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Rupture conventionnelle : tout ce que vous devez savoir avant de vous lancer. Par Karina Elharrar, Avocat.
Parution : lundi 15 mai 2023
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Que ce soit pour des raisons personnelles ou pour explorer une nouvelle voie professionnelle, la rupture conventionnelle peut vous permettre de rebondir plus sereinement vers la suite. Mais, avant de vous lancer et d’en parler à votre employeur, quelques informations essentielles sont à avoir en tête.

La rupture conventionnelle c’est quoi ?

Il s’agit d’une procédure permettant à l’employeur et au salarié de se mettre d’accord pour rompre le contrat de travail les unissant. Elle concerne les salariés en Contrat de travail à durée indéterminée (CDI) et se différencie de la démission (fin du contrat de travail à l’initiative du salarié) et du licenciement (fin du contrat de travail à l’initiative de l’employeur).

Pourquoi se lancer dans une procédure de rupture conventionnelle ?

Elle vous permet de quitter rapidement votre entreprise, en évitant de laisser une situation difficile ou conflictuelle, s’installer ou perdurer avec votre employeur. La rupture conventionnelle vous permet, à la différence de la démission, d’ouvrir des droits au chômage et de toucher des allocations. Elle peut vous donner l’opportunité et le temps pour réfléchir à la suite de votre vie professionnelle, envisager une reconversion ou lancer un projet entrepreneurial.

Comment entamer les démarches et lancer la procédure ?

La demande de rupture conventionnelle peut venir du salarié comme de l’employeur, sans motif et sans formalisme. Il s’agit d’un accord à l’amiable, vous ne pouvez donc pas l’imposer à votre employeur. Une fois que vous êtes sûr de votre décision, vous pouvez évoquer votre demande à votre N+1 ou au service RH de votre entreprise, à l’écrit ou à l’oral. Il n’y a pas de règles sur ce point, tout dépend des relations que vous entretenez avec l’employeur, si la situation est compliquée, mieux vaut privilégier l’oral.

Dans tous les cas, avant de vous lancer, prenez le temps de préparer un argumentaire solide pour expliquer à votre employeur pourquoi vous souhaitez quitter l’entreprise et en quoi la rupture conventionnelle est la solution la plus adaptée à votre situation.
Pensez également à la date à laquelle vous pourriez lui proposer de quitter votre poste, en prévoyant un délai raisonnable qui lui laisse le temps de vous remplacer.

Mon conseil.

Renseignez-vous en amont (et en faisant preuve de discrétion) sur les pratiques de votre entreprise vis-à-vis des ruptures conventionnelles. N’oubliez pas que votre employeur n’a aucune obligation d’accepter votre demande et que vous n’avez aucun intérêt à le braquer en arrivant avec de nombreuses exigences et en lui faisant des reproches. Prenez le temps de bien préparer votre demande et adoptez un état d’esprit pacifique. L’objectif de la rupture conventionnelle est avant tout de quitter votre entreprise de manière apaisée et dans les meilleures conditions possibles.

Toucherez-vous une indemnité à votre départ ?

Si votre employeur accepte votre demande de rupture conventionnelle, vous toucherez à la fin de votre contrat, une indemnité légale correspondant à un montant minimal que l’employeur devra obligatoirement vous verser. Celle-ci est automatique : son calcul est encadré par la loi ou par votre convention collective, et votre employeur ne pourra pas vous verser moins que le montant minimal légal ou conventionnel.

Comment connaître le montant de l’indemnité légale ?

Elle sera calculée, en prenant en compte votre ancienneté dans l’entreprise, et à partir de votre rémunération.

Par exemple, pour un salaire de référence de 1 500 €, l’indemnité minimale avec une ancienneté de 3 ans et 6 mois est de :

[(1 500 x 1/4) x 3] + [(1 500 x 1/4) x (6/12)] = 1 312,50 €

Et l’indemnité supra-légale dans tout ça ?

Il est également possible de négocier une indemnité supra-légale, c’est-à-dire un montant qui vous sera versé à votre départ, en plus de celui correspondant à l’indemnité légale. Cette indemnité supra-légale devra faire l’objet d’une négociation entre votre employeur et vous et son montant sera calculé au cas par cas.

Il est primordial de comprendre que votre employeur cherchera la solution qui lui coutera le moins cher. Si des préjudices à votre égard existent ou si des dommages et intérêts pour licenciement abusif sont envisageables, vous êtes en position de force pour négocier une augmentation du montant de l’indemnisation supra-légale. Dans le cas contraire, il vous sera difficile d’y prétendre.

Mon conseil.

Beaucoup de personnes se lancent dans les négociations sans savoir que de nombreux éléments sont à prendre en considération pour calculer le montant de l’indemnité supra-légale : la fiscalité des ruptures conventionnelles pour votre employeur, les exonérations, les cotisations sociales… A ce stade et selon votre situation, pour vous permettre d’adopter la meilleure stratégie et mener votre négociation à bien, il peut être très utile, voire indispensable, de faire appel à un avocat en droit du travail.

Quels délais sont à prévoir ?

La date de votre départ sera librement décidée entre l’employeur et vous. Toutefois, deux délais sont à prendre en considération.

D’une part, le délai de rétractation qui démarre le lendemain de la signature des documents et s’étale sur 15 jours durant lesquels votre employeur ou vous, pouvez changer d’avis sans motif. En notant qu’en cas de rétractation, d’un côté comme de l’autre, le contrat de travail se poursuit.

D’autre part, un délai d’homologation de deux semaines qui démarre suite au dépôt d’une demande de validation de la convention de rupture conventionnelle. Sans réponse au bout de 15 jours, la convention est considérée comme validée et votre CDI rompu. Il faudra donc compter, a minima, un délai d’un mois suite à la signature de la rupture de votre contrat de travail avant de quitter l’entreprise.

Et après ?

Tout s’est bien déroulé et votre convention de rupture conventionnelle est validée, vous avez désormais le droit de toucher des allocations de retour à l’emploi (ARE) qui vous seront versées chaque mois. Pour cela, vous devez vous inscrire à Pôle Emploi dans les 12 mois qui suivent la fin de votre contrat de travail.

Attention, plusieurs délais doivent s’écouler avant de percevoir vos allocations de retour à l’emploi :
- Un délai de 7 jours ouvrés qui s’applique, quelle que soit votre situation ;
- Si vous avez reçu des indemnités supra légales, qui excèdent donc le montant prévu par la loi, votre indemnisation sera reportée selon un calcul au cas par cas. Si vous avez reçu une indemnité relative à des congés payés que vous n’avez pas pris, un délai supplémentaire y correspondant sera appliqué et différera également vos allocations.
- A noter : tous ces délais sont cumulatifs et le délai de carence total ne peut pas excéder 180 jours et donc approximativement 6 mois.

Karina Elharrar Avocat au Barreau de Paris www.elharraravocats.com