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Signature d’une rupture conventionnelle durant la période de pandémie de Coronavirus ? Par Gauthier Chevalier, Avocat.
Parution : mardi 24 mars 2020
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De nombreuses personnes se demandent si :
- elles peuvent signer une rupture conventionnelle malgré la période de confinement ; et
- la pandémie peut avoir une conséquence sur la rupture conventionnelle antérieurement signée et non encore homologuée ?
Article actualisé par son auteur le 27 avril 2020 [1].
Article vérifié par l’auteur en septembre 2023.

I) Qu’est-ce qu’une rupture conventionnelle ?

La rupture conventionnelle est un mode de rupture du contrat de travail dit amiable. Autrement dit, l’employeur et le salarié souhaitent tous deux rompre le contrat de travail.

Elle permet à l’employeur et au salarié de trouver une solution rapide et efficace, évitant aux deux parties des procédures judiciaires longues et coûteuses, et évitant au salarié de se retrouver dans l’obligation de démissionner et de perdre en partie ses droits au chômage [2].

L’article L1237-11 du code du travail définit la rupture conventionnelle comme suivant : « L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie.
La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties.
Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties
 ».

II) Rupture conventionnelle et Covid-19.

a) Puis-je signer une rupture conventionnelle durant la période de confinement du Covid-19 ?

Juridiquement, il n’existe aucune restriction quant à la signature d’une rupture conventionnelle durant cette période délicate pour tous.

Les principales précautions à prendre sont sanitaires, avec l’organisation d’un entretien préalable par vidéoconférence, ainsi que l’organisation, en évitant tout risque, du rendez-vous de signature de la rupture conventionnelle.

Les parties peuvent convenir d’opter pour le chômage partiel dans un premier temps, afin d’attendre la fin du confinement pour signer, en personne, la rupture conventionnelle. Cela permettrait de respecter le confinement sans faire peser un poids supplémentaire sur l’entreprise, et sans léser le salarié.

b) La pandémie de coronavirus influence-t-elle l’homologation de ma rupture conventionnelle ?

Votre employeur a déjà transmis à l’administration (la Direccte) votre demande de rupture conventionnelle, et vous vous interrogez sur l’incidence de la pandémie actuelle ?

Si la signature de la rupture conventionnelle reste possible, une attention doit être portée sur le délai d’homologation.

Ainsi, si le délai d’homologation devait expirer avant le 12 mars 2020, la rupture conventionnelle est considérée comme homologuée.

Si le délai d’homologation n’a pas expiré au 12 mars 2020, il est alors suspendu, et reprendra un mois suivant le terme de l’état d’urgence sanitaire.

S’agissant des ruptures conventionnelles non-encore transmises à la Direccte, le point de départ du délai d’homologation sera reporté au jour suivant le délai d’un mois suivant le terme de l’état d’urgence sanitaire (fin de l’état sanitaire + un mois = point de départ du délai de 15 jours).

Le coronavirus n’impactera donc pas, en lui-même, la signature de la rupture conventionnelle, mais retardera son l’homologation.

Attention, certaines Direccte affirment être en mesure de procéder à l’homologation des ruptures conventionnelles transmises de préférence par internet, via le site : https://www.telerc.travail.gouv.fr.

Au regard de la difficile lecture de la politique gouvernementale, nous vous invitons à : 
1) Transmettre vos rupture conventionnelle via le portail suivant : https://www.telerc.travail.gouv.fr

2) Essayer de télécharger, au terme du délai d’homologation, le certificat d’homologation sur le site de la Direccte. Seul ce certificat permettra de vous assurer de la bonne homologation de votre rupture conventionnelle.
En l’absence de tout certificat, contactez la Direccte afin que cette dernière vous confirme la suspension du délai d’homologation.

Selon les éditions législatives, dans une brève de sa revue ActuEL RH du 8 avril 2020, le Gouvernement penserait à publier une disposition spécifique permettant le maintien des homologations des ruptures conventionnelles, autrement dit permettant de déroger à l’ordonnance n°2020-306, et ce dans le courant de la semaine prochaine, sous réserve des "arbitrages définitifs". La suspension des homologations n’aurait donc pas été initialement anticipée et voulue par le Gouvernement. À suivre.

Par une ordonnance du 15 avril 2020 (2020-427), le gouvernement est venu préciser la réglementation applicable aux ruptures conventionnelles durant cette période exceptionnelle (la réglementation découle de l’ordonnance du 25 mars 2020, n°2020-306).
Le délai de rétractation n’est pas impacté. Vous pouvez donc signer votre rupture conventionnelle et faire courir le délai de rétractation. L’article 2 de l’ordonnance du 15 avril précise cela : 
« Le présent article n’est pas applicable aux délais de réflexion, de rétractation ou de renonciation prévus par la loi ou le règlement ».

Le délai de rétraction est uniquement suspendu pour les personnes travaillant dans la fonction publique.
L’homologation, elle, reste pour le moment suspendue. Le gouvernement n’est donc pas encore revenu sur la suspension de l’homologation. Pour autant, et comme précisé, certaines Direccte continuent d’homologuer (Marseille, Hauts-de-Seine). La Direccte 75 (Paris) semble pour le moment avoir suspendu ses homologations.

Attention, le Gouvernement viendra éventuellement, par décret, exclure le délai d’homologation du champ d’application de cette ordonnance dans les prochains jours. Affaire à suivre.

Fin de la suspension des homologations ! Par un décret n°2020-471 du 24 avril 2020, le gouvernement est (Enfin) venu mettre fin à la suspension des homologations des ruptures conventionnelles. Les délais d’homologation qui avaient été suspendus à partir du 12 mars 2020 reprennent à partir du 26 avril 2020. Le délai ne repart pas à zéro, il reprend dans la situation dans laquelle il se trouvait au 12 mars 2020.

c) Comment se préparer pour « l’après-pandémie » ?

La sortie de la crise sanitaire, que l’on espère la plus protectrice possible, aura indéniablement des conséquences sur l’activité économique des sociétés.

Certaines fermeront, d’autres procéderont à des plans de licenciements économiques ou de départs volontaires, et d’autres rechercheront une solution plus adaptée à la taille ou au besoin, laquelle pourra être la rupture conventionnelle.

Les salariés doivent se préparer à l’éventualité d’une rupture du contrat de travail, et doivent, à ce titre, se protéger et se renseigner sur la rupture conventionnelle, et notamment :
- Sa fiscalité : Comment est imposée l’indemnité de rupture conventionnelle ? Par Gauthier Chevalier, Avocat.,
- Ses avantages et sa procédure : La rupture conventionnelle : ses avantages et sa procédure. Par Gauthier Chevalier, Avocat. ,
- Les cas d’ouverture : Quand peut-on demander une rupture conventionnelle ? Par Gauthier Chevalier, Avocat. .

L’anticipation est nécessaire, mais le bon respect des mesures de confinement est primordial, ainsi que le soin apporté à ses proches, amis et voisins. La vie et l’entraide priment.

Gauthier Chevalier, Cabinet CHG-Avocat / Négociation - Rupture de contrat - Expatriation & Cadres Dirigeants www.chg-avocat.com

[1Article à jour des ordonnances en date du 25 mars 2020 et des changements survenus depuis.

[2Nb : le Gouvernement a modifié et prévoit de continuer à modifier les conditions d’obtention du chômage.

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