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Déconfinement : quelles sont les 8 préconisations que les entreprises doivent respecter ? Par Frédéric Chhum, Avocat et Marion Simoné Elève-avocat.
Parution : jeudi 7 mai 2020
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Le déconfinement se prépare.

Le 11 mai 2020, des millions de salariés vont reprendre le travail.

De multiples questions se posent sur les conditions de leur retour au travail.

Il faut rappeler que les employeurs sont tenus d’une obligation de sécurité de résultat concernant la santé et la sécurité des salariés.

Le 3 mai 2020 à 22h30, le gouvernement a publié un protocole national de déconfinement à destination des entreprises pour assurer la sécurité des salariés.

Il se décompose en 8 chapitres et apporte des précisions relatives aux :

1. Mesures barrières et de distanciation physique au sein d’une entreprise ;
2. Taux d’occupation maximale par espace ouvert ;
3. Gestion des flux de personnes ;
4. Fourniture d’équipements de protection individuelle ;
5. Test de dépistage ;
6. Protocole de prise en charge d’une personne symptomatique et ses contacts rapprochés ;
7. La prise de température ;
8. Nettoyage et désinfection.

La présente brève résume les préconisations du gouvernement qui s’imposent aux entreprises.

Si les salariés ne s’estiment pas en sécurité dans leur entreprise, ils peuvent exercer leur droit de retrait, Voir notre article COVID-19 : le point sur le droit de retrait des salariés. Par Frédéric Chhum et Mathilde Mermet-Guyennet, Avocats.

1) Respecter les mesures barrières et de distanciation physique.

Les mesures barrières classiques sont évidemment à respecter par les salariés :
- Se laver régulièrement les mains ;
- Éviter de se toucher le visage ;
- Utiliser des mouchoirs jetables et les jeter immédiatement après utilisation ;
- Tousser dans son coude ;
- Ne pas serrer les mains ou embrasser pour se saluer.

Les salariés sont également invités à :
- Aérer toutes les 3 heures les pièces fermées pendants 15 minutes ;
- Éviter de porter des gants ;
- Contrôler régulièrement sa température et d’être attentif à l’apparition de symptôme.

L’employeur doit donc mettre a minima à disposition des salariés :
- Du savon ou du gel hydro-alcoolique ;
- Un dispositif de papier à usage unique pour s’essuyer les mains ;
- Du désinfectant pour les objets manipulés et les surfaces.

2) Les recommandations en termes de taux d’occupation par espace ouvert : 4 m2 minimum par personne et à défaut, nécessité de porter un masque « grand public ».

Le gouvernement recommande de fixer un espace de 4 m2 minimum par personne, pour garantir le maintien d’une distance minimale d’un mètre autour d’une personne.

Si dans certaines situations ces mesures ne peuvent pas être respectées, le port du masque « grand public » est à mettre en place.

Pour calculer ce taux d’occupation, l’employeur doit déduire les surfaces utilisées pour les armoires/vestiaires et stockage de dossiers.

Exemple extrait du protocole du ministère du Travail :

Protocole du ministère du Travail.

Open-space d’une superficie de 700m2 :
Sur cette surface sont installés 50 bureaux de 2 mètres carrés de surface chacun, nécessitant chacun 2m2 au sol supplémentaires pour que le salarié puisse vaquer normalement à ses occupations. Les armoires/vestiaires et de stockage de dossiers comptent pour 1,5 m2 par bureau. Cet open-space a une salle de réunion de 100m2 et 3 petites salles d’isolement de 30 m2 chacune. La surface dédiée aux circulations est de 100 m2.
La surface résiduelle est donc de : 700 – (4x50) – (50x1,5) – 100 –(3x30) – 100 soit = 135 m2.
La jauge maximale est donc égale à (Sr/4) : 135 / 4 = 33 personnes.

Le travail devra être organisé pour que les 50 personnes qu’accueillait cet open-space ne soient jamais plus de 33 sur le lieu de travail.
Exemple : 25 salariés présents du lundi au mercredi midi, puis en télétravail le reste de la semaine et inversement pour les 25 autres salariés, cette organisation laissant des marges pour passer de 25 à 33 en fonction des contraintes de transports en commun des salariés par exemple.

3) Gestion des flux de personnes.

Des plans de circulations doivent être mis en œuvre pour gérer les périodes d’affluence et garantir le respect de la distanciation physique minimale.

Principes généraux :

1. L’employeur doit revoir l’organisation de l’espace de travail pour éviter ou limiter au maximum les croisements et mettre en place un plan de circulation.

2. Le télétravail doit être privilégié lorsqu’il reste possible.

3. La présence physique des télétravailleurs doit être organisée de façon à limiter le nombre de salariés se rejoignant simultanément, des plannings de roulement sont donc à privilégier.

4. La présence de tiers à l’entreprise, clients, fournisseurs, prestataires doit être anticipée, et ils doivent être informés des règles internes en amont (exemple : information sur le site web, prise de rendez-vous)

Voici un schéma des différentes solutions que vous devez trouver lors de la réouverture de votre entreprise selon les espaces fréquentés.

Schéma proposé par le Cabinet d’avocats Chhum (Copyright Chhum Avocats).

Face à des circonstances particulières notamment en cas d’intervention par un tiers :
- la zone d’intervention devra être balisée par tous moyens (plots, marquage au sol, rubans).
- Si plusieurs personnes doivent intervenir, elles devront se déplacer en file indienne en respectant les distances de sécurité.

4) Fourniture d’équipement de protection individuelle (EPI).

Le gouvernement met en garde contre une utilisation de ces équipements qui peut pratiquer un sentiment de sécurité et devenir contrepreproductif.

En conséquence, il souligne que les EPI doivent être un complément des mesures de protection collectives et ne peuvent s’y substituer :

- Masques :
- Mesure subsidiaire : le port du masque doit être mis en place qu’à défaut de pouvoir respecter les solutions précédentes (télétravail, régulation des flux de circulation, réorganisation des espaces).
- Type de masque : FFP1, les autres masques doivent être réservés en priorité au personnel médical.
- Port du masque dans l’entreprise : simple possibilité mais pas une obligation.
- Affichage d’une notice obligatoire : en cas de port du masque, une affiche doit rappeler comment l’utiliser.

- Gants :
- Port déconseillé par le ministère du travail.
- Utilisation impérative :
> Les salariés ne doivent pas se toucher le visage avec les gants ;
> Les gants doivent être jeter après chaque utilisation ;
> Un lavage des mains reste obligatoire après avoir utilisé des gants.

5) Test de dépistage du COVID 19 des salariés : principe d’interdiction par les pouvoirs publics.

Dans son protocole, le gouvernement interdit la mise en place de campagne de dépistage dans les entreprises.

Les raisons invoquées par le ministère du travail :
- La réalisation de ces prélèvements sur prescription médicale est douloureuse, complexe logistiquement et doit être réalisée par des professionnels formés.
- La fiabilité des tests sérologiques est insuffisante pour autoriser et encadrer un dépistage par les entreprises.

6) Mise en place d’un protocole de prise en charge d’une personne symptomatique et de ses contacts rapprochés.

L’entreprise, ou le médecin du travail, doit prévoir une procédure de prise en charge sans délai de personne présentant des symptômes afin de les isoler rapidement dans une pièce dédiée et les inviter à rentrer chez eux.

Pour cela, les entreprises doivent pouvoir établir un plan et qualifier la gravité du cas pour faciliter l’identification des personnes contacts en cas d’apparition d’un cas avéré.

Le protocole s’établit comme suit :

1. Isolement de la personne dans une pièce dédiée avec masque et port d’un masque si disponible.

2. Mobiliser le professionnel de santé de l’établissement.

3. Appréhender les signes de gravité :
- Gravité faible : contact du médecin du travail pour avis médical, et retour du salarié en évitant les transports en commun.
- Détresse respiratoire : appeler le SAMU.

4. Après la prise en charge : nettoyage du poste de travail et suivi des salariés.

5. En cas de confirmation du Covid : identification des contacts et placement en quatorzaine.

7) La prise de température des salariés : déconseillé par les pouvoirs publics.

Le gouvernement déconseille aux entreprises de mettre en place un contrôle de température des salariés à l’entrée des établissements.

La fièvre n’étant pas toujours présente : la prise de température pour repérer une personne possiblement infectée serait donc faussement rassurante.

Toutefois, pour les entreprises qui souhaiteraient tout de même le mettre en place, elles ne sauraient imposer à leurs salariés des relevés obligatoires de température enregistrés dans un traitement automatisé ou un registre papier.

L’employeur ne peut conserver aucune donnée relative à votre état de santé.

8) Nettoyage et désinfection des locaux.

Après réouverture des locaux, un nettoyage quotidien spécifique devra être organisé par l’employeur (utilisation d’un produit contenant un tensioactif présent dans les détachants, savons et dégraissants).

Les opérations de désinfection ne devront être prévues qu’en cas de risque avéré et réalisées avec des produits de type eau de javel.

Si les opérations de désinfection sont trop fréquentes le gouvernement alerte sur les risques d’un désinfectant mal employé et la survie de micro-organisme plus résistant, le désinfectant n’aura alors plus aucun effet.

Les salariés effectuant des opérations de nettoyage seront équipés de leurs équipements de protection individuelle habituels.

Source :

Protocole national de déconfinement pour les entreprises pour assurer la sécurité et la santé des salariés du 3 mai 2020.

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\'ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021) CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille) [->chhum@chhum-avocats.com] www.chhum-avocats.fr http://twitter.com/#!/fchhum