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Contrat et virginité

MessagePosté: Mar 10 Juin 2008 21:14
de busbecq
J'ai vu que le modérateur, dans sa grande sagesse, a voulu éviter que le thème de la virginité ne tombe dans le salace ou le vulgum non juridicandi, et a invoqué l'épuisement des arguments de droit.

Il en reste quand même qui, après un survol rapide, ne me semblent pas avoir été évoqués:

- quid de l'article 9 ou l'article 16 du code civil?

Peut-on faire dépendre un consentement de toute exigence quant à la personne avec laquelle on contracte?

Puis-je exiger de ma secrétaire qu'elle soit vierge et la virer lorsque j'apprends qu'elle ne l'est pas, alors qu'elle était dûment avertie à l'embauche?

Puis-je exiger que ma femme soit excisée? Je ne la force pas à se faire exciser, bien sûr, je suis un laïc convaincu et un défenseur du droit des femmes. J'avertis simplement que si je découvre lors de la nuit noce qu'elle n'est pas excisée, je cours au TGI de Lille faire annuler mon mariage.

C'est une condition absolument essentielle pour moi.
L'article 180 ne me force pas à en indiquer les raisons.

Si je suis les adeptes de la liberté de contracter, dans les deux cas, ce serait oui?

Ne pourrait-on pas rejeter ce type d'exigence au nom de la dignité de la personne et du respect du privé, de l'intime, quand bien même l'autre partie aurait donné ce consentement à une telle exigence?

Monsieur le modérateur, je ne parle que de droit!

MessagePosté: Mar 10 Juin 2008 21:22
de Hervé
A mon sens, une atteinte à la vie privée comme condition essentielle se justifie si et seulement si la condition touche la réalisation d'un contrat relatif à la vie privée, comme le mariage l'est ;)

MessagePosté: Mar 10 Juin 2008 22:28
de nox
@ hervé...que le mariage n'est pas puisqu'il n'est pas (seulement?) un contrat stricto sensu...

Peut-on faire dépendre un consentement de toute exigence quant à la personne avec laquelle on contracte


oui tant qu'il n'y a pas atteinte à une loi d'ordre public, or en ce qui concerne l'excision, cela relève de la matière criminelle....

Puis-je exiger de ma secrétaire qu'elle soit vierge et la virer lorsque j'apprends qu'elle ne l'est pas, alors qu'elle était dûment avertie à l'embauche?


le mariage n'étant pas un contrat de travail, le paralèlle est hasardeux... à moins que les fiancailles ne soient une période d'essai... (l'idée peut être à creuser: madame déposerait un préavis de mal de crane et monsieur revendiquerait l'application du service minimum ????)

Ne pourrait-on pas rejeter ce type d'exigence au nom de la dignité de la personne et du respect du privé, de l'intime, quand bien même l'autre partie aurait donné ce consentement à une telle exigence?


au nom des mêmes arguments, on pourrait considérer au contraire que tant qu'il ne sont pas contraires à l'ordre public, les éléments du privé restent dans la sphère privée et donc déterminants du consentement individuel... entre adulte consentants en somme ;-)


raisonnons a contrario (pour ce que ca vaux): on pourrait refuser de reconnaitre le critère de la vie privée comme déterminant du consentement, ce qui voudrait dire que les critères en relevant seraient contraires à l'ordre public...autant en droit du travail cela peut se comprendre (j'aime paris hilton, je fais un blog sur elle, ça ne regarde en prinicipe pas mes employeurs) autant en matière de mariage....je ne dis pas :wink:



sujet à risque :roll: :idea:

MessagePosté: Mar 10 Juin 2008 22:46
de busbecq
Ou est le criminel dans l'exigence d'excision? je n'ai forcé personne à se faire exciser, et ma femme a très bien pu se faire exciser dans un pays où cette pratique est légale.

Par ailleurs, je n'incite en rien à l'excision, je dis simplement que je ferai annuler le mariage si je découvre lors de la nuit de noce que ma femme n'est pas excisée.

Je n'ai rien fait de criminel.

On sent tous que l'argument pénal vient rapidement pour une telle exigence. On en tire immédiatement qu'une telle exigence serait contraire à l'ordre public. Mais je ne crois pas que l'argument pénal s'applique en l'occurrence. Je n'ai rien fait d'illégal en excipant d'une telle exigence.

Quant à la virginité, c'est moins simple, car une telle exigence n'est pas immédiatement perçue comme contraire à l'ordre public.

Mais je crois que, comme l'exigence d'excision, elle contrevient à l'inviolabilité d'un domaine intime personnel, strictement privé. C'est je crois à ce niveau qu'intervient l'ordre public.

Ne peut-on tirer de l'article 9, et concernant, le corps, l'article 16, la protection d'ordre public d'un domaine privé, intime, strictement personnel, dont le contrôle ne pourrait faire l'objet d'exigence d'un tiers, fût-il partie à un contrat "relatif à la vie pr ivée", pour reprendre le mot d'Hervé, et quand bien même j'aurais consenti à ce contrôle?

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 8:20
de Hervé
Nox, en termes juridiques, qu'est-ce que le mariage sinon un contrat ? Certes, il s'agit d'un contrat particulier du fait qu'il a trait à une matière et un objet particulier. Mais, à ma connaissance, le terme "institution" ne repose sur aucune réalité matérielle en Droit. Ou alors on mettrait sur le même plan l'existence d'un Président de la République et le mariage ? ;)

Busbecq, je ne vois pas en quoi on pourrait exciper d'un argument relatif aux articles 9 et 16 du Code civil en matière de condition essentielle prévue à l'article 180. Ou alors, comment pourrait-on accepter une condition essentielle telle qu'un passé prostitutionnel ou carcéral...? La combinaison des articles 9 et 16 rendrait l'article 180 totalement ineffectif sur la question des conditions essentielles puisque l'ordre public régirait déjà les cas de qualité essentielle appréciée objectivement.

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 9:28
de nox
@ hervé: ce serait un contrat special -par opposistion aux contrats innomés- au meme titre que la vente alors ? Le mariage ferait partie du patrimoine, et serait cessible ? Pourrai t on envisager d'attaquer M. le Maire pour discrimination (refus de marier -donc exclure du bénéfice d'un contrat selon vous- ) vis a vis de couples homesexuels souhaitant contracter ?

Par contre, une convention peut elle changer votre état civil ? (p. ex. permettre d'acquérir la nationalité française ?) Je pense que non, alors que le mariage le peux .

bref je ne nie pas que certains aspects sont très proches du régime contractuel, mais je ne pense pas qu'un mariage puisse etre réduit à un contrat, de par certains de ses effets ou restrictions.

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 9:52
de Mon ego et moi
nox a écrit :@ hervé: ce serait un contrat special -par opposistion aux contrats innomés- au meme titre que la vente alors ? Le mariage ferait partie du patrimoine, et serait cessible ? Pourrai t on envisager d'attaquer M. le Maire pour discrimination (refus de marier -donc exclure du bénéfice d'un contrat selon vous- ) vis a vis de couples homesexuels souhaitant contracter ?

Par contre, une convention peut elle changer votre état civil ? (p. ex. permettre d'acquérir la nationalité française ?) Je pense que non, alors que le mariage le peux .

bref je ne nie pas que certains aspects sont très proches du régime contractuel, mais je ne pense pas qu'un mariage puisse etre réduit à un contrat, de par certains de ses effets ou restrictions.


Rajoutons l'exigence de célébration par un représentant de la puissance publique.

Est-ce que, d'après vous, la prohibition des conventions portant sur le corps humain pourrait être invoquée en l'espèce ? (1128 cette fois sur les choses dans le commerce mais aussi 16-1)

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 10:08
de nox
Rajoutons l'exigence de célébration par un représentant de la puissance publique.


raaah...j'allais le rajouter.... l-o lol -)

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 10:23
de Hervé
Mais tout cela ne fait qu'aller dans mon sens... Il s'agirait d'un contrat TRES spécial, mais d'un contrat quand même... Les modalités du divorce par consentement mutuel dernière mouture me semblent le confirmer...

Mais si ce n'est pas ça, qu'est-ce ? Les conséquences sur l'Etat civil notamment justifient par exemple l'intervention d'un représentant de la force publique.

Je pose en outre une autre question. Bien que l'article 180 n'ait pas vocation à jouer dans ce contexte, peut-on imaginer l'annulation d'un PACS pour le motif d'une erreur sur une qualité essentielle ou pourrait-on envisager le jeu des articles envisagés (9, 16, 16-1 et/ou 1128) pour refuser cette annulation..?

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 10:39
de Mon ego et moi
Hervé a écrit :Mais tout cela ne fait qu'aller dans mon sens... Il s'agirait d'un contrat TRES spécial, mais d'un contrat quand même... Les modalités du divorce par consentement mutuel dernière mouture me semblent le confirmer...


Semblent confirmer une tendance actuelle à considérer le mariage sous l'angle contractuel et à abandonner, à tort à mon sens, sa nature d'institution. Les rédacteurs du Code Civil doivent bien rire jaune, là-haut.