1. Bilan du cadre légal : qui paie quoi ?
1.1. Le principe de base.
La répartition des travaux s’organise entre deux catégories :
- Les grosses réparations [1] : murs porteurs, toiture, charpente, ravalement, structures… Elles sont à la charge du bailleur.
- Les réparations locatives [2] : entretien courant, menues réparations (sols, serrures, prises, sanitaires…). Celles-ci sont à la charge du locataire.
Les gros travaux ne sont jamais transférables intégralement au locataire dans les baux conclus après le 5 novembre 2014 (Loi Pinel). Soyez attentif - une clause trop générale est réputée non écrite !
En pratique la répartition est souvent sujette à interprétation : il existe des tableaux de jurisprudences sur des dizaines de pages qui tranchent la question de savoir si un type de travaux relève du bailleur ou du preneur.
1.2. Les spécificités contractuelles.
Bien qu’un socle légal existe, la répartition peut être ajustée par les parties, mais uniquement dans la limite de ce que la loi permet.
Il est donc essentiel de :
- Préciser dans le bail toutes les catégories de travaux qui peuvent être transférées réglementairement,
- Annexer un tableau récapitulatif des charges pour éviter toute zone d’ombre,
- Éviter les clauses abusives ou imprécises (exemple : " tous les travaux à la charge du locataire" sans distinction).
Exemple : un commerçant qui signe un bail après 2014 ne pourra légalement pas supporter le coût de la remise en état de la façade ou de la charpente, même si le bail le prévoit.
Les négociations - lors de la conclusion du bail - sont capitales et le risque de contentieux - a posteriori - est élevé...
2. Typologie des travaux concernés.
Travaux à la charge du bailleur (exemples) :
- Gros œuvre, réparations structurelles,
- Amiante, accessibilité handicapés si de gros travaux, etc.
Travaux à la charge du locataire (exemples) :
- Entretien courant et réparations d’usage,
- Remplacement de certains équipements,
- Aménagements personnels, etc.
Cas particulier :
Les travaux de mise aux normes peuvent être discutés : le bailleur doit supporter ceux liés à la sécurité ou aux obligations légales, sauf clause explicite et détaillée.
Exemple pratique : avant la signature, exigez une liste détaillée des travaux dont chaque partie est responsable. Cette transparence protège des litiges futurs et clarifie la gestion quotidienne du local.
J’intègre personnellement des tableaux de répartition de plusieurs pages, pour chaque poste de dépense, dans les baux commerciaux que je rédige.
3. Les points de vigilance récurrents.
3.1. Les clauses mal rédigées.
Une clause généraliste ("tous les travaux à la charge du locataire") n’a pas de valeur. Il faut détailler chaque type de dépense (avec références légales et jurisprudentielles, le cas échéant).
Exemple concret : une clause qui transfère "l’entretien de la toiture" au locataire sans distinction entre réparation, rénovation et maintenance peut être invalidée par le juge. Et les travaux remboursés au preneur.
3.2. Les charges imprévues et l’état prévisionnel des travaux.
Le bailleur doit désormais annexer un état prévisionnel des travaux pour les trois années à venir, selon les diagnostics du local. Cela permet au locataire d’anticiper les dépenses et de discuter ses obligations contractuelles.
3.3. Les autorisations administratives.
Le locataire reste responsable des démarches nécessaires à la réalisation de ses propres travaux (permis de construire, déclaration préalable, etc.), sauf stipulation contraire.
4. Rôle de l’avocat en baux commerciaux.
L’accompagnement d’un avocat permet :
- d’anticiper les risques : analyse des diagnostics, identification des travaux non transférables, projection des dépenses,
- de négocier des clauses personnalisées : rédaction sur mesure, annexe des charges conforme à la réglementation,
- préserver ses marges en anticipant les charges,
- de résoudre les litiges : médiation, contentieux, expertise judiciaire,
- d’assurer la conformité du contrat (obligations d’information, annexe verte, état des risques…).
L’avocat ne se contente pas d’appliquer la loi : il déploie une expertise pointue de la matière, adapte la rédaction à chaque situation et veille à la conformité contractuelle.
Il accompagne aussi bien le bailleur que le locataire pour préserver leurs intérêts respectifs.
Votre avocat peut également vous aider à identifier les points faibles d’un projet de bail ou à piloter une renégociation sur la répartition des travaux.
5. Bonnes pratiques pour sécuriser son bail.
- Inventaire détaillé : annexer un inventaire des équipements et des états initiaux, pour éviter les ambigüités sur les réparations,
- Clause claire de répartition : chaque catégorie de travaux doit être précisée dans le bail,
- État prévisionnel des travaux : demander au bailleur la liste des travaux à venir sur 3 ans,
- Négociation accompagnée : se faire assister par un avocat dès les pourparlers.
Les conseils-clés :
- Prendre le temps de relire intégralement toutes les annexes et tableaux,
- Poser les bonnes questions lors de la visite des lieux : toiture, accès PMR, diagnostics, gros travaux réalisés ces dernières années, etc.,
- Prévoir une clause d’arbitrage ou de médiation en cas de litige.
Conclusion.
La répartition des travaux dans le bail commercial est un pivot majeur de la relation entre bailleur et locataire. Il ne s’agit pas d’un simple détail technique, mais d’une variable stratégique pour l’entreprise.


