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COP 21 et suivantes, l’action des professionnels du Droit continue.
Parution : lundi 15 mai 2017
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Du 30 novembre au 11 décembre 2015, la France accueillait la COP 21 [1] qui a abouti au premier accord universel pour lutter contre le réchauffement climatique.
Durant cet événement d’envergure, les enseignants-chercheurs, magistrats, avocats, juristes, les professionnels du droit ont organisé des actions et ont fait valoir leurs propositions pour l’extension d’un droit de l’environnement national et international moins lacunaire et plus contraignant.
Et leur investissement en la matière ne faiblit pas ! Comme nous le montre la Société de législation comparée qui a organisé le 31 mai 2017 un Forum sur la mise en oeuvre de l’accord de Paris sur le climat. Autre exemple de cet investissement des professionnels du Droit, le projet du Pacte mondial pour l’environnement : Agir pour la planète, agir par le Droit. Projet d’envergure internationale.

Considéré à partir du XXème siècle comme un domaine du droit international, le droit de l’environnement s’est notamment développé à partir des années 1970. C’est un droit complexe et technique qui traite de situations locales et internationales.
De part l’évolution des sociétés et de leurs impacts, des enjeux écologiques actuels, ce domaine du droit est en constante évolution et expansion.
Cependant, on peut constater qu’en France le droit de l’environnement est quelque peu marginalisé (par exemple, il n’existe pas de juge de l’environnement comme il existe un juge aux affaires familiales...). Il faut attendre 2005 pour que la protection de l’environnement soit reconnue comme un droit constitutionnel (Charte de l’environnement 2004).

Face aux enjeux écologiques majeurs, la société française prend (enfin) conscience de l’importance de l’environnement et donc du droit qui y réfère.

Et les professionnels du droit dans tout ça ?

Bon nombre d’entre-eux se soucient depuis longtemps de l’importance d’avoir un droit de l’environnement fort et contraignant que ce soit au niveau national ou international. Rappelons par exemple que le 21 avril 2015, le ministère de la Justice a publié une circulaire de politique pénale relative au droit de l’environnement. Cette circulaire a pour objectif d’améliorer et de renforcer la lutte contre les atteintes à l’environnement (par exemple avec la mise en place d’un magistrat référent et un renforcement de la collaboration de la Justice avec les administrations déconcentrées et les établissements publics en charge des polices de l’environnement).

Cette mobilisation se poursuit et les professionnels du Droit restent vigilants à ce que les avancées réalisées lors de la COP 21 continuent, comme l’atteste le "Forum sur la mise en oeuvre de l’accord de Paris sur le climat : Quelles attentes à l’égard de la communauté juridique ?" du 31 mai 2017.

Ce forum était organisé par la section Climat, Ressources naturelles et Energie de la Société de législation comparée [2] avec le soutien de la Cour de cassation et sous le haut-patronage de Monsieur Laurent Fabius, président du Conseil constitutionnel.

Le forum réunissait les membres de la communauté juridique française (juges, professeurs, avocats, juristes, étudiants) autour des différents acteurs de la mise en oeuvre de l’Accord de Paris sur le climat afin de favoriser une prise de conscience du rôle et de la responsabilité de la communauté juridique dans son ensemble dans la lutte contre le réchauffement climatique.

L’objectif étant d’envisager de nouveaux axes de recherche pour le droit ainsi que de nouvelles actions conjointes pour la communauté juridique avec le secteur privé, le secteur public et la société civile.

Autre action d’envergure internationale, le projet du Pacte mondial pour l’environnement : Agir pour la planète, agir par le Droit, mené par des professionnels du Droit, des hommes et femmes politiques, des climatologues, des ONG...
Le texte du Pacte mondial pour l’environnement, issu de la concertation de l’ensemble de ces hommes et femmes investis dans la protection de l’environnement a été présenté pour la première fois le 24 juin 2017 à Paris lors d’un colloque au sein de la Sorbonne.
Seconde étape du projet, présentation du projet de Pacte mondial pour l’environnement le 20 septembre 2017 à l’Université de Columbia à New York. Le CCSI et le Sustainable Development Solutions Network de l’ONU, sous l’égide de M. Laurent Fabius, Président du Conseil Constitutionnel, Président de la COP 21 et du Professeur Jeffrey Sachs, conseiller spécial du Secrétaire Général de l’ONU sur les objectifs de développement durable, débattront des avancées du texte.

Rappel des actions menées en 2015 par les professionnels du Droit lors de la COP 21 :

Lors de la COP 21 de 2015, certains professionnels du Droit ont présenté des propositions de textes innovants et plus contraignants en matière de justice environnementale pour contrer l’inertie politique face au réchauffement climatique (1). D’autres ont conduit des actions de partage de la connaissance juridique en droit de l’environnement au sein de la COP 21 ou en périphérie, que ce soit sous forme de rencontres-débats, de formations, de conférences...(2).
Voici quelques exemples (listes non exhaustive) de cette mobilisation.

1. Des propositions de textes pour renforcer le droit de l’environnement :

La commission Environnement du club des juristes, présidé par Yann Aguila, avocat, a travaillé sur le thème de la valeur contraignante des traités internationaux et propose un rapport pour « Renforcer l’efficacité du droit international de l’environnement – Devoirs des Etats, droits des individus ».
Dans ce rapport les experts de la commission environnementale du CDJ proposent que la société civile agisse et ils préconisent ainsi trois types de garanties :
- les garanties procédurales : avec l’institution d’une initiative citoyenne mondiale par laquelle les citoyens pourraient faire pression sur les Etats pour les inciter à adopter des accords ambitieux.
- Les garanties juridictionnelles : avec un renforcement des mécanismes de sanction, avec la création d’un droit d’intervention devant la Cour internationale de justice par exemple.
- les garanties textuelles : avec l’adoption d’un Pacte international sur la protection de l’environnement qui viendrait renforcer les deux pactes internationaux du 16 décembre 1966 [3].


Un groupe de juristes représentant différentes disciplines juridiques et dirigé par Mathilde Hautereau-Boutonnet [4] ont constitué un groupe de réflexion sur la façon dont le droit peut concrètement contribuer à orienter nos sociétés vers la transition énergétique, à favoriser la mise en œuvre des mesures d’atténuation et d’adaptation au changement climatique et à garantir un droit de l’homme à bénéficier d’un climat favorable aux conditions de vie de l’humanité. Le fruit de cette réflexion a été publié par les éditions Dalloz : "Propositions pour un droit au secours du climat".
Ce groupe de réflexion portait quatre propositions :
- renforcer la gouvernance climatique internationale,
- renforcer les mesures de lutte contre le changement climatique des États et des entreprises,
- promouvoir le financement des politiques climatiques,
- reconnaître le principe de responsabilité climatique.


2. Des actions de partage de la connaissance juridique du droit de l’environnement :

Thibault Turchet, juriste spécialisé en droit de l’environnement est l’auteur d’un blog militant en droit de l’environnement. Pour lui, "il ne fait pas de doute que la « communauté » des juristes compte de plus en plus de militants pour l’environnement."
Conscient de son rôle auprès de ses concitoyens en tant que juriste maîtrisant ce domaine du droit, il avait mis en place une caravane du droit qui sillonnait la France pour rencontrer un maximum d’associations locales afin de les aider dans leurs démarches juridiques sur la question des déchets et leur réduction. Il a pour volonté "un partage altruiste et utile de la connaissance juridique" (lire son interview ici).


Arnaud Gossement, avocat, participait au "Tour de France de la transition énergétique en entreprise pour le climat" organisé notamment par l’Assemblée des Chambres de commerce et d’industrie (CCI France). L’objectif de ces conférences étant de sensibiliser les chefs d’entreprises aux enjeux du climat et de la transition énergétique et d’illustrer les solutions pour agir.


Le cabinet d’avocats DS Avocats en partenariat avec la société Socotec, était présent au sein du salon Solutions de la COP 21 et y a organisé deux conférences. Cette action avait pour objectif de donner aux entreprises la possibilité d’accéder à une vision intégrée technico-réglementaire et juridique.


Le cabinet d’avocats Norton Rose Fulbright, proposait d’apporter son expertise et un éclairage sur les différents débats tout au long de la COP21 par le biais de son Microsite COP 21. le cabinet a également organisé des conférences et des webinar (séminaires via internet).


Conclusion...

Les professionnels du droit sont des acteurs importants de la société civile. Comme nous le montrent les exemples cités dans cet article, en intervenant auprès des entreprises et des associations, en proposant des conférences, des formations... ils ont un rôle d’incitateur.
Le partage de leur culture juridique, leur implication professionnelle par la rédaction de textes contraignants représentent un atout pour la protection de l’environnement car, ils donnent ainsi à leurs concitoyens des outils de compréhension, d’actions et de contraintes pour que les équipes dirigeantes respectent leurs engagements en matière d’environnement.

Il n’est jamais trop tard (il y aura d’autres COP...), juristes, avocats... mobilisez-vous !

A lire aussi :
Les enjeux juridiques de la COP 21 : article LJA.
Des juristes français s’engagent pour le climat : article Télérama

Marie Rédaction du Village de la Justice.

[1Rappelons que l’enjeu principal de la COP 21 est de trouver un accord pour contenir le réchauffement climatique en deçà de 2°C.

[2Association reconnue d’utilité publique, fondée en 1869, la Société de législation comparée regroupe des universitaires, magistrats, avocats, notaires et juristes d’entreprises, français et étrangers.
Elle organise des colloques internationaux en France et à l’étranger, sur des sujets d’actualité.

[3Le 16 décembre 1966, l’Assemblée Générale des Nations Unies adopte deux pactes dans sa résolution 2200 A (XXI) : le Pacte international sur les droits civils et politiques (PIDCP) et le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC). Ces deux pactes viennent compléter et renforcer la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948.

[4Mathilde Hautereau-Boutonnet est maître de conférence à l’Université d’Aix-Marseille. Elle est en charge de la Chaire CNRS de Droit de l’Environnement : Quel droit face au changement climatique ?

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