Cabinets internationaux: une classe qui n'aime pas la roture

Je suis un avocat de 38 ans ayant une expérience de 8 années dans de petites structures en province. J’ai traité de matières variées : droit commercial, droit des contrats, droit de la construction, droit social, droit des transports et assurances etc…
Souhaitant une nouvelle orientation pour ma carrière, je décide en 2010 d’effectuer un LLM au Royaume-Unis. Mon but étant, à l’issue du LLM, d’intégrer un cabinet international ou un cabinet d’affaires français et d’acquérir une nouvelle expérience dans les matières étudiées au cours du LLM, telles que Corporate, M&A ou arbitrage. Etant précisé ici que j’étais tout à fait disposé à être traité en débutant. Le socle de connaissances nouvellement acquis combiné à une expérience pratique de la matière juridique me rendaient très optimiste quant à mes chances de succès.
Hélas ! Alors que je poursuivais mon LLM j’ai vite compris que ma volonté de réorientation au sein de la profession serait vaine. La vérité est qu’aujourd’hui un avocat ayant 8 années d’expérience, parlant anglais, ayant des compétences certaines et un socle de connaissance en corporate, finance et arbitrage ne peut envisager un seul instant une réorientation et un nouveau départ. Cette réalité est autant absurde que choquante. Tant les cabinets internationaux, ceux-là même qui se piquent de diversité, que les cabinets plus modestes sont absolument intransigeants et font obstruction à toute personne qui n’est pas vierge d’une expérience différente. Le résultat est que je me vois refuser tout espoir d’embauche non pour des raisons de compétences mais en raison de mon âge et de mon expérience passée, perçue non comme un atout potentiel mais comme une infirmité.
Depuis plusieurs mois j’essaie de comprendre les raisons d’une telle intransigeance. Je n’attache aucun crédit à l’argument selon lequel le mode de fonctionnement de ces cabinets serait tellement spécifique qu’il empêcherait toute possibilité d’adaptation pour qui viendrait d’un environnement extérieur et différent. Je veux bien croire qu’il y ait une spécificité des cabinet d’affaires, mais cela est-il insurmontable pour une personne de 38 ans, normalement pourvue de bon sens et de capacité d’adaptation ? Evidemment non…
Je crois que l’ensemble des professionnels de ces cabinets est persuadé de faire partie d’une classe à part, d’une caste, d’une coterie, d’une espèce d’élite du droit. L’analogie avec l’aristocratie est frappante. Tout comme la noblesse s’acquérait par la naissance, la possibilité d’évoluer dans ces cabinets n’est possible qu’à condition d’y avoir débuté sa carrière (généralement par le stage). Seuls ceux dont l’accouchement professionnel s’est effectué au sein des cabinets internationaux se verront donner le droit de faire partie de cette classe et d’évoluer en son sein : de stagiaires à collaborateurs junior puis sénior et enfin associés. Malheur à celui qui, au lieu de naître dans un château, naît dans une chambre de bonne ou dans une grange. Pour celui-ci il est déjà trop tard, malgré ses qualités et ses efforts. Si tous les chemins mènent à Rome, un seul et unique permet l’accès à ces cabinets, ce qui laisse songeur quant à leur vision du monde et des hommes.
En septembre 2011, j’ai réussi, grâce à une personne des RH d’un cabinet international, à avoir un entretien avec l’ensemble des associés du département Corporate. Ils ont finalement décidé de ne pas me prendre au motif que mon profil « constituait un risque pour eux » (sic).
Je cherche encore aujourd’hui en quoi mon profil constitue un risque différent du risque normal qu’implique tout recrutement. Ne voulant voir que ce qu’ils pourraient perdre et non ce qu’ils pourraient gagner à embaucher un profil différent et non formaté comme le mien, ces cabinets se privent de diversité, de points de vue différents et certainement d’une plus value au quotidien. Plus profondément, le prétendu risque que constituerait un profil comme le mien masque mal les vrais motifs de l’intransigeance des cabinets d’affaire : un mépris certain pour une expérience acquise dans de petites structures en province, une peur de la différence et un manque de courage.
Cela est triste. Pour moi. Pour eux.
Souhaitant une nouvelle orientation pour ma carrière, je décide en 2010 d’effectuer un LLM au Royaume-Unis. Mon but étant, à l’issue du LLM, d’intégrer un cabinet international ou un cabinet d’affaires français et d’acquérir une nouvelle expérience dans les matières étudiées au cours du LLM, telles que Corporate, M&A ou arbitrage. Etant précisé ici que j’étais tout à fait disposé à être traité en débutant. Le socle de connaissances nouvellement acquis combiné à une expérience pratique de la matière juridique me rendaient très optimiste quant à mes chances de succès.
Hélas ! Alors que je poursuivais mon LLM j’ai vite compris que ma volonté de réorientation au sein de la profession serait vaine. La vérité est qu’aujourd’hui un avocat ayant 8 années d’expérience, parlant anglais, ayant des compétences certaines et un socle de connaissance en corporate, finance et arbitrage ne peut envisager un seul instant une réorientation et un nouveau départ. Cette réalité est autant absurde que choquante. Tant les cabinets internationaux, ceux-là même qui se piquent de diversité, que les cabinets plus modestes sont absolument intransigeants et font obstruction à toute personne qui n’est pas vierge d’une expérience différente. Le résultat est que je me vois refuser tout espoir d’embauche non pour des raisons de compétences mais en raison de mon âge et de mon expérience passée, perçue non comme un atout potentiel mais comme une infirmité.
Depuis plusieurs mois j’essaie de comprendre les raisons d’une telle intransigeance. Je n’attache aucun crédit à l’argument selon lequel le mode de fonctionnement de ces cabinets serait tellement spécifique qu’il empêcherait toute possibilité d’adaptation pour qui viendrait d’un environnement extérieur et différent. Je veux bien croire qu’il y ait une spécificité des cabinet d’affaires, mais cela est-il insurmontable pour une personne de 38 ans, normalement pourvue de bon sens et de capacité d’adaptation ? Evidemment non…
Je crois que l’ensemble des professionnels de ces cabinets est persuadé de faire partie d’une classe à part, d’une caste, d’une coterie, d’une espèce d’élite du droit. L’analogie avec l’aristocratie est frappante. Tout comme la noblesse s’acquérait par la naissance, la possibilité d’évoluer dans ces cabinets n’est possible qu’à condition d’y avoir débuté sa carrière (généralement par le stage). Seuls ceux dont l’accouchement professionnel s’est effectué au sein des cabinets internationaux se verront donner le droit de faire partie de cette classe et d’évoluer en son sein : de stagiaires à collaborateurs junior puis sénior et enfin associés. Malheur à celui qui, au lieu de naître dans un château, naît dans une chambre de bonne ou dans une grange. Pour celui-ci il est déjà trop tard, malgré ses qualités et ses efforts. Si tous les chemins mènent à Rome, un seul et unique permet l’accès à ces cabinets, ce qui laisse songeur quant à leur vision du monde et des hommes.
En septembre 2011, j’ai réussi, grâce à une personne des RH d’un cabinet international, à avoir un entretien avec l’ensemble des associés du département Corporate. Ils ont finalement décidé de ne pas me prendre au motif que mon profil « constituait un risque pour eux » (sic).
Je cherche encore aujourd’hui en quoi mon profil constitue un risque différent du risque normal qu’implique tout recrutement. Ne voulant voir que ce qu’ils pourraient perdre et non ce qu’ils pourraient gagner à embaucher un profil différent et non formaté comme le mien, ces cabinets se privent de diversité, de points de vue différents et certainement d’une plus value au quotidien. Plus profondément, le prétendu risque que constituerait un profil comme le mien masque mal les vrais motifs de l’intransigeance des cabinets d’affaire : un mépris certain pour une expérience acquise dans de petites structures en province, une peur de la différence et un manque de courage.
Cela est triste. Pour moi. Pour eux.