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Les suites fiscales de l’affaire HSBC. Par Jean Pannier, Avocat
Parution : mercredi 2 juin 2010
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Pendant combien d’années l’administration fiscale peut-elle exercer ce qu’on appelle le droit de reprise qui couvre donc la période pendant laquelle le risque fiscal demeure pour les revenus non déclarés ?

La loi fiscale a souvent varié, selon les périodes, sur cette question de la prescription fiscale. Le fait est qu’on constate une tendance à l’allongement.

S’agissant plus particulièrement des revenus non déclarés encaissés à l’étranger la réponse est donnée par l’article L. 169 du Livre des procédures fiscales modifié par l’article 1 du décret n°2010-422 du 27 avril 2010 :

« Le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due, lorsque les obligations déclaratives prévues aux articles 123 bis, 209 B, 1649 A et 1649 AA du même code n’ont pas été respectées et concernent un Etat ou un territoire qui n’a pas conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales permettant l’accès aux renseignements bancaires. Ce droit de reprise concerne les seuls revenus ou bénéfices afférents aux obligations déclaratives qui n’ont pas été respectées ».

Cette disposition redoutable n’est cependant pas encore en vigueur. En effet, l’article 52 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 précise que cette disposition s’appliquera aux délais venant à expiration postérieurement au 31 décembre 2008.

Lorsqu’elle commence un contrôle en 2010, l’administration exerce donc son droit de reprise sur l’année 2006, en sus de la période vérifiée c’est-à-dire les exercices 2007 et 2008 et, le cas échéant, l’exercice 2009 après la date limite de dépôt des déclarations.

La situation se complique sérieusement au regard de l’imposition des successions et de l’ISF puisque dans ce cas la prescription est de six ans c’est-à-dire que l’administration est fondée à examiner les situations dans ces deux domaines en remontant jusqu’au 1er janvier 2004. Il est évidemment illusoire d’espérer cacher une succession au fisc sur des comptes bancaires étrangers à partir du moment où celle-ci a fait l’objet d’une déclaration en France.

S’agissant des revenus domiciliés sur des sociétés la solution est fixée par l’article 123 bis du Code général des impôts : (Modifié par la loi n°2009-1674 du 30 décembre 2009 - art. 22 (V))

1. Lorsqu’une personne physique domiciliée en France détient directement ou indirectement 10 % au moins des actions, parts, droits financiers ou droits de vote dans une entité juridique - personne morale, organisme, fiducie ou institution comparable - établie ou constituée hors de France et soumise à un régime fiscal privilégié, les bénéfices ou les revenus positifs de cette entité juridique sont réputés constituer un revenu de capitaux mobiliers de cette personne physique dans la proportion des actions, parts ou droits financiers qu’elle détient directement ou indirectement lorsque l’actif ou les biens de la personne morale, de l’organisme, de la fiducie ou de l’institution comparable sont principalement constitués de valeurs mobilières, de créances, de dépôts ou de comptes courants.

Pour l’application du premier alinéa, le caractère privilégié d’un régime fiscal est déterminé conformément aux dispositions de l’article 238 A par comparaison avec le régime fiscal applicable à une société ou collectivité mentionnée au 1 de l’article 206.

2. Les actions, parts, droits financiers ou droits de vote détenus indirectement par la personne physique mentionnée au paragraphe 1, s’entendent des actions, parts, droits financiers ou droits de vote détenus par l’intermédiaire d’une chaîne d’actions, de parts, de droits financiers ou de droits de vote ; l’appréciation du pourcentage des actions, parts, droits financiers ou droits de vote ainsi détenus s’opère en multipliant entre eux les taux de détention desdites actions ou parts, des droits financiers ou des droits de vote successifs.

La détention indirecte s’entend également des actions, parts, droits financiers ou droits de vote détenus directement ou indirectement par le conjoint de la personne physique, ou leurs ascendants ou descendants. Toutefois, ces actions, parts, droits financiers ou droits de vote ne sont pas pris en compte pour le calcul du revenu de capitaux mobiliers de la personne physique mentionné au paragraphe 1.

3. Les bénéfices ou les revenus positifs mentionnés au paragraphe 1 sont réputés acquis le premier jour du mois qui suit la clôture de l’exercice de l’entité juridique établie ou constituée hors de France ou, en l’absence d’exercice clos au cours d’une année, le 31 décembre. Ils sont déterminés selon les règles fixées par le présent code comme si l’entité juridique était imposable à l’impôt sur les sociétés en France. L’impôt acquitté localement sur les bénéfices ou revenus positifs en cause par l’entité juridique est déductible du revenu réputé constituer un revenu de capitaux mobiliers de la personne physique, dans la proportion mentionnée au paragraphe 1, à condition d’être comparable à l’impôt sur les sociétés.

Toutefois, lorsque l’entité juridique est établie ou constituée dans un Etat ou territoire n’ayant pas conclu de convention d’assistance administrative avec la France, ou qui est non coopératif au sens de l’article 238-0 A le revenu imposable de la personne physique ne peut être inférieur au produit de la fraction de l’actif net ou de la valeur nette des biens de la personne morale, de l’organisme, de la fiducie ou de l’institution comparable, calculée dans les conditions fixées au paragraphe 1, par un taux égal à celui mentionné au 3° du paragraphe 1 de l’article 39.

4. Les revenus distribués ou payés à une personne physique mentionnée au paragraphe 1 par une entité juridique ne constituent pas des revenus imposables au sens de l’article 120, sauf pour la partie qui excède le revenu imposable mentionné au paragraphe 3.

4 bis. Le paragraphe 1 n’est pas applicable, lorsque l’entité juridique est établie ou constituée dans un Etat de la Communauté européenne, si l’exploitation de l’entreprise ou la détention des actions, parts, droits financiers ou droits de vote de cette entité juridique par la personne domiciliée en France ne peut être regardée comme constitutive d’un montage artificiel dont le but serait de contourner la législation fiscale française.

4 ter. La condition de détention de 10 % prévue au paragraphe 1 est présumée satisfaite lorsque la personne physique a transféré des biens ou droits à une entité juridique située dans un Etat ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A.

Un commentaire sera prochainement consacré à ce régime dès la parution du Bulletin Officiel en préparation.

Jean PANNIER
jean.pannier chez gmail.com
Docteur en droit
Avocat à la Cour de Paris

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