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Preuve d'une faute

MessagePosté: Mar 05 Juil 2011 16:20
de nocpitaloc
Bonjour à tous!
Je sollicite votre aide pour aider une amie.
Son problème : elle a emmené une montre chez un bijoutier afin d’y faire changer la pile. A la restitution, elle s’aperçoit qu’une aiguille de la montre a été endommagée. Le bijoutier refuse de prendre en charge les réparations partant du principe que la montre était abîmée antérieurement.
J’hésite entre deux fondements juridiques, sans toutefois savoir s’ils sont en soi pertinents :
- Soit agir sur le fondement de l’article 1147 code civil pour mauvaise exécution du contrat. Ce qui me gêne c’est que l’obligation principale était le changement de la pile, les obligations du contrat sont donc remplies. Par ailleurs, je présume que c’est à mon amie de prouver la mauvaise exécution du contrat, et ça ne m’arrange pas car la preuve est impossible à rapporter ;-)
- Soit agir sur l’article 1933 du code civil « Le dépositaire n'est tenu de rendre la chose déposée que dans l'état où elle se trouve au moment de la restitution. Les détériorations qui ne sont pas survenues par son fait sont à la charge du déposant. » En gros, partir du principe que le contrat de dépôt est accessoire au contrat principal, et que le bijoutier en tant que dépositaire a manqué à ses obligations. Sachant que là, la cour de cassation nous dit que « si le dépositaire n'est tenu que d'une obligation de moyens, il lui incombe, en cas de perte ou détérioration de la chose déposée, de prouver qu'il y est étranger ».
Maintenant, je ne sais pas s’il n’y aurait pas des fondements plus pertinents, ou si simplement mon raisonnement tient un minimum la route !
Je compte sur vos avis de juristes éclairés et merci d’avance pour vos réponses !

Re: Preuve d'une faute

MessagePosté: Mar 05 Juil 2011 20:46
de Camille
Bonsoir,
A mon humble avis, dans les deux cas, vous allez vous heurter au problème de la preuve que la détérioration s'est bien produite dans l'officine et pas avant. D'autant que normalement, pour changer une pile, il suffit d'ouvrir le couvercle arrière sans avoir à sortir le mécanisme, donc normalement toujours, sans risque potentiel pour une aiguille.
Ou alors elle est vraiment si fragile… cette Relox ? 8)

Re: Preuve d'une faute

MessagePosté: Mar 05 Juil 2011 22:37
de nocpitaloc
La montre n'est pas si fragile mais le bijoutier est bien une brel: sans rentrer dans les détails il a effectivement fait une boulette en changeant la pile.
Question preuve justement, ce ne serait pas au professionnel de prouver qu'il n'a fait aucune erreur? En fait, ça me semble absurde de déposer par exemple ma voiture au garagiste pour une vidange et la retrouver entièrement rayée, en ayant à prouver que ma voiture était nickel quand je l'avais apportée...si c'est le cas, je ferais un état des lieux assez précis de tout ce que je laisse derrière moi :lol:
Vous n'êtes pas convaincu par mon histoire de dépôt? :?

Re: Preuve d'une faute

MessagePosté: Mer 06 Juil 2011 8:59
de franck
Bonjour,

Pour le problème de preuve, selon moi, il s'agit effectivement au bijoutier de prouver que l'aiguille était abimée dès l'origine car votre amie n'a pas à rapporter de preuve négative, qui par définition sont impossible à rapporter.

C'est au bijoutier de rapporter la preuve de ce défaut dès la remise en réparation, par exemple en le mentionnant sur le bulletin de preuve du dépôt, ce qu'il n'a pas fait ce qui prouve que la montre était en parfait état lors de la remise.

J'utiliserai également1147 et 1933 du code civil, soit concomitamment, soit 1933 en principal et 1147 en subsidiaire.

Re: Preuve d'une faute

MessagePosté: Mer 06 Juil 2011 10:01
de classicus
Bonjour,
A mon très humble et misérable avis 8) ce genre de cas illustre la difficulté d'application du droit aux faits de la vie de tous les jours.
La preuve sera difficile à apporter pour la cliente: elle, comme le réparateur, n'ont pas constaté l'état de "santé" de la montre avant toute intervention, en conséquence il me semble difficile de les départager.
Le droit s'adapte aux faits et vice versa (en principe): effectivement le changement d'une pile se fait par le couvercle arrière de l'objet, donc sans intervention sur la face "avant" côté aiguilles....
Les développements juridiques que j'ai lu sont intellectuellement intéressants mais quelle est leur portée pragmatique ? La cliente va-t-elle s'engager dans une procédure ? Laquelle ? Devant qui ? Pour quel montant ? Une pile coûte entre 5 - 10 euros. Coût en euro, énergie et temps pour une action fondée juridiquement portant sur la réparation d'une aiguille de montre ?
Je suggère à cette personne de se renseigner sur le coût du remplacement de ces aiguilles avant d'utiliser les articles cités...
Si la montre est "de prix" voici un autre "conseil": dorénavant s'adresser aux spécialistes revendeurs de la marque forcément de prestige.... :wink:

Re: Preuve d'une faute

MessagePosté: Mer 06 Juil 2011 10:06
de Camille
Bonjour,
nocpitaloc a écrit :En fait, ça me semble absurde de déposer par exemple ma voiture au garagiste pour une vidange et la retrouver entièrement rayée, en ayant à prouver que ma voiture était nickel quand je l'avais apportée...

Donc, si je comprends bien, je peux déposer ma voiture toute rayée chez un garagiste pour une vidange et dire ensuite que c'est chez lui que ça s'est passé ?
Intéressant... :ange:

Au fait, apparemment, les hôteliers sont aussi considérés comme "dépositaires" des affaires qu'on dépose dans sa chambre. Là aussi, c'est à eux à faire la preuve que, si détériorations des affaires il y a, elles étaient antérieures à leur arrivée dans la chambre ?

Au passage...
Code civil a écrit :Article 1933
Le dépositaire n'est tenu de rendre la chose déposée que dans l'état où elle se trouve au moment de la restitution.

"Au moment de la restitution", pas "au moment du dépôt"...

Re: Preuve d'une faute

MessagePosté: Mer 06 Juil 2011 13:50
de aiki
Juste un détail qui n'a rien de juridique : les montres C...O doivent être renvoyées dans une usine de la marque pour le changement de pile sinon, pas de mise à l'heure automatique

Fin du HS :wink:

Re: Preuve d'une faute

MessagePosté: Mer 06 Juil 2011 15:26
de Camille
Bjr,
Sans parler de marques où on ferait mieux de jeter la montre et de garder la pile...

Bon, bon, je :arrow: :arrow: :arrow: :arrow:

Re: Preuve d'une faute

MessagePosté: Mer 06 Juil 2011 18:03
de nocpitaloc
Merci à vous tous!! Bon le remplacement des aiguilles est de 55€ donc évidemment il y a peu de chance pour qu'il y ait une procédure derrière. Mais un petit courrier recommandé argumenté juridiquement pourrait faire pencher la balance (en plus de la menace (ou de l'exécution) d'un petit scandale en magasin, si possible aux heures de pointes :lol: )
Merci Camille de m'avoir beaucoup fait rire simplement en renversant mon argumentation! Le brainstorming a du bon même si j'avoue être un peu vexée lol -)
Le dépositaire n'est tenu de rendre la chose déposée que dans l'état où elle se trouve au moment de la restitution : bien d'accord mais si le dépositaire n'est tenu que d'une obligation de moyens, il lui incombe, en cas de détérioration de la chose déposée, de prouver qu'il y est étranger ... et c'est évidemment ça qui m'intéresse!!
De plus, nous avons affaire à un professionnel face à un consommateur : donc je ne trouve pas trop délirant de faire peser la charge d'une telle preuve sur le professionnel, et de l'obliger en pratique à davantage de diligence lors de la remise d'un bien quelconque...Malheureusement, je n'ai rien trouvé de concret pouvant m'aider à ce sujet dans le code de la consommation... :cry:

Re: Preuve d'une faute

MessagePosté: Mer 06 Juil 2011 21:09
de Camille
Bonsoir,
nocpitaloc a écrit :si le dépositaire n'est tenu que d'une obligation de moyens, il lui incombe, en cas de détérioration de la chose déposée, de prouver qu'il y est étranger ... et c'est évidemment ça qui m'intéresse!!

Ce n'est pas clairement ce que dit la fin de l'article. Ni ceux qui tournent autour de celui-là. Votre amie aurait d'abord à faire la preuve qu'en entrant dans le magasin, les aiguilles étaient "nickel-chrome". A partir de là, ce serait alors au commerçant à faire la preuve qu'il n'y est pour rien.

nocpitaloc a écrit :Mais un petit courrier recommandé argumenté juridiquement pourrait faire pencher la balance (en plus de la menace (ou de l'exécution) d'un petit scandale en magasin, si possible aux heures de pointes :lol: )


Oui mais là, attention, vous n'êtes pas (pas encore) dans le cadre d'une procédure judiciaire, mais dans le cadre d'une procédure préalable dite "à l'amiable", ce qui – je le rappelle – ne veut pas du tout dire "amicale"…
Donc, à ce stade, vous pouvez développer tous les arguments qui vous arrangent sans trop de risques, hors injures et diffamations naturellement…
lol -)