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MessagePosté: Jeu 07 Oct 2004 12:43
de Laurent binet
le raisonnement d'un JLD est assez simple en la matière:

A t'on affaire à

1. une personne sans histoire, qu'on est sur de trouver à la disposition de la justice et qui a pu être l'auteur d'un accident de la circulation mortel sans que puisse lui être reproché un comportement délibérement contraire au code de la route.

2. a un individu déjà connu de la justice pour de la délinquance routière, ou qui circulait en violation manifeste des dispositions du code de la route (sans assurance, sans permis, sous le coup d'une suspension, en CEA ou qui cumule).

Le débat devant le JLD porte principalement autour des garanties de représentation de la personne mise en examen et de la gravité des faits.

La notion de trouble à l'ordre public est à mon sens un fourre tout que le parquet utlise parfois à défaut d'autre chose. Car par principe dès lors qu'une infraction est commise il y a trouble à l'ordre public.

Pour prendre un exemple récent que j'ai eu à traiter, le conducteur a fauché un piéton sur un passage protégé (de facon totalement involontaire, aveuglé par le soleil) mais, il était sous le coup d'une suspension de permis, donc n'était pas régulièrement assuré, a menti son passager ayant prétendu être le conducteur et il était déjà bien connu de la justice. Ajoutez qu'il était sans emploi et vous comprendrez que le débat JLD n'a été qu'une formalité :)

Cela dit, au bout de quatre mois, il était libre et il conduisait puisque sa suspension de permis s'est terminée pendant sa détention alors que l'instruction du dossier d'homicide involontaire n'était pas terminée :/

Quant à savoir si le placement est fréquent, je constate pour ma part que les accidents mortels de ce type sont vus avec plus de sévérité par les juges qu'ils ne l'étaient il y a quelques années. C'est peut-être aussi dans l'air du temps.

Re: Accident de la route - Détention Provisoire

MessagePosté: Mar 03 Juil 2018 11:10
de Mahabama
Bonjour,

Je vois que ce sujet est plutôt ancien (14 ans, tout de même) et mérite une petite mise à jour. En effet, l'article 144 du code de procédure pénale définissant les motifs justifiant un placement en détention provisoire a connu plusieurs modifications depuis 2004.

Ainsi, quand alors le 3° de l'article 144 prévoyait que la détention provisoire soit possible si elle constituait l'unique moyen "de mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé, depuis 2007 cet alinéa n'est plus invocable en matière correctionnelle. Ainsi, l'auteur présumé d'un homicide involontaire par conducteur, fut-il sous l'empire d'un état alcoolique (qui demeure donc un délit), ne peut être placé en détention provisoire afin de mettre fin au trouble à l'ordre public.

Demeurent donc les motifs suivants :
- Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ;
- Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;
- Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices ;
- Protéger la personne mise en examen ;
- Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ;
- Mettre fin à l'infraction ou prévenir son renouvellement.

L'on voit donc que la décision de recourir à la détention provisoire dépendra avant tout de la personnalité du mis en cause (garanties de représentation, antécédents judiciaires, voire fragilité psychologique pouvant résulter de l'accident).