Définition.
Le temps de pause est défini a contrario du temps de travail effectif [2], qui correspond au temps pendant lequel le salarié est :
(i) à la disposition de l’employeur ;
(ii) se conforme à ses directives ;
(iii) sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.
Pour sa part, la pause correspond à un arrêt de travail de courte durée sur le lieu de travail ou à proximité, durant lequel le salarié fait usage de ce temps libre comme bon lui semble.
Sauf stipulation contractuelle ou conventionnelle contraire, ce temps n’est pas rémunéré.
Ce n’est que si les trois critères susvisés sont réunis que le temps consacré aux pauses est qualifié de travail effectif et rémunéré [3].
Appréciation des conditions in concreto.
Les juges du fond apprécient in concreto les circonstances de fait pour lesquelles le salarié sollicite la requalification du temps de pause en temps de travail effectif et demande un rappel de salaire.
A titre d’exemple, ne suffisent pas à exclure la qualification de temps de pause :
les interventions éventuelles et exceptionnelles demandées au salarié en cas de nécessité [4] ;
la contrainte imposée par l’employeur de rester dans les locaux de l’entreprise [5].
En fonction des circonstances dans lesquelles la pause se déroule, celle-ci sera ou non considérée et rémunérée comme du temps de travail effectif.
Quid de l’obligation « d’être joignable à tout moment » ?
En l’espèce, les agents d’encadrement qualité d’une entreprise devaient conserver leur téléphone mobile professionnel dans tous leurs déplacements internes sur le site, afin d’être joignables à tout moment, y compris en cas de sortie du poste, pour pouvoir répondre à une information urgente à transmettre au transporteur pour des livraisons.
Plusieurs salariés sollicitaient la requalification du temps de pause passé dans ces circonstances, en temps de travail effectif, assorti d’une rémunération.
La Cour d’appel a confirmé le jugement donnant gain de cause aux salariés en considérant que le simple fait de devoir rester muni de son téléphone mobile professionnel suffisait à démontrer que le salarié
« devait rester constamment à la disposition de l’employeur et se conformer à ses directives, qu’il ne pouvait donc vaquer librement à ses occupations personnelles » [6].
Petit aparté sur ce dernier point, le Code du travail vise « des » occupations in abstracto. Il importe peu que le salarié ne puisse pas vaquer à ses propres loisirs. Il doit simplement retrouver une certaine liberté dans l’utilisation du temps qui lui est accordé et cesser ses activités professionnelles.
La Cour de cassation a censuré la position de la Cour d’appel qui a déduit du fait de devoir rester muni de leur téléphone mobile professionnel afin d’être joignable à tout moment, que le temps de pause constituait du temps de travail effectif.
Ceci est inopérant et insuffisant : il appartenait aux juges de caractériser en quoi les trois critères étaient réunis.
En l’occurrence, les salariés n’étaient pas constamment à la disposition de l’employeur : leur intervention n’était qu’éventuelle. Aucun lieu de prise de pause ne leur semblait imposé, puisqu’ils étaient libres de leurs déplacements sur site. Ils n’étaient a priori pas dans l’impossibilité de se livrer à des activités d’ordre privé.
Points de vigilance pour l’employeur.
Les entreprises ont l’obligation de contrôler le temps de travail journalier des salariés (et donc par voie de conséquence, le respect des temps de pause) [7].
Cette obligation n’est pas reprise par la législation française pour les salariés occupés selon un horaire collectif. Néanmoins, il convient de garder à l’esprit que la preuve du respect des temps de pause [8] et des durées maximales de travail [9] incombe à l’employeur.
Face au risque de requalification en temps de travail effectif obligatoirement rémunéré, il convient d’appeler à la plus grande prudence quant aux contraintes importantes imposées aux salariés durant leur pause.
A suivre pour l’appréciation des faits d’espèce par la Cour d’appel de renvoi…