Dans le cadre d’un précédent billet : Le certificat d’urbanisme et la cristallisation, le mécanisme du sursis-à-statuer fut décrypté en ce qu’il permet à l’Administration de refuser la délivrance d’une autorisation d’urbanisme qui serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan local d’urbanisme.
Néanmoins, encore faut-il que la future règle soit légale !
En effet, par un arrêt du 22 juillet 2020, Mlle A... B..., n°427163, Publié au recueil Lebon (A), le Conseil d’Etat consacre la possibilité de contester, par voie d’exception, la légalité des dispositions du futur plan local d’urbanisme justifiant un sursis-à-statuer :
« 3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l’arrêté litigieux du 18 octobre 2013 se borne à viser le Code de l’urbanisme dans son ensemble ainsi que la délibération du 23 mars 2009 prescrivant l’élaboration du plan local d’urbanisme et à mentionner dans ses motifs que "l’opération projetée est de nature à compromettre ou à rendre plus onéreux l’exécution du plan local d’urbanisme". En jugeant que ces éléments n’étaient pas de nature à mettre la destinataire de la décision à même d’identifier le texte dont elle faisait application et que la circonstance que la délibération du 23 mars 2009 ainsi visée vise elle-même, parmi de nombreux autres articles, l’article L123-6 du Code de l’urbanisme n’était pas de nature à y remédier, la cour qui, contrairement à ce que soutient la commune, n’a pas fondé son raisonnement sur la seule insuffisance des visas de la décision administrative dont elle était saisie, a porté sur les faits une appréciation souveraine exempte de dénaturation. En accueillant en conséquence le moyen tiré de l’insuffisance de la motivation en droit de cet arrêté, elle n’a pas commis d’erreur de droit.
4. En deuxième lieu, un sursis à statuer ne peut être opposé à une demande de permis de construire qu’en vertu d’orientations ou de règles que le futur plan local d’urbanisme pourrait légalement prévoir, et à la condition que la construction, l’installation ou l’opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour n’aurait pu sans erreur de droit, pour apprécier la légalité de la décision de sursis à statuer opposée à Mlle B..., examiner la légalité du futur plan local d’urbanisme ne peut, en tout état de cause, qu’être écarté. »
Cette jurisprudence abroge ainsi la solution jusqu’alors consacrée implicitement par l’arrêt Conseil d’Etat, 17 mars 1982, SCI Le Bas Chevincourt, n° 24962, Aux Tables.
En l’occurrence, le Conseil d’Etat valide la solution retenue par la Cour administrative d’appel de Versailles, ayant abouti à l’annulation d’un arrêté ayant opposé un sursis à statuer à une demande de permis de construire portant sur la construction d’une maison individuelle d’habitation, prise aux motifs :
D’une part, que la localisation et l’importance du projet ne sont pas de nature à compromettre l’exécution du futur plan local d’urbanisme (solution classique) ;
D’autre part, examiné la légalité du projet de classement en zone naturelle du futur plan local d’urbanisme (solution nouvelle).
Cette solution, empreinte de pragmatisme, confirmera l’opportunité, pour tout pétitionnaire déçu, d’auditer la légalité du futur PLU dès la décision portant sursis-à-statuer sur son projet.
Discussion en cours :
Le mécanisme du sursis-à-statuer n’est applicable que dans le cadre des procédures d’élaboration ou de révision du plan local d’urbanisme. Aucune disposition du code de l’urbanisme ne prévoit la possibilité d’opposer un sursis-à-statuer dans le cadre d’une simple procédure de modification du document d’urbanisme local : Conseil d’État, 1/4 CR, 28 janvier 2021, n°433619, Aux Tables.