droit au respect de la vie privée ainsi que l’article 10 de cette même convention relatif à la liberté d’expression, le tribunal fait primer ce dernier en estimant non constituée l’atteinte au droit à l’image.

D’ailleurs, les juges n’hésitent pas à balayer le bastion de la dignité humaine qui aurait constitué l’exemption à cette balance, la dignité humaine étant considérée comme supérieure aux deux articles susvisés.

Mais loin d’une affaire semblable à celle du préfet Erignac, la balance opérée à permis de donner raison à l’éditeur de l’ouvrage qui était indissociable de la poupée vaudou. C’est donc donner libre cours à la liberté d’expression, et plus précisément à la liberté de création, puisque l’ensemble a été qualifié par les juges comme « oeuvre de l’esprit » renfermant deux supports indissociables.

Contrairement à d’autres décisions de la Cour de cassation (Civ. 1re, 7 février 2006), cette fois-ci, c’est bien la liberté de création qui a su s’imposer face au droit au respect de la vie privée.

La rédaction du village