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Rester dans le logement après le décès du conjoint, partenaire ou concubin. Par Louis Laï-Kane-Chéong, Avocat.
Parution : mercredi 8 mars 2023
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Afin de garantir au moins, au profit du conjoint survivant, la possibilité de vivre dans son logement, le législateur a imaginé le mécanisme du droit viager au logement.
Dans quelles conditions s’applique-t-il ? Et existe-t-il un mécanisme similaire au profit du partenaire de PACS ou du concubin ?

I. Régime du droit viager au logement du conjoint survivant.

A) Objet.

Le droit viager au logement s’exerce sur l’habitation principale et effective du conjoint survivant et qui constituait également l’habitation du défunt.

Le droit viager au logement ne peut s’exercer que :
- Si l’habitation était un bien commun aux époux ;
- Ou si l’habitation était un bien indivis entre les deux époux ;
- Ou si l’habitation était un bien propre ou personnel du conjoint survivant ;
- Ou si l’habitation était un bien propre ou personnel du défunt.

Néanmoins, le droit viager au logement ne peut s’exercer si l’habitation était un bien en indivision entre le défunt et des tiers, auquel cas, le conjoint survivant ne pourra prétendre qu’à une créance, dénommée, droit annuel au logement, et permettant de se faire payer par la succession, l’indemnité d’occupation due aux indivisaires.

Ce même droit annuel au logement existe en cas d’habitation principale assurée par un bail, étant précisé que les loyers seront payés par la succession.

B) Bénéficiaires.

Le droit viager au logement profite exclusivement au conjoint survivant.

En tant que successible, le droit viager au logement intègre la vocation légale du conjoint survivant, à propos de laquelle, nous avons déjà consacré quelques lignes.

Pour le dire autrement, le conjoint survivant ne peut cumuler, et droit viager au logement, et quart légal ou usufruit du tout.

Dans le cas où le conjoint survivant recueille le quart légal en pleine propriété, s’il bénéficie par ailleurs du droit viager au logement, il ne prendra au titre de son quart légal, que l’excédent, après déduction du droit viager au logement.

Si après déduction du droit viager au logement sur le quart légal en pleine propriété, le résultat est négatif ou se réduit à zéro, alors le conjoint survivant ne peut prétendre qu’au bénéfice du droit viager au logement, ou peut y renoncer afin de prendre le quart légal.

C) Valeur.

En tant que droit à prendre dans la succession, le droit viager au logement est valorisé.

Sans que cela soit impératif, le droit viager au logement étant un diminutif de l’usufruit, il est d’usage de partir du barème de l’usufruit légal qui est fonction de l’âge de l’usufruitier, et de considérer que le droit viager au logement en constitue 60% (Barème légal de l’usufruit).

D) Délai.

Le conjoint survivant dispose d’un an à compter du décès pour manifester sa volonté de bénéficier du droit viager au logement.

E) Cessation ou privation.

En principe, le droit viager au logement, comme son nom l’indique, continue jusqu’au décès de son titulaire.

En revanche, si le logement n’est plus adapté aux besoins du conjoint survivant, ce dernier peut le donner en location afin d’en tirer un revenu et l’employer à la recherche d’un logement correspondant à ses nouveaux besoins.

Il est à noter que le conjoint survivant peut être privé de son droit viager au logement par testament authentique (testament recueilli par deux notaires) pris par le défunt, et non par simple testament olographe (testament entièrement écrit, daté et signé de la main de son auteur).

II. Et pour les partenaires de PACS et les concubin ?

A) Pour les partenaires de PACS

Les partenaires de PACS bénéficient d’une protection plus ou moins équivalente.

Si les partenaires étaient co-titulaires du bail assurant leur habitation, alors ce bail se poursuit sans aucune formalité au bénéfice du survivant.

De la même manière, même si le bail était conclu au nom d’un seul des partenaires de PACS, celui-ci se poursuit sans formalité au bénéfice du survivant.

En outre, le partenaire survivant peut demander à la succession de régler l’équivalent de 12 mois de loyers, à compter du décès.

Si les partenaires étaient propriétaires de leur habitation, soit en indivision, soit l’un des deux était uniquement propriétaire, le survivant bénéficie toujours d’un droit d’occupation gratuit dans la limite d’un an à compter du décès.

La différence réside dans le fait que, en situation d’indivision, le partenaire survivant pourra, au terme du délai d’un an, provoquer le partage du bien et solliciter son attribution préférentielle, ou le faire vendre.

Dans le cas où seul le défunt était propriétaire du logement, le partenaire survivant ne bénéficie d’aucun moyen pour rester dans le bien au-delà de l’année durant laquelle le droit d’occupation gratuit s’exerce.

B) Pour les concubins.

Les concubins, contrairement à certaines idées reçues, ne bénéficient pas d’un même niveau de protection.

Si les concubins étaient co-titulaires d’un bail assurant leur logement, le bail se poursuit sans formalité au profit du concubin survivant.

Si le bail était conclu uniquement au nom du concubin défunt dans le secteur privé, le bail ne pourra se poursuivre au profit du concubin survivant que sous certaines conditions :
- Le concubin survivant doit avoir vécu avec le défunt depuis au moins 1 an à la date du décès ;
- La relation de concubinage doit avoir été notoire.

S’il s’agit d’un bail conclu au nom d’un seul concubin portant sur un logement social, celui-ci peut se poursuivre au bénéfice du concubin survivant, sans condition de ressources, à condition que la relation de concubinage ait été notoire.

Si les deux concubins étaient propriétaires en indivision du logement, en principe, le concubin survivant ne peut rester dans les lieux, même si en pratique, cette situation peut s’observer ; auquel cas, le concubin sera redevable d’une indemnité d’occupation aux indivisaires.

Dans cette situation, si l’unique propriétaire était le concubin défunt, le concubin survivant n’a alors aucun droit de rester dans les lieux, au risque d’être considéré comme un occupant sans droit ni titre, et de devoir verser, et une indemnité d’occupation aux héritiers du concubin défunt, et éventuellement, des dommages et intérêts.

Louis Laï-Kane-Chéong, Avocat. Barreau de Saint-Denis de La Réunion LKC Avocat www.lkcavocat.fr
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