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garantie de conformité et acheteurs successifs

MessagePosté: Mar 09 Sep 2008 16:35
de teamarena
Bonjour à tous,

Y a-t-il un texte qui s’oppose à ce l’acheteur d’un objet d’occasion soit subrogé dans les droits de l’acheteur initial pour exercer contre le commerçant qui a vendu l’objet neuf à ce dernier, une action fondée sur la garantie contractuelle, sur la garantie légale de conformité des articles L211-1 et suivants du code de la Consommation, et sur les vices cachés des articles 1641 et suivant du code civil ?

Merci de votre aide.

MessagePosté: Mar 09 Sep 2008 20:19
de Vanzo
La Cour de cassation considère que l'action en garantie (notamment des vices cachés) se transmet au sous-acquéreur de la chose.

MessagePosté: Mer 10 Sep 2008 12:19
de Camille
Bonjour,
Sachant que :
- la garantie de conformité ne peut être exercée que dans un court délai après l'acquisition du produit neuf, puisqu'elle est, par définition, distincte du vice caché parce que l'acheteur d'un produit neuf est censé vérifier rapidement que les performances de l'objet sont conformes au descriptif qui a été promis ;
- la garantie contractuelle, comme son nom l'indique, est une garantie librement consentie par le fabricant ou le vendeur du produit neuf, il peut donc y prévoir (presque) toutes les limitations de garantie qu'il veut ;
- comme le dit Vanzo, la garantie sur les vices cachés peut, en principe, s'exercer jusqu'à la "mise au riblon" de l'objet, c'est un expert qui déterminera s'il s'agit bien d'un vice caché et pas d'une usure normale ou d'un défaut de vieillesse, normal également. En principe aussi, elle s'excerce par le dernier acheteur contre son vendeur, libre à ce dernier de se retourner contre son propre vendeur.

Ne pas confondre avec des actions pour un défaut de fabrication récurrent sur un modèle bien précis d'une marque bien précise et "de notoriété publique", qu'on peut exercer directement auprès du fabricant, même en ayant acheté le produit d'occasion. Là, il s'agit plutôt, contrairement aux apparences, d'une procédure dite "à l'amiable", le fabricant acceptant "spontanément" de remplacer ou de dépanner l'objet / la pièce défectueuse à ses frais, pour préserver son image de marque.

MessagePosté: Mer 10 Sep 2008 14:35
de teamarena
Merci Vanzo. Disposez-vous des références du ou des arrêts concernés ?

Votre réponse est détaillée et je vous en remercie Camille.

Mais pour la garantie de conformité, les défauts apparaissant dans les 6 mois sont réputés exister à la délivrance. Il n’est pas rare qu’un produit soit revendu dans les 6 mois de son achat. Même après ce délai, le défaut de conformité peut toujours être prouvé à défaut d’être présumé. Que ce soit dans les 6 mois ou avant le délai de prescription de deux ans, le nouvel acheteur est-il subrogé dans les droits de l’acheteur initial pour cette garantie ?

Pour la garantie contractuelle, cela veut-il dire qu’elle s’applique d’emblée s’il n’y a pas expressément ce genre de limitation ?

Pour les vices cachés enfin, cela veut-il dire qu’un acheteur ne peut juridiquement exercer, sauf le cas particulier que vous avez prévu, un recours que contre son propre vendeur, et non pas contre le vendeur de ce dernier, notamment s’il est un distributeur officiel, ni contre le fabricant ?

MessagePosté: Mer 10 Sep 2008 19:29
de work46
Bonjour,
Le sous-acquéreur jouit de tous les droits qui appartenaient à son auteur, le vendeur intermédiaire, donc de l'action en garantie des vices cachés, Civ3, 7 mars1990.
Dans cette optique, lorsque le sous-acquéreur exerce son action contre le vendeur originaire, il exerce cette action à la place du vendeur intermédiaire, et les conditions de recevabilité de l'action sont appréciées au regard du vendeur intermédiaire, Civ1, 27janvier 1993.
Concernant les clauses de limitation de garantie des vices cachés:
Fondement art 1643 C civ
Possible, si le vendeur est un non professionel et en l'absence de mauvaise foi de ce dernier, connaissance du vice
Impossible, entre un vendeur professionnel et un acheteur non professionnel
Possible, entre deux profesionnels de même spécialité.
Cordialement

Re: garantie de conformité et acheteurs successifs

MessagePosté: Jeu 11 Sep 2008 0:41
de Mr_Tom
teamarena a écrit :Bonjour à tous,

Y a-t-il un texte qui s’oppose à ce l’acheteur d’un objet d’occasion soit subrogé dans les droits de l’acheteur initial pour exercer contre le commerçant qui a vendu l’objet neuf à ce dernier, une action fondée sur la garantie contractuelle, sur la garantie légale de conformité des articles L211-1 et suivants du code de la Consommation, et sur les vices cachés des articles 1641 et suivant du code civil ?

Merci de votre aide.


Bonjour,

Il me semble que votre question de départ est biaisée. Faisons un point sur la subrogation :
La subrogation suppose un paiement fait à la place d'autrui. Le solvens (celui qui a payé) est alors subrogé dans les droits de cet autrui vis-à-vis du tiers. Il "remplace" celui à la place de qui il a payé dans son rapport d'obligation avec ce tiers. La subrogation n'est possible que si elle est prévue par une clause contractuelle ou par un texte (cf. les hypothèses de l'article 1251 du code civil notamment).

Mais vous n'êtes pas dans une hypothèse de subrogation. Aucun paiement n'a été fait à la place d'autrui. La question est en réalité de savoir si un sous-acquéreur se voit transmettre l'action en responsabilité contractuelle de son auteur (l'acquéreur premier) contre le vendeur initial. Dans la négative, seule une action en responsabilité délictuelle serait possible contre le vendeur initial.
En l'espèce, il y a deux ventes successives, soit une chaîne formée de deux contrats translatifs de propriété. En ce genre d'hypothèses, il y a transmission de l'action en responsabilité contractuelle (contre le vendeur initial) de l'acquéreur premier à l'acquéreur second. L'action en responsabilité contractuelle est dite transmise propter rem au sous-acquéreur (civ 1ère, 9 Octobre 1979, Bull civ n°241).

Donc pour répondre à votre question, le sous-acquéreur peut agir en responsabilité contractuelle contre le vendeur initial en se se fondant sur la garantie des vices cachés, et autres garanties légales ou contractuelles. Mais ce résultat n'est pas obtenu en raisonnant sur le terrain de la subrogation. Enfin, il faut bien voir que ce n'est qu'une option et que le sous-acquéreur peut aussi choisir d'agir en responsabilité contractuelle contre son propre vendeur (toujours en se fondant sur les vices cachés et autres garanties légales ou contractuelles).

Une différence de taille cependant : si le sous-acquéreur agit contre son propre vendeur, c'est son contrat qui s'applique, avec ses éventuelles clauses limitatives de responsabilité. S'il agit contre le vendeur initial, alors c'est le contrat conclu entre son auteur et le veneur initial qui est applicable, toujours avec ses éventuelles clauses limitatives de responsabilité (car il prend la place de son auteur).

Bon, il est tard, mais c'est comme ça que je comprend votre problème.

MessagePosté: Jeu 11 Sep 2008 13:35
de teamarena
Merci beaucoup pour cette analyse très circonstanciée, et de m'avoir consécré votre temps. J’y vois maintenant plus clair. Je me suis effectivement mal exprimé dans ma question.

L’avantage d’agir contre le vendeur initial est de pouvoir agir au titre de la garantie légale de conformité et de la garantie contractuelle. Lorsque son propre vendeur est un particulier en effet, il n’y a que rarement une garantie contractuelle, et la garantie de conformité n’est pas applicable à un non professionnel.

MessagePosté: Ven 12 Sep 2008 9:11
de Camille
Bonjour,
La garantie contractuelle est accordée initialement par le constructeur, éventuellement doublée par une garantie accordée par le vendeur professionnel du produit neuf. Il arrive que des professionnels accordent une garantie (très limitée) pour des produits d'occasion en remplacement d'une garantie contractuelle originale arrivée à expiration. C'est souvent le cas des vendeurs de véhicules d'occasion.
Un particulier vendeur d'un matériel d'occasion accorde rarement une garantie personnelle, il n'a aucun intérêt à le faire. Il vend plutôt "en l'état" et "sans garantie". Ne restent plus alors que les garanties légales.

La garantie de conformité peut difficilement s'exercer à l'encontre d'un vendeur particulier puisqu'il ne peut pas être tenu pour directement responsable d'un performance prévue dans le descriptif mais non atteinte ou d'une non-conformité légale pour un matériel supposé en parfait état, sauf s'il a apporté une modification malheureuse qui a dégradé les performances ou rendu le véhicule non conforme. La garantie de conformité s'exerce sur des points évidents, donc décelables rapidement dès l'achat du produit neuf.
C'est le cas, par exemple, d'une machine qui, en ordre de marche, n'atteint pas la cadence prévue au cahier des charges ou dans les notices commerciales. On comprend bien que ce n'est pas deux ans plus tard que le client initial doit s'en rendre compte. A fortiori, que ce ne soit que le deuxième acheteur. A fortiori si le premier acheteur, devenu vendeur, informe son acheteur de cette particularité au moment de la revente. Ou a fortiori si le premier acheteur a déjà obtenu une remise du prix par le constructeur pour ce défaut de conformité...

MessagePosté: Ven 12 Sep 2008 10:19
de teamarena
Un particulier vendeur d'un matériel d'occasion accorde rarement une garantie personnelle, il n'a aucun intérêt à le faire. Il vend plutôt "en l'état" et "sans garantie".
Il est cependant tenu de garantir la chose vendue selon l’article 1603 du code civil, sauf convention contraire des parties. La vente « en l’état » ou « sans garantie » doit donc, à mon sens, être acceptée comme telle par l’acheteur.

La garantie de conformité peut difficilement s'exercer à l'encontre d'un vendeur particulier puisqu'il ne peut pas être tenu pour directement responsable d'un performance prévue dans le descriptif mais non atteinte ou d'une non-conformité légale pour un matériel supposé en parfait état, sauf s'il a apporté une modification malheureuse qui a dégradé les performances ou rendu le véhicule non conforme.
Ou simplement si c’est lui qui a indiqué les caractéristiques, dans une annonce par exemple, non seulement techniques mais aussi sur l’état de la chose. Si elle est annoncée « état neuf » et qu’elle a des traces d’usage, voire d’usure manifestes, ou en « parfait état » et que l’état n’est pas parfait, ou « en état de marche » alors qu’elle est en panne, je pense qu’il y a un défaut de conformité.

Je pense plutôt que c’est parce que la garantie légale de conformité ne vise que les vendeurs professionnels qu’elle ne s'applique pas aux particuliers. Par contre, je pense qu’elle pourrait s’appliquer à des vendeurs habituels, sur Ebay par exemple, même s’ils ne se sont pas déclarés comme vendeur professionnel, dès lors qu’ils réalisent de nombreuses ventes, surtout s’il s’agit d’objets neufs ou n’ayant pas été utilisés personnellement.

La garantie de conformité s'exerce sur des points évidents, donc décelables rapidement dès l'achat du produit neuf.
Pas nécessairement car l’acheteur ne vérifie pas forcément dès réception toutes les fonctionnalités. De même, rien n’oblige à utiliser un objet dès son achat. On achète parfois en prévision d’une utilisation ultérieure. D’ailleurs, le législateur a prévu que tous les défauts de conformités qui appararaissent dans les 6 moi sont réputés exister à la délivrance. C’est déjà un délai assez long.

A fortiori, que ce ne soit que le deuxième acheteur.
Le premier acheteur a pu ne jamais utiliser l’objet ou ne pas utiliser toutes les fonctionnalités, ou simplement a pu renoncer à un recours pour non-conformité.

MessagePosté: Ven 12 Sep 2008 16:34
de work46
Bonjour,
L'acheteur ne peut renoncer à la garantie de conformité qu'après avoir formulé une réclamation à son vendeur( le vendeur initial), donc après avoir découvert que l'objet de la vente n'était pas conforme, L211-17.
Dans cette hypothèse, le sous acquéreur, "ignorant," de cet accord et de l'existence du problème de non conformité de l'objet, serait fondé à agir sur le terrain du dol contre son propre vendeur.