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La reconnaissance d’un délit d’initié pour éviter de réaliser des pertes. Par Olivier Vibert, Avocat
Parution : mardi 5 avril 2011
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La Cour de cassation précise que l’expression "profits éventuellement réalisés" utilisée à l’article L621-15 du code monétaire et financier relatif aux sanctions des opérations d’initiés recouvre tous les avantages économiques éventuellement retirés de l’opération litigieuse en ce compris les pertes évitées.

Cour de cassation, chambre commerciale, 8 février 2011, pourvoi 10-10965.

Cette décision est rendue à propos d’une ancienne affaire de délit d’initié supposé commis par le Président directeur Général de la société Marionnaud Parfumerie.

Ce dernier avait cédé des titres dans la société alors qu’il détenait une information privilégiée relative aux irrégularités affectant les comptes sociaux.

L’AMF lui avait infligé en 2008 une amende de 5 millions d’euros.

Cette décision à été contestée devant la Cour d’appel mais confirmée par elle. La Cour d’appel a ramené simplement l’amende à 3 millions d’euros.

Un pourvoi est formé pour plusieurs motifs. Les deux derniers paraissent les plus intéressants.

Il était tout d’abord reproché à la décision d’avoir prononcé une amende sans avoir caractérisé que la détention de l’information privilégiée ait pu déterminer la décision d’effectuer l’opération.

La Cour de cassation répond que dès lors qu’est établi la matérialité des faits constitutifs du manquement d’initié, il appartient à la personne mise en cause de démontrer qu’elle n’a pas fait une exploitation indue de l’avantage que lui procurait la détention de l’information privilégiée.

Il appartenait donc à la personne soupçonnée d’avoir commis un délit d’initié d’apporter cette preuve et non à l’autorité de poursuite.

Le quatrième moyen donne ensuite l’occasion à la Cour de cassation de préciser sa lecture de l’article L 621-15 du code monétaire et financier relatif au sanctio d’un délit d’initié.

La Cour juge en effet que les termes "profits éventuellement réalisés" désignent les avantages économiques éventuellement retirés de l’opération contestée. Les pertes évitées selon la Cour de cassation entrent dans ces avantages économiques retirés de l’opération.

La limitation des pertes par la vente des titres avant la diffusion d’une information peur donc constituer un profit éventuellement réalisé.

Cette analyse peut sembler excessive mais elle répond à un besoin de précision du texte de l’article L 621-15 du code monétaire et financier tel qu’il était rédigé au moment des faits.

La rédaction de ce texte pouvant être trop limitative, la jurisprudence s’efforce d’étendre son champ d’application à tout avantage économique retiré d’une opération financière ou boursière.

Olivier Vibert Avocat, Paris www.frenchlaw.blog