La question de la garantie légale de conformité, traitée au niveau européen par la directive 1999/44 du 25 mai 1999, transposée en droit français par l’ordonnance n° 2005-136 du 17 février 2005, a fait l’objet d’une réforme en 2021.
En effet, à cette occasion, la directive 1999/44 a été abrogée par la directive 2019/771 « relative à certains aspects concernant les contrats de vente de biens ». Cette dernière constituant un binôme avec la directive 2019/770 « relative à certains aspects concernant les contrats de fourniture de contenus numériques et de services numériques ».
Ainsi, depuis le 1er janvier 2022, le droit applicable en la matière [1] de garantie légale de conformité est celui institué par l’ordonnance n°2021-1247 du 29 septembre 2021 « relative à la garantie légale de conformité pour les biens, les contenus numériques et les services numériques » transposant dans le droit français les directives n°2019/770 et 2019/771.
I. Le champ d’application de la protection du consommateur partie à un contrat de vente.
L’applicabilité de la garantie légale de conformité à la vente de biens de consommation telle qu’elle résulte de l’ordonnance n°2021-1247 exige : un contrat entre un vendeur professionnel et un consommateur (A), portant sur un bien de consommation (B).
A. Contrat de vente entre un vendeur professionnel et un consommateur.
Au regard de l’article L217-1 du Code de la consommation, la garantie légale de conformité s’impose [2] aux contrats de vente de biens meubles corporels [3] entre un vendeur professionnel [4] et un consommateur [5].
Depuis la réforme réalisée par l’ordonnance n°2021-1247, peuvent également bénéficier [6] de la garantie légale de conformité les acheteurs non-professionnels [7]. Ainsi, le consommateur partie au contrat de vente de biens meubles corporels peut être toute personne physique ou morale, de droit public ou de droit privé, qui n’agit pas à des fins professionnelles.
Par conséquent, au regard de la définition du contenu des termes : "vendeur professionnel", "consommateur", "acheteur non-professionnel" ; la garantie légale de conformité n’est pas applicable dans le cadre de contrats de vente entre vendeur professionnel et acheteur professionnel ni dans la situation où un consommateur vend à un professionnel ; ni en cas de vente entre particuliers sauf si, conformément à l’article L217-1 du Code de la consommation, le particulier vendeur se présente ou se comporte comme un vendeur professionnel. Dans ce cas, sous couvert de la démonstration de l’existence d’une croyance légitime [8], le vendeur professionnel apparent [9] sera tenu par la même garantie légale.
Acte juridique translatif de propriété, le contrat de vente est concerné par la garantie légale de conformité que la contrepartie du consommateur soit le paiement d’un prix ou tout autre avantage qu’il procurerait au vendeur [10], par exemple le transfert de données personnelles [11].
Cet élément nouveau, est introduit par la réforme de 2021 mise en œuvre par l’ordonnance n°2021-1247. Il met, notamment, en relief la valeur marchande des données personnelles dont la communication est souvent le sésame pour l’accès « dit gratuit » à des services et/ou produits dès lors objet d’un contrat translatif de propriété.
Il est manifeste que le régime juridique de la garantie légale de conformité pose l’existence d’un contrat de vente comme l’une des conditions préalables à son application. Cependant, à la lecture de l’alinéa 3 de l’article L217-1 du code de la consommation [12], le contrat de louage d’ouvrage (contrat d’entreprise) qui consiste à la réalisation d’un travail spécifique [13] pour la fourniture de biens meubles à fabriquer ou à produire est assimilé à un contrat de vente de biens de consommation éligible à la garantie légale de conformité.
B. Bien de consommation : bien meuble corporel.
L’existence d’un contrat de vente entre un vendeur professionnel et un consommateur (personne physique ou morale) est le principal élément de détermination de l’applicabilité de la garantie légale de conformité. Cependant, ledit contrat de vente doit avoir un objet spécial, il doit s’agir d’un bien meuble corporel.
1. Les biens de consommation éligibles à la garantie légale de conformité.
Le premier niveau de filtre des biens de consommation éligibles à la garantie légale de conformité est posé par le Législateur à l’article L217-1 du Code de la consommation. En effet, dans la mesure où il cible les contrats de vente de biens meubles corporels, de droit, il exclu les biens immeubles et les biens meubles incorporels. Dès lors, de ce premier niveau de filtre, il est possible d’identifier les biens de consommation éligibles comme étant des biens de grande consommation, manufacturé et distribué par des vendeurs professionnels qu’il s’agisse de biens d’occasions (art. L217-7 du Code de la consommation.) ou de biens neufs.
Dès lors, sont notamment considérés comme des biens de consommation pouvant bénéficier de la garantie légale de conformité : l’eau (bouteille d’eau, etc.), l’électricité (batterie, etc.), gaz (bouteille de gaz, etc.) lorsqu’ils sont conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée (art. L217-1 al. 4 du Code de la consommation).
Sont également considérés comme des biens de consommation éligibles, les « biens comportant des éléments numériques » (art. L217-1 al. 5 du Code de la consommation.), c’est-à-dire « tout bien meuble corporel qui intègre un contenu numérique ou un service numérique ou qui est interconnecté avec un tel contenu ou un tel service, de manière telle que l’absence de ce contenu numérique ou de ce service numérique empêcherait le bien de remplir ses fonctions » (article liminaire du Code de la consommation.) : smart TV, montre connectée, réfrigérateur connecté, etc. Il importe pas que le contenu numérique (CN) [14] ou/et que le service numérique (SN) [15] soient fournis par le vendeur professionnel ou par un tiers. Sauf existence, sans ambiguïté, d’un contrat de vente du bien distinct du contrat de fourniture du contenu numérique et/ou du service numérique, ces derniers sont présumés relever du contrat de vente (art. L217-1.II du Code de la consommation). La vente, dans un seul et même contrat, de biens éligibles et de biens non éligibles, n’empêche pas les biens éligibles d’être couvert par garantie légale de conformité.
En outre, des biens de consommation qui bénéficiaient initialement de la garantie légale de conformité sont disqualifiés s’ils sont vendus sur saisie ou par autorité de justice (art. L217-2.1° du Code de la consommation.). Il en est de même pour les biens d’occasions vendus (a contrario cela ne concerne pas les biens neufs) aux enchères publiques [16] mais uniquement si le consommateur y assiste en personne (art. L217-2.2° du Code de la consommation.).
Sont également exclus de la garantie légale de conformité posée aux article L217-1 à L217-32 du Code de la consommation, les contenus numériques et les services numériques qui ne relèvent pas d’un contrat de vente de bien de consommation « comportant des éléments numériques » car ils sont soumis au régime spécifique des contrats de fournitures de contenus numériques et de services numériques définit aux articles L224-25-1 à L224-25-3 du Code de la consommation.
Sont également exclus les Contenus numériques et les services numériques listés à l’art. L224-25-3.II, il s’agit notamment des contenus numériques mis à la disposition du grand public autrement que par la transmission de signaux, des contenus numériques fournis par des organismes du secteur public, etc. [17].
La vente d’animaux domestiques [18] est régie par un régime juridique spécifique prescrit aux articles L213-1 à L213-9 du Code rural et de la pêche maritime.
2. La conformité du bien de consommation.
Dans un contrat entre un vendeur professionnel et un consommateur (personne physique ou morale) portant sur un bien de consommation (bien meuble corporel), le vendeur à l’obligation de délivrer un bien conforme au contrat ainsi qu’a d’autres critères d’évaluation de la conformité du bien délivré (art. L217-3 du Code de la consommation).
En tout état de cause, le cas échéant, c’est-à-dire lorsqu’une non-conformité se révèle, le vendeur professionnel doit y répondre (art. L217-3 et L216-1 du Code de la consommation) lorsque le défaut apparait dans le délai de garantie de 2 ans à compter de la délivrance du bien [19] neuf et dans le délai d’un an pour la délivrance d’un bien d’occasion (art. L217-7 du Code de la consommation.).
Dans le cas des biens comportant des éléments numériques, lorsque le contenu numérique (CN) ou/et le service numérique (SN) est fourni en continue (art. L217-7 du Code de la consommation), deux solutions sont envisagées selon la durée contractuelle de la fourniture du CN ou/et du SN. Le délai de garantie légale est de 2 ans si la durée du SN et/ou du CN est inférieure ou égale à 2 ans ou si aucune durée n’est stipulée. En revanche, lorsque la fourniture du CN et/ou du SN est stipulée pour une durée supérieure à 2 ans ; alors la garantie légale de conformité suit la durée contractuelle du CN et/ou du SN. Quoiqu’il en soit, pour les biens comportant des éléments numériques, quel que soit le délai applicable, le consommateur ne peut être privé de son droit à la mise à jour (art. L217-19 du Code de la consommation).
Durant les différents délais présentés précédemment, le vendeur professionnel doit répondre de la non-conformité du bien au contrat (art. L217-4 et L217-5 du Code de la consommation).
Il y a non-conformité du bien :
- Lorsque le bien délivré ne correspond pas à la description, au type, à la quantité, à la qualité, à la fonctionnalité [20], à la compatibilité [21], à l’interopérabilité [22]… stipulées au contrat de vente.
- Lorsque le bien ne possède pas les qualités que le vendeur a présentées au consommateur avant la formation du contrat de vente.
- Lorsque le bien ne peut être utilisé pour les usages habituellement attendu du type de bien dont il s’agit au regard des normes techniques en vigueur.
- Lorsque le bien ne peut être utilisé pour les usages spéciaux escomptés par le consommateur et exprimé lors de la formation de la vente.
- Lorsque le bien n’est pas délivré avec tous les accessoires et instructions qui devaient être fourni au regard des stipulations du contrat.
- Lorsque le bien n’est pas délivré avec tous les accessoires (emballage, instruction d’installation, tec.) que le consommateur peut légitimement attendre.
- Lorsque le bien comportant des éléments numériques n’est pas mis à jour conformément aux stipulations du contrat.
- Lorsque le bien comportant des éléments numériques n’est pas délivré avec les mise à jour que le consommateur peut légitimement attendre.
- Lorsque le bien comportant des éléments numériques n’est pas délivré avec la version la plus récente disponible au moment de l’achat.
- Lorsque le bien ne correspond pas en termes de durabilité [23], de sécurité, « que le consommateur peut légitimement attendre pour des biens de même type, eu égard à la nature du bien ainsi qu’aux déclarations publiques faites par le vendeur, par toute personne en amont dans la chaîne de transactions, ou par une personne agissant pour leur compte, y compris dans la publicité ou sur l’étiquetage ».
- Lorsqu’il y a un manquement dans le traitement des données personnelles du consommateur tant au regard du RGPD que des stipulations du contrat de vente.
- Etc.
En cas de défaut de conformité, le consommateur peut mettre en œuvre la garantie légale dans le respect des délais précités (art. L217-3 et L217-7 du Code de la consommation.) sans préjudice des délais des articles 2224 et suivants du Code civil. Le point de départ de la prescription de l’action du consommateur est le jour de la connaissance par ce dernier du défaut de conformité.
II. Les droits du consommateur partie à un contrat de vente de biens meubles corporel
Afin d’obtenir la capacité à mettre en œuvre la garantie légale de conformité, le consommateur doit apporter la preuve de l’existence d’une non-conformité. Cependant, il pourrait se trouver dans une zone de non-recours si le consommateur excipe des défauts dont il a été informé et qu’il a accepté lors de la formation du contrat (art. L217-5.III du Code de la consommation).
En outre, le cas échéant, le consommateur ne pourrait pas non plus opposer au vendeur professionnel les déclarations publiques faites, notamment en termes de durabilité, de fonctionnalité, de compatibilité et de sécurité du bien de consommation objet du contrat de vente ; si le vendeur professionnel démontre (art. L217-5.II du Code de la consommation) :
- Qu’il ne connaissait pas et n’était légitimement pas en mesure de connaitre les déclarations publiques faites ;
- Que les déclarations publiques avaient été modifiées au moment de la formation de la vente. Lesdites modifications ayant été diffusée par les mêmes canaux que la déclaration initiale ;
- Que les déclarations publiques n’ont pas pu avoir d’influence sur la décision d’achat.
Ainsi, si le consommateur ne se trouve pas en zone de non-recours ou/et n’est pas concerné par les scénarii relatives au déclarations publiques faites sur le bien ; alors, dans le délai imparti (2 ans [bien neuf] ou 1 an [bien d’occasion] pour les biens sans contenu numérique [CN] et/ou service numérique [SN] ; 2 ans ou durée de la fourniture du CN et/ou du SN pour les biens comportant des éléments numériques), le consommateur bénéficie d’une présomption d’antériorité [24] (art. L217-7 al. 1 du Code de la consommation) du défaut de conformité qui lui permet, avec la preuve du défaut, de mettre en œuvre la garantie légale de conformité. Dans ce cas, le consommateur dispose de deux groupes d’options alternatives.
A. Droit à la réparation ou au remplacement
Lorsque le consommateur démontre l’existence d’un défaut de conformité, il a droit à la mise en conformité du bien.
Cette dernière, selon le choix du consommateur, se matérialise soit par une obligation de réparation soit par une obligation de remplacement qui pèse sur le vendeur professionnel (art. L217-8 al. 1 et L217-9 du Code de la consommation.). Quel que soit l’option levée (réparation ou remplacement), le consommateur à droit à la suspension du paiement de la totalité du prix ou d’une partie du prix, le cas échéant, de la restitution de l’avantage qui avait été procurer au vendeur professionnel en contrepartie du bien. En outre, le consommateur peut solliciter l’attribution de dommages et intérêts.
Quel que soit l’option levée (réparation ou remplacement), le vendeur doit la mettre en œuvre dans le délai de 30 jours (art. L217-10 du Code de la consommation.) à compter de la sollicitation du consommateur. Le vendeur doit, le cas échéant, pourvoir à l’enlèvement, sa reprise et l’installation de la solution (bien remplacé ou bien réparé). Le cas échéant, le vendeur professionnel rembourse dans les 14 jours (au plus tard) les frais auxquels le consommateur a dû faire face en lieu et place du vendeur (art. L217-11 et L217-17 du Code de la consommation.).
Le vendeur dispose de la faculté de ne pas mettre en œuvre l’option levée par le consommateur.
Cependant, cette faculté de contreproposition est possible uniquement dans des circonstances limitativement listées (art. L217-12 du Code de la consommation.). Le vendeur doit démontrer que la mise en conformité est soit impossible soit trop onéreuse au regard du prix d’un bien identique sans défaut. Il peut également ne pas procéder à la mise en conformité s’il démontre qu’au regard de l’importance du défaut et de la possibilité de faire un autre choix, le type de mise en conformité opté par le consommateur est trop onéreux ou impossible.
En tout état de cause, le vendeur professionnel doit formuler sa position par écrit ou sur tout support durable [25].
En réponse au refus ou à la contreproposition non-conforme aux exigences de l’article L217-12 du Code de la consommation, après une mise en demeure, le consommateur peut solliciter par la voie judiciaire à l’exécution forcée de l’option initialement levée.
Le bien réparé dans le cadre de la mise en œuvre de la garantie légale de conformité, bénéficie d’une extension de ladite garantie de six mois. En revanche, si le consommateur avait levé l’option de la réparation et que le vendeur professionnel met en œuvre un remplacement ; alors le bien remplacé dans ce contexte bénéficie d’un nouveau délai de garantie légale de conformité (art. L217-13 du Code de la consommation.) qui commence à courir à la date de délivrance du bien de remplacement.
B. Droit à la réduction de prix ou à la résolution.
Le droit à la réduction du prix ou à la résolution [26] du contrat est d’abord posé comme une solution alternative à l’échec de la mise en conformité.
En effet, selon l’article L217-14 du Code de la consommation, le consommateur peut opter soit pour la réduction du prix soit pour la résolution :
- Lorsque le professionnel refuse les options de mise en conformité (art. L217-12 in fine du Code de la consommation).
- Lorsque le vendeur professionnel ne met pas en œuvre la solution de mise en conformité optée dans le délai de 30 jours (art. L217-10 du Code de la consommation).
- Lorsque la mise en conformité occasionne au consommateur un inconvénient majeur (art. L217-10 du Code de la consommation).
- Lorsque le consommateur supporte définitivement les frais de reprise, d’enlèvement, d’installation propres à la mise en conformité (art. L217-10 et L217-11 du Code de la consommation).
- Lorsque, malgré une tentative de mise en conformité, la non-conformité est persistante.
En revanche, dans le contrat de vente dont la contrepartie est le paiement d’un prix, le droit à la résolution n’est pas ouvert lorsque le vendeur démontre que le défaut est mineur (art. L217-14 in fine du Code de la consommation.). Dans ce cas, en cas d’échec de la mise en conformité, il ne restera que la solution de la réduction du prix. Cependant, si le défaut rend le bien impropre à l’usage auquel on le destine, ou qui diminuent tellement cet usage que le consommateur ne l’aurait pas acquise ou n’en aurait donné qu’un moindre prix ; alors dans ce cas, le consommateur peut immédiatement (c’est-à-dire sans attendre l’échec de la mise en conformité) opter soit pour une réduction de prix soit pour une résolution (art. L217-14 al. 2 du Code de la consommation.).
Afin de mettre en œuvre le droit à réduction du prix ou le droit à la résolution, le consommateur doit informer le vendeur professionnel de sa décision (art. L217-15 al. 1 et L217-16 al. 1 du Code de la consommation.). Lors de la mise en œuvre du droit de résolution, le consommateur doit restituer le bien en cause et le vendeur restitue le prix payé ainsi que, le cas échéant, tout autre avantage reçu au titre du contrat résolu. S’agissant de la mise en œuvre de la réduction du prix, il faut déterminer le reliquat entre la valeur vénale du bien en cause et celle d’un bien du même type sans défaut.
Toutes choses égales par ailleurs, le consommateur compte également dans son arsenal les solutions du droit commun [27], à savoir :
- l’erreur sur les qualités essentielles (art. 1132 et 133 du Code civil.),
- l’obligation de délivrance conforme (art. 1610 du code civil)
- et la garantie des vices cachés (art. 1641 et suivants du code Civil).
En outre, la configuration unitaire du régime juridique de la garantie légale de conformité en droit de la consommation ne manque pas de faire s’interroger sur le caractère artificiel de la dichotomie civiliste : vice caché et défaut conformité [28].