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[Actualités] La théorie de l'imprévision admise par la Cour!
de
Nemo auditur
le Mer 28 Juil 2004 11:42
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LA RENEGOCIATION DES CONTRATS EN COURS :
Le 16 mars 2004, la Cour de Cassation a admis pour la première fois qu’une renégociation était possible en cours de contrat pour les contrats de droit privé en cas de modification imprévue des circonstances économiques. Une telle possibilité n’était offerte auparavant qu’aux contrats de droit public par l’application de la théorie de l’imprévision qui permettait aux parties de renégocier le contrat ou de se libérer de leurs obligations en cas de modification des circonstances économiques imprévisibles lors de la conclusion du contrat. La modification doit être imprévue et doit entraîner un déséquilibre du contrat. Cependant, la Cour de Cassation reste silencieuse sur l’application de ce régime et sur ses effets.
Cass., 1ère civ., 16 mars 2004, Sté Les Repas Parisiens c/ Assoc. Foyer des jeunes travailleurs et Cne Cluse, n°442 FS-P, Juris-Data n°2004-022828.
Source : SYNTEC Informatique
Bonjour, une bonne nouvelle qui démontre un peu de pragmatisme de la part de nos chers magistrats.
Cette notion qui faisait largement défaut à notre droit et qui rendait le droit anglo-saxon plus souple, est enfin admise en droit français.
La technique contractuelle consistant à insérer une clause de hardship ne serait plus indispensable sauf à prévoir les cas admis par les parties comme entrant dans le champ du bouleversement de l'économie du contrat.
Selon vous, un bienfait ou un risque juridique important?
de
Hubert
le Mer 28 Juil 2004 13:23
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Cher Nemo,
Cette décision jurisprudentielle est particulièrement intéressante.
Cependant, je ne suis pas forcément d'accord avec le raisonnement.
En effet, en tant que rédacteur d'actes, j'ai une vision trés sacralisée du pouvoir et de la force du contrat. Dans ce cas de figure, on pourrait déduire que les juges du fonds détermine d'une part la qualification exacte de bouleversements (économiques, financiers, sociaux etc.) et d'autre part dans quelle mesure ce bouleversement pourrait modifier les termes du contrat.
En somme, je crains que cela ne soit une source de risque juridique car l'intervention d'une tierce personne au contrat (le juge) pourrait venir modifier les termes de ce dernier.....et chacun de nous connaît l'aléas juridiciaire.
Les clauses de hardship dont vous parlez ensuite me semblent, avec cette jurisprudence, on ne plus essentielles. En effet, en leur absence, le juge pourrait fixer lui même les modalités de rééquilibrage, les solutions en cas d'échec et les modalités financières de la conciliation.
Mieux vaut bien blinder cette clause justement pour le juge puisse n'y toucher et pour éviter une décision similaire à celle dont tu nous fais part.
D'un autre côté, les juges interviennent déjà beaucoup sur les termes des contrats dans cette optique de réajustement, que pensez-vous de la procédure en fixation des loyers commerciaux en période de renouvellement de bail??
Pour moi, c'est trés pénible dans mes dossiers..... et pourtant nous prévoyons des clauses d'indexation dans nos baux commerciaux...!!
HM
de
Hervé
le Mer 28 Juil 2004 14:09
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La théorie de l'imprévision me laisse perplexe en droit privé. Certes, elle peut permettre de compenser les surcoûts générés par des éléments extérieurs, notamment dans le cadre de contrats à long terme ou à échéa&nces succesives se poursuivant de manière durable.
Mais elle vient aussi en violation avec l'article 1134 du Code civil. Et c'est toute la force du contrat qui est mise difficulté. Alors je ne sais pas qu'en penser parce que le contrat est déjà largement mis à mal devant les prétoires ou par la loi avec le développement des notions d'ordre public de protection, d'ordre pulic économique etc...
Nous sommes clairemnet dans un système qui tend à se rigidifier du point de vue contractuel, en laissant de moins en moins de souplesse et/ou de sécurité aux rédacteurs d'actes.
J'ai eu récemment l'occasion d'en vérifier les effets récemment avec la question des contrats d'agent commercial. Je me demande où notre droit nous mène...
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...
de
stagiaire
le Mer 28 Juil 2004 15:39
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...au droit made in USA!
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de
Hubert
le Mer 28 Juil 2004 16:52
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Voix off:
"Merci de cet apport au débat stagiaire, ça fait plaisir de voir des nouveaux s'impliquer intelligemment dans les problèmes de doctrine et d'interprétations jurisprudentielles.
Merci encore pour cet effort (vous n'avez pas mis que des smileys cette fois, il y a de l'espoir!)."
Hubert:
Nemo, qu'en pensez-vous? vous ne nous avez pas fait part de vos idées sur ce point, vous, "l'International"???
HM
de
stagiaire
le Mer 28 Juil 2004 17:14
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Voix off bis:
Hubert, il me semble que votre dernière intervention n'apporte guère plus d'éléments au débat que celle de stagiaire...
Bon ok,
Je sors,
uno de los tres bandidos asociados
de
Nemo auditur
le Jeu 29 Juil 2004 11:50
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Très honnêtement, mon point de vue est qu'il est parfaitement absurde de s'en remettre à la volonté pure des contractants.
A partir du moment où il est impossible d'envisager la totalité des situations qui surviendront dans la vie du contrat, la rigidité qu'offre le rejet de l'imprévision n'est pas propre à un équilibre des relations.
Bien sûr, il doit être capital de mettre un obstacle dans cette brèche ouverte.
La théorie de l'imprévision oui mais à partir du moment où contractuellement vous cherchez à limiter ses effets en définissant notamment les causes contractuelles qualifiant un bouleversement économique qui ne serait pas une force majeure.
NB : Au fait, avez-vous fait attention qu'aujourd'hui la FM est admise bcp plus souplement par la jurisprudence? Aujourd'hui la seule "insurmontabilité" peut qualifier un événement de force majeure...
Le droit français a toujours manqué de pragmatisme de ce point de vue là en manquant de flexibilité.
Cela n'enlève rien à la force de l'engagement contractuel, à mon sens, ça le crédibilise.
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