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Comment se sortir du piège de l’injonction de payer en Pologne ? Par Lucien Peczynski, Avocat
Parution : jeudi 11 février 2010
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Les injonctions de payer rendues par les tribunaux polonais contre les entrepreneurs français tendent à se multiplier. Cette mesure d’une efficacité juridique redoutable mérite quelques développements.

Le rapport créancier-débiteur en droit polonais se caractérise par un « avantage » indéniable en faveur du créancier qui se traduit principalement par le très court délai dont dispose le débiteur pour former opposition à l’injonction de payer.


LE CREANCIER

1. Le créancier souhaitant obtenir une injonction de payer doit saisir la juridiction compétente au moyen d’une assignation contenant les preuves de l’existence de sa créance et du comportement fautif du débiteur.

Dès lors que la créance lui paraît fondé (ce qui est presque toujours le cas...), le juge rend une ordonnance portant injonction de payer suivant une procédure non contradictoire, se fondant donc sur les seuls justificatifs produits par le créancier.

Il est à noter que le juge polonais peut également rendre une telle injonction lorsque, dans le cadre d’une procédure contradictoire de droit commun, s’il estime que toutes les conditions sont réunies pour trancher le litige selon cette voie.

Après notification de l’injonction, le débiteur dispose d’un délai très court de 2 semaines pour former opposition. A défaut, le jugement acquiert l’autorité de la chose jugée en devenant définitif.

Le fait que le débiteur soit domicilié à l’étranger est indifférent au législateur polonais. Le même délai de deux semaines doit être respecté pour former opposition, alors que les diligences à accomplir sont, dans sa situation, bien plus contraignantes.

LE DEBITEUR

2. L’opposition à l’injonction de payer revêt le caractère de véritables conclusions qui doivent être impérativement motivées en fait et en droit (en France, une simple déclaration d’opposition est suffisante).

Une fois les conclusions signifiées (dans le délai imparti), les débats sont clos et plus aucune pièce, ni aucun autre argument, ne pourront être versés au dossier lors de la procédure contradictoire qui s’en suivra !

Le débiteur étranger doit, en conséquence, être encore plus réactif qu’un débiteur polonais.

En effet, à peine d’irrecevabilité, l’ensemble des pièces et écrits produits au soutien de son opposition devront être traduits en polonais, qui plus est, par un traducteur assermenté.

Bien évidemment, les « conclusions d’opposition » devront être signifiées selon les formes requises devant le tribunal ayant délivré l’injonction de payer.

3. Le recours immédiat à un conseil est donc incontournable pour combattre l’injonction polonaise.

Ce dernier pourra non seulement accomplir toutes les formalités nécessaires à la régularité de l’opposition, mais aussi, motiver les conclusions en invoquant, en premier lieu, si la nature de la relation contractuelle le permet, l’incompétence du tribunal polonais pour trancher le litige.

C’est uniquement à cette condition que le différend pourra être réglé selon une procédure contradictoire de droit commun, et que le débiteur sera en position d’affronter son créancier à armes égales.

Lucien Peczynski

Copernic Avocats