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Quel avocat choisir pour une victime d’accident de la route ? Par Cécile Bigre, Avocat.
Parution : mercredi 29 mars 2023
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Vous pensez probablement que si vous veniez à être victime d’un accident de la route, notamment grave avec décès, l’avocat pénaliste serait le plus à même de défendre vos intérêts et de faire reconnaître vos droits.
Et bien non !

En effet, les accidents de la route sont régis avant tout par la loi du 5 juillet 1985, qui est une loi reprise dans le Code civil et non dans le Code pénal.

Ainsi, plus de la moitié des accidents de la route sont régis par la loi du 5 juillet 1985 sans volet pénal.

Le droit pénal peut venir s’y ajouter, lorsqu’un conducteur a commis une faute pénalement répréhensible mais la loi du 5 juillet 1985 subsistera toujours sur les intérêts civils.

L’application parcellaire du droit pénal en matière d’accident de la circulation.

Pour que le droit pénal intervienne, une faute pénale est nécessaire.

En matière d’accident de la circulation, cette faute sera constituée notamment par une conduite avec consommation d’alcool, de drogue, un manquement à une obligation du prudence et de sécurité…

Ce dernier est très fréquent en matière d’accident de la route.

Un manquement à une obligation de prudence et de sécurité est par exemple :
- Rouler à vive allure sur autoroute par temps très pluvieux et venteux ;
- Rouler en ayant consommer le matin des médicaments de niveau 2 ;
- Envoyer des messages écrits type WhatsApp en conduisant sur autoroute ;
- Rouler avec un pare-brise givré et percuter le cycliste.

Les infractions relatives aux dommages corporels résultant d’accident de la circulation sont limités et l’expertise d’un avocat pénaliste connu pour sa défense des prévenus n’est ni nécessaire, ni légitime.

La connaissance des règles de droit pénal et de procédure pénale est nécessaire mais pas suffisante en la matière.

La nécessaire connaissance par un avocat spécialisé de la loi du 5 juillet 1985 en matière d’accident de la route.

La Loi du 5 juillet 1985 portée par Monsieur Badinter a instauré pour la victime d’un accident de la circulation, un régime indemnitaire et un droit à indemnisation.

Ainsi, l’objectif n’est pas de démontrer une faute du conducteur adverse et le point de départ est l’implication des véhicules.

Qu’est ce que l’implication de véhicule dans un accident de la circulation ?

Article 1er de la loi du 5 juillet 1985 :

« Les dispositions du présent chapitre s’appliquent, même lorsqu’elles sont transportées en vertu d’un contrat, aux victimes d’un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l’exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres ».

Non définie exactement par la loi, le législateur a souhaité la notion d’implication dans un but indemnitaire et non causal. Ainsi, l’implication nécessite une participation du véhicule. La cause de l’accident n’est ici pas recherchée, seule la participation active ou non du véhicule est importante.

A ce titre, la jurisprudence a retenu la notion d’implication :

- D’un véhicule garé et à l’arrêt à l’occasion d’une collision successive et un enchaînement continu : « le scooter de M. [K] avait achevé sa course contre le véhicule de M. [R] et qu’il résultait de ses constatations que les collisions successives étaient intervenues dans un même laps de temps et dans un enchaînement continu, de sorte qu’elles constituaient un accident complexe, dans lequel ce véhicule était impliqué, la cour d’appel a violé le texte susvisé » [1].

- D’un véhicule garé : « l’implication résulte nécessairement d’un contact entre la victime et le véhicule impliqué. Il est également admis que l’absence de contact n’exclut pas par principe l’ implication du véhicule dès lors qu’il a joué un rôle, quel qu’il soit, dans la survenance de l’accident, y compris s’il est régulièrement stationné et ne perturbe pas le flux de circulation » [2].

Le principe du droit à indemnisation intégral de la victime.

Consacrée à la section 1 de la loi du 5 juillet 1985, la victime d’un accident de la route ne peut se voir opposer la faute d’un tiers, la force majeure.

Article 3 :

« Les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l’exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident.
Les victimes désignées à l’alinéa précédent, lorsqu’elles sont âgées de moins de seize ans ou de plus de soixante-dix ans, ou lorsque, quel que soit leur âge, elles sont titulaires, au moment de l’accident, d’un titre leur reconnaissant un taux d’incapacité permanente ou d’invalidité au moins égal à 80 p. 100, sont, dans tous les cas, indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis.
Toutefois, dans les cas visés aux deux alinéas précédents, la victime n’est pas indemnisée par l’auteur de l’accident des dommages résultant des atteintes à sa personne lorsqu’elle a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi
 ».

La victime peut donc voir réduire son droit à indemnisation, uniquement si elle a elle-même commis une faute inexcusable en relation causale exclusive avec l’accident.

L’exception, la réduction ou l’exclusion du droit à indemnisation en raison de la faute inexcusable en lien causal avec l’accident.

A titre d’exemple, la jurisprudence retient comme faute inexcusable :

« La faute volontaire d’une exceptionnelle gravité exposant sans raison valable son auteur un danger dont il aurait dû avoir conscience ; qu’ainsi les éléments constitutifs d’une telle faute sont au nombre de quatre, savoir son caractère volontaire, son exceptionnelle gravité, l’absence de raison valable de son existence et la conscience du danger qu’aurait dû en avoir son auteur ».

En conséquence, les tribunaux examinent :
- Le caractère volontaire de la faute ;
- Son exceptionnelle gravité ;
- L’absence de raison valable de son existence ;
- La conscience du danger.

Rarement a été consacré la faute inexcusable du piéton victime tant la démonstration de ces quatre éléments constitutifs sont difficiles à établir.

Ainsi, la faute inexcusable du piéton a été rejetée pour :

- Un piéton traversant une chaussée composée de six voies de circulation de gauche à droite après être monté sur le muret séparateur de voie [3] ;
- Un piéton très alcoolisé, allongé volontairement au milieu de la voie de circulation [4].

Il en va différemment de la victime conductrice. En effet, les tribunaux apprécient souverainement cette faute.

Elle a d’ailleurs été retenue pour un conducteur victime ayant dépassé par la gauche un véhicule qui s’apprêtait à virer à gauche et qui avait actionné les signaux préalablement [5].

Toutefois, la connaissance de la loi du 5 juillet 1985 est toujours insuffisante pour assurer la parfaite défense d’une victime de dommage corporel résultant d’un accident de la circulation.

Pourquoi un avocat spécialisé en droit du dommage corporel est le plus compétent à défendre une victime d’accident de la circulation ?

L’indemnisation du préjudice corporel nécessite une expertise spécifique et une connaissance accrue tant des régimes indemnitaires et du droit de la responsabilité, que des process indemnitaires.

Être assisté d’un avocat spécialisé en droit du dommage corporel pour assurer la défense d’une victime d’un accident de la circulation, c’est mettre toutes les chances de son côté pour être entendu et obtenir une juste indemnisation.

Cécile Bigre, Avocat spécialisé en droit du dommage corporel, Barreau de Paris. www.bigre.fr

[1Cass.2ème civ. 15 décembre 2022 n° 21-11.423.

[2Cour d’appel d’Aix-en-Provence - Chambre 1-6, 2 mars 2023 / n° 20/12672.

[3Cour d’appel de Paris - Pôle 4 - Chambre 11 23 février 2023 / n° 21/13491.

[4Cour d’appel de Rennes - ch. 05 15 décembre 2021 / n° 18/05090.

[5Cour d’appel d’Angers 16 novembre 2021, n°18/01890.