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Entreprise : Comment accompagner juridiquement une future grossesse et son annonce ? Par Zaïna Abdool Raman, Directrice juridique.
Parution : vendredi 26 mai 2023
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Au cours de l’exécution du contrat de travail, les salariées peuvent bénéficier d’un congé maternité. Le Code du travail prévoit qu’un tel congé maternité dure 16 semaines par principe conformément à l’article L1225-17 du Code du travail. Cette durée peut être augmentée en cas de naissances multiples ou en fonction du nombre d’enfants dont la salariée assume la charge ou encore par accord d’entreprise. L’employeur doit dans une telle situation anticiper la future absence de la salariée.

Malgré une idée reçue, rappelons dans un premier temps que la salariée n’a aucune obligation de révéler son état de grossesse, sauf lorsqu’elle demande le bénéfice des dispositions légales et réglementaires concernant la protection des femmes enceintes (article L1225-2 du Code du travail). ailleurs, l’employeur ne doit pas prendre en compte l’âge des salariés, ou encore leur situation de grossesse, leur situation familiale pour refuser d’embaucher une salariée, pour rompre un contrat de travail ou encore pour refuser une mutation, promotion ou augmentation (article L1132-1 du Code du travail). Cela pourrait être constitutif de discrimination.

En pratique, de nombreuses salariées déclarent leur grossesse à leur employeur lors du troisième mois. En effet, selon une étude, 32% ont déclaré leur grossesse à leur employeur à 2 mois, et 50% à 3 mois (Etude de 2015 pour la fondation PremUp).

Les employeurs peuvent donc bénéficier de ce laps de temps pour organiser la future absence de la salariée mais également avant le congé maternité, prendre soin de la santé de la salariée enceinte et envisager la passation sur le poste concerné.

Légalement, l’employeur doit prendre soin de la santé et de la sécurité des salariés (article L4121-1 du Code du travail). Lorsqu’une salariée est enceinte, elle bénéficie d’une protection particulière du fait de sa grossesse : une salariée peut demander une mutation temporaire si son état de santé l’exige (article L1225-7 du Code du travail). Il est par ailleurs interdit d’affecter la salariée à certains travaux incompatibles avec leur situation de grossesse (article L1225-12 du Code du travail).

Il est conseillé dans une telle situation de systématiser les visites médicales auprès du médecin du travail afin que l’employeur s’assure que la salariée ne prenne pas de risque pour sa santé. Par ailleurs, il pourrait être envisagé avec les managers de ces salariés de prévoir des rendez-vous plus réguliers afin de s’assurer des bonnes conditions de travail.
Cela permettra d’aménager le poste de travail (horaires, télétravail par exemple) de la salariée.

Pendant cette période, il est conseillé d’anticiper l’absence en congé maternité. Un point avec la salariée listant ses différentes tâches, ses différents dossiers pour les mois à venir apparait essentiel afin d’anticiper son absence et permettre un éventuel recrutement le cas échéant.

Pendant le congé maternité, il faut trouver des solutions pour assurer le bon fonctionnement de l’entreprise Comme évoqué ci-dessus, l’employeur doit se charger, en collaboration avec le manager d’anticiper cette absence de 4 mois (au moins). Il s’agit ici de veiller à ce que le poste de la salariée continue de fonctionner sans que cela n’impacte de manière trop importante les collègues de celle-ci.

En effet, dans de nombreuses structures, les salariées partant en congé maternité ne sont pas remplacées. Il revient aux collègues de gérer les tâches et missions de la salariée absente jusqu’au moment où celle-ci est de retour. Toutefois, une telle pratique engendre des risque psycho-sociaux à l’égard des salariés qui doivent absorber en plus de leur propres tâches les missions de la salariée absente temporairement. De même, la salariée absente ne se voyant pas remplacer peut émettre des doutes quant au sens de son poste et à son utilité dans l’entreprise. Ce sont autant d’éléments qui peuvent conduire à des RPS.

C’est pourquoi il est conseillé pour l’employeur d’organiser en amont la passation des différentes tâches afin de permettre une juste répartition entre les salariés ainsi que d’envisager le cas échéant un remplacement en externe, si une telle répartition vient mettre à mal l’équipe en termes de charge de travail.

Celui-ci pourrait par ailleurs être une solution plus intéressante. L’employeur a la possibilité par ailleurs de conclure un CDD avant l’absence du salarié à remplacer (article L1242-9 du Code du travail). L’administration affirme par ailleurs que l’utilisation de cette possibilité est subordonnée au temps nécessaire à la transmission des instructions et à la mise au courant du remplaçant (Circulaire DRT n°90/18 du 30 octobre 1990). Cette période de tuilage permettra à la salariée partant en congé maternité de partir plus sereinement et d’assurer une véritable efficacité de la personne remplaçante.

Afin de faire face à des départs en congé maternité, il convient d’avoir une véritable politique incluant la parentalité au sein de l’entreprise. En effet, une telle politique permettra aux salariées et aux salariés d’être plus serein face à une telle annonce.
Voici quelques pistes à envisager :

Une telle politique permettra aux salariées concernées d’être plus sereines lorsqu’elles devront effectuer une telle annonce. Cela permettra par ailleurs de fidéliser les salariés, l’entreprise leur permettant de vivre leur parentalité en toute confiance.

Il ne faudra pas oublier de mettre également un accompagnement lors de la reprise du poste de travail par la salariée enceinte. Le congé maternité doit être autant anticiper en amont que le post-natal, qui est souvent oublié. Lors de la reprise, l’entreprise doit donc également préparer le retour de sa salariée pour reprendre en douceur !

Zaïna Abdool Raman Directrice Juridique et Pédagogique Success-Consulting par Conseil CE [->infos@success-consulting.fr]