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Pénalistes, votre connaissance de la pratique m'intéresse !

MessagePosté: Jeu 10 Jan 2008 21:44
de tr3fle
Bonjour,

Suite à un article relatif aux "violences dans les banlieues", je suis restée dubitative...

Une intervenante a argué que les violences peuvent se justifier par les problèmes que vivent les jeunes de banlieue. Et le webmaster de répondre avec force et conviction : "On ne dit pas d'un jeune qu'il est délinquant par rapport à un problème qu'il a mais par rapport à un délit qu'il commet."

Voir le sujet à partir du 14/09/2007 : http://www.resonance-online.com/article.php?fiche=7844

Je reste dubitative car le peu de connaissances que j'ai en pénal (je suis étudiante) ne me permettent pas d'apprécier suffisamment ce dernier argument.

En effet, je sais que les juridictions prennent en compte la personnalité du délinquant. Mais dans quelle mesure la situation sociale du délinquant entre en considération dans la condamnation dont il sera l'objet ?

Par curiosité, il me brûle d'avoir un avis éclairé de praticiens pénalistes.

Merci d'avance B-l

MessagePosté: Ven 11 Jan 2008 16:44
de tr3fle
Personne ? Pas de pénalistes dans le village ?

:? :oops:

Re: Pénalistes, votre connaissance de la pratique m'intéress

MessagePosté: Ven 11 Jan 2008 17:04
de RUD
tr3fle a écrit :En effet, je sais que les juridictions prennent en compte la personnalité du délinquant. Mais dans quelle mesure la situation sociale du délinquant entre en considération dans la condamnation dont il sera l'objet ?


Bonjour,

Je ne suis pas un grand pénaliste (que Dieu m'en préserve...) mais je vous répondrai très simplement : au bon vouloir du magistrat...

Cordialement

Re: Pénalistes, votre connaissance de la pratique m'intéress

MessagePosté: Ven 11 Jan 2008 17:24
de tr3fle
RUD a écrit :Je ne suis pas un grand pénaliste (que Dieu m'en préserve...) mais je vous répondrai très simplement : au bon vouloir du magistrat...

Ce qu'autorise le système inquisitoire, certainement.

Merci pour ce point de vue, RUD.
Cordialement

Re: Pénalistes, votre connaissance de la pratique m'intéress

MessagePosté: Ven 11 Jan 2008 18:41
de Twisten
tr3fle a écrit :dans quelle mesure la situation sociale du délinquant entre en considération dans la condamnation dont il sera l'objet ?


Bonjour,

ma réponse, enfin mon avis plutôt, car il ne s'agit pas ici d'une vérité absolue puisque émanant de mon cerveau :D ne concerne que votre question générale et non pas le cas des banlieues précédemment cité.

Je préciserai juste dans le cas présent que la situation sociale du délinquant peut entrer en considération dans la condamnation en tant que circonstance agravante ou circonstance aténuante, ainsi que dans la condamnation même.

Je m'explique avec un cas réel :
monsieur Z va déposer plainte contre X suite à un accident de la circulation dans lequel son véhicule a été totalement détruit, en déclarant qu'il se souvient avant son accident d'un choc avec un véhicule qui l'aurait emboutit par l'arrière, et qui donc aurait pris la fuite.
Constatations faites par les services des forces de l'ordre, les déclarations de mr Z sont incohérentes et impossibles, monsieur Z reconnait en garde à vue avoir fait une fausse déclaration pour l'assurance, étant donné qu'il s'est accidenté tout seul. La finalité étant que le magistrat ayant été saisi de cette affaire, vu les faibles revenus de monsieur Z, et qui en est arrivé à procéder de telle manière pour se faire rembourser une voiture de faible valeur, n'a pas pris une décision "automatique" du style x mois prison avec sursis et x 000 euros d'amende, mais a tout simplement annulé son permis de conduire.
Résultat : mr X ne se retrouve pas enfoncé dans une situation qui va l'enfoncer plus en payant des amendes excessives, sanction qui je pense aurait été appliquée à une personne aisée financièrement. Il se retrouve cependant à pied ce qui risque de le faire réfléchir pendant longtemps.

Voilà pour ce qui est je pense la condamnation même prenant en compte la situation sociale.

Concernant la circonstance agravante ou la circonstance atténuante, je citerai les points suivants qui font partie intégrante de la situation sociale d'un individu, c'est à dire la place qu'il occupe dans notre société:
* circonstance aggravante ==> la profession de la personne délinquante (personne dépositaire de l'autorité publique, prise d'intérêt illégale etc..), la qualité de la personne (personne ayant droit, personne chargée de mission de service publique etc.), le lien de la personne (ascendant, descendant etc.)
* circonstance atténuante ou "modificative" de peine plus adaptée ==> sans domicile fixe, mineur, etc..

Je ne sais pas si vous m'avez suivi, le cas échéant je me réexpliquerai en essayant d'être plus clair
:D

Voilà mon avis sur la question d'ordre général, et non sur les banlieues.
twisten

Re: Pénalistes, votre connaissance de la pratique m'intéress

MessagePosté: Ven 11 Jan 2008 19:11
de Nemo auditur
tr3fle a écrit :Bonjour,

Suite à un article relatif aux "violences dans les banlieues", je suis restée dubitative...

Une intervenante a argué que les violences peuvent se justifier par les problèmes que vivent les jeunes de banlieue. Et le webmaster de répondre avec force et conviction : "On ne dit pas d'un jeune qu'il est délinquant par rapport à un problème qu'il a mais par rapport à un délit qu'il commet."

Voir le sujet à partir du 14/09/2007 : http://www.resonance-online.com/article.php?fiche=7844

Je reste dubitative car le peu de connaissances que j'ai en pénal (je suis étudiante) ne me permettent pas d'apprécier suffisamment ce dernier argument.

En effet, je sais que les juridictions prennent en compte la personnalité du délinquant. Mais dans quelle mesure la situation sociale du délinquant entre en considération dans la condamnation dont il sera l'objet ?

Par curiosité, il me brûle d'avoir un avis éclairé de praticiens pénalistes.

Merci d'avance B-l


Je ne reviendrai pas sur votre question posée mais sur le raisonnement qui vous y a amenée.

Un délinquant au sens pénal est celui qui est l'auteur d'un délit.
La personnalité, la situation sociale ne changent en rien cette qualification. Cependant, par application du principe de personnalisation des peines, ceux-ci peuvent permettre à ce que la répression du délit soit totalement ou partiellement adaptée, ce qui peut faire dire à certains que les délits commis peuvent être excusés par les violences que les délinquants subissent eux-mêmes. Mais l'auteur d'un délit reste un délinquant si la preuve des faits est apportée.

Re: Pénalistes, votre connaissance de la pratique m'intéress

MessagePosté: Sam 12 Jan 2008 14:02
de Camille
Bonjour,
Et une chose est certaine, si c'est bien le rôle d'un juge de personnaliser les peines, ce ne peut pas être au motif que
tr3fle a écrit :les violences peuvent se justifier par les problèmes que vivent les jeunes de banlieue.

:roll:

MessagePosté: Sam 12 Jan 2008 16:41
de padawan
Je partage l'avis de Twisten, la nature de la peine sera souvent adaptée à la personnalité de l'auteur, de façon à ce que cette peine soit la plus efficace possible : les magistrats auront par exemple le choix entre emprisonnement, amende, combinaison des deux, peines complémentaires (suspension ou annulation de permis de conduire, etc...). Quelle peine sensibilisera le plus notre condamné ? Sa situation sociale aura alors un grand rôle.

Pour ce qui est de l'influence de la situation sociale sur le principe même de la condamnation, la question est plus délicate. Bien évidemment, les avocats des prévenus mettent en avant, par exemple, l'absence de référentiel pour leur client, qui évoluent depuis leur enfance dans un univers où violence, insultes sont normalité. Du coup l'intention coupable s'en trouverait réduite, puisque en insultant et en frappant le prévenu n'a pas vraiment eu de volonté de nuire : il n'a fait que reproduire son référentiel, ce qu'il vit au quotidien depuis l'enfance. Parfois aussi, l'environnement social pourra être un facteur atténuant, rapprochant de l'état de nécessité. Je pense par exemple à un jeune chargé de famille en surendettement, qui se livrerait à une petite escroquerie.

En tous cas, au correctionnel, les condamnations avec sursis sont prononcées dans peut-être 75 à 80% des cas (ce n'est que l'estimation basée sur mon expérience !). Le sursis a ce rôle social : je te laisse ta chance, je veux bien imaginer que tu ne disposais pas de tous les repères te permettant d'éviter de franchir la limite... Mais c'est la dernière fois ! La justice a mis le prévenu en garde, désormais l'excuse sociale ne pourra plus être mise en avant.

Je vous invite à aller assister une après-midi aux audiences correctionnelles si vous en avez le temps, je pense que cela vous permettra d'appréhender votre question :wink:

Re: Pénalistes, votre connaissance de la pratique m'intéress

MessagePosté: Dim 13 Jan 2008 23:47
de tr3fle
Camille a écrit :Bonjour,
Et une chose est certaine, si c'est bien le rôle d'un juge de personnaliser les peines, ce ne peut pas être au motif que
tr3fle a écrit :les violences peuvent se justifier par les problèmes que vivent les jeunes de banlieue.

:roll:


Bonjour Camille,
Je pense que vous avez compris que ces paroles ne sont pas de moi.
Je répondrai sous peu à tous. Promis !
Clotilde

MessagePosté: Lun 14 Jan 2008 6:55
de Camille
Bonjour,
Mais, j'avais bien lu votre message :
tr3fle a écrit :Suite à un article relatif aux "violences dans les banlieues", je suis restée dubitative...
Une intervenante a argué que...

:D