Fiche pratique : le régime social des indemnités de rupture après la Loi de finance de 2013
Je vous exposais l’année dernière les réformes apportées au régime social des indemnités de rupture depuis 2011. Le texte de cet article est joint en annexe car le raisonnement appliqué aujourd’hui est toujours identique à quelques points prêts exposés ci-dessous.
La loi de finance pour 2013 marque la fin du régime transitoire. La limite d’exonération est désormais de 2 PASS, soit 74 064 euros en valeur 2013.
Un point important doit toutefois être souligné : les indemnités versées à l’occasion de ruptures conventionnelles homologuées à des salariés n’ayant pas atteint l’âge pour faire liquider leur pension de retraite de base sont depuis le 1er janvier 2013 soumises au forfait social.
Ce forfait est appliqué depuis 2009 aux éléments de rémunération exonérés de cotisations sociales et soumis à la CSG. Les indemnités de rupture échappaient toutefois par exception à ce forfait.
Or, la loi de finance pour 2013 applique ce forfait aux seules indemnités de rupture conventionnelle pour la part exclue de CSG (les indemnités de licenciement et autres indemnités de rupture restent exclues du champ d’application de ce forfait).
Le taux du forfait social est fixé pour 2013 à 20%.
Dans la mesure où seule la fraction exclue de CSG est soumise au forfait social et où les indemnités de rupture conventionnelle versées à un salarié ayant atteint l’âge pour faire liquider sa pension de retraite sont intégralement soumises à CSG, aucune retenue au titre du forfait social ne peut donc être effectuée.
ANNEXE
Les lois de financement pour 2011 et 2012 sont venues modifier le régime social des indemnités de rupture.
Comment donc calculer la part de ces indemnités exonérée de cotisations sociales ?
a. Les indemnités de rupture
Le montant des indemnités de rupture perçues (indemnité de licenciement, indemnité perçue lors d’une rupture conventionnelle, indemnité transactionnelle et indemnité de mise à la retraite) est exonéré de cotisations sociales jusqu’à un plafond exprimé en plafond annuel de la sécurité sociale (PASS).
Le montant du PASS est modifié chaque année par la loi de finance.
La loi de finance peut modifier également le nombre de PASS correspondant au montant du plafond d’exonération.
Ainsi alors, qu’antérieurement à 2011, le plafond d’exonération était fixé à 6 PASS, il a été ramené à 3 PASS en 2011 et à 2 PASS en 2012.
Le montant de 3 PASS correspond à 109 116 euros et celui de 2 PASS à 72 744 euros.
Le montant à retenir est déterminé en fonction de la date de la rupture. Ainsi pour des indemnités versées en 2011 ou en 2012 pour une rupture intervenue en 2011, le montant de 3 PASS sera appliqué.
Cela signifie en clair que le montant perçu aux titres des indemnités de rupture ne pourra être exonéré que dans la limite de 72 744 euros (ou 109 116 euros pour des ruptures intervenues en 2011).
Mais pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
Le montant de cette exonération, qui ne pourra excéder de manière générale la limite de 72 744 euros (ou le cas échéant 109 116 euros) ci-dessus, ne pourra être égal qu’au plus élevé des trois montants suivants :
le montant de l’indemnité prévu par la convention collective, par l’accord professionnel ou interprofessionnel ou à défaut par la loi ;
deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié l’année civile précédant la rupture ;
50% du montant de l’indemnité versée.
Attention : les indemnités de rupture sont souvent négociées en net, soit une somme à laquelle doivent être ajoutés les 8% de CSG CRDS à la charge de l’employeur.
Exemples pratiques de rupture intervenue en 2012 :
• Monsieur Y, dont l’ancienneté est de cinq ans, perçoit un salaire brut mensuel de 2000 euros sur 13 mois, salaire qui n’a pas changé par rapport à l’année précédente.
Sa rémunération annuelle brute de l’année civile précédente s’élève donc à 26 000 euros.
La convention collective qui lui est applicable prévoit une indemnité de licenciement égale à 2/5ème de mois par année d’ancienneté. Son indemnité de licenciement s’élève ainsi à 4000 euros.
Cette somme n’atteint pas la limite de 2 PASS, soit 72 744 euros.
Elle sera exonérée en totalité.
• Si Monsieur Y a, suite à son licenciement, conclu une transaction prévoyant le versement d’une indemnité correspondant à 12 mois de salaire, soit 24 000 euros.
Il aura ainsi perçu au titre de ses indemnités de rupture la somme de 28 000 euros.
Cette somme n’atteint pas la limite de 2 PASS, soit 72 744 euros.
Elle sera exonérée à hauteur du plus élevé des trois montants suivants :
le montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement, soit 4 000 euros
le double de la rémunération annuelle brute de l’année précédant la rupture, soit 52 000 euros.
La moitié de l’indemnité versée, soit 14 000 euros.
Le plus élevé de ces montants étant de 52 000 euros, l’intégralité de l’indemnité perçue sera exonérée de charges sociales.
• Monsieur Z est cadre et a perçu une rémunération annuelle brute de 100 000 euros l’année précédant la rupture de son contrat.
Il est licencié et perçoit une indemnité de licenciement de 250 000 euros
Suite à une transaction il perçoit une indemnité transactionnelle supplémentaire de 50 000 euros, soit une indemnité de rupture totale (licenciement + transaction) de 300 000 euros.
Cette indemnité sera exonérée à hauteur du plus élevé des sommes suivantes :
indemnité conventionnelle de licenciement : 250 000 euros
deux fois la rémunération annuelle brute de l’année précédant la rupture : 200 000 euros
la moitié de l’indemnité perçue : 150 000 euros.
L’indemnité sera donc exonérée à hauteur de 250 000 euros.
Doit toutefois encore s’appliquer la limite de 2 PASS, soit 72 744 euros :
300 000 euros – 72 744 = 227 256 euros
L’indemnité perçue sera alors exonérée à hauteur de 72 744 euros et assujettie à cotisations sociales pour 227 256 euros.
Une indemnité élevée pourra désormais devenir extrêmement couteuse pour l’employeur d’autant plus que l’indemnité étant le plus souvent négociée en net, il aura en sus la charge de la CSG CRDS.
CSG CRDS
Les indemnités de rupture sont assujetties à la CSG CRDS pour leur fraction excédant les montants prévus par la convention collective ou un accord collectif et, à défaut, par la loi.
Toutefois, la fraction assujettie à CSG CRDS ne peut pas être inférieure à celle assujettie à cotisations sociales.
A compter du 1er janvier 2012, l’abattement forfaitaire pour frais professionnels est supprimé.
b- Les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Auparavant, ces dommages et intérêts étaient totalement exonérés de charges sociales et d’impôt sur le revenu, quelque soit leur montant. Seule la CSG CRDS était due était due sur la fraction excédant l’indemnité de 6 mois prévue à l’article L1235-3 du Code du travail.
Désormais, ces dommages et intérêts ne sont plus exonérés que dans la limite de 2 PASS, comme les autres indemnités ci-dessus.
A titre transitoire, il est cependant admis que pour les licenciements intervenus avant le 1er janvier 2011 et contestés après, les limites d’exonération en vigueur au moment du versement de l’indemnité de licenciement légale ou conventionnelle ou à défaut (en cas de licenciement pour faute grave), au moment de la rupture continuent de s’appliquer.
Cela signifie que pour les licenciements survenus avant le 1er janvier, les règles applicables sont celles visant l’exonération totale de charges sociales pour les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Seule la fraction supérieure à six mois de salaire sera soumise à CSG CRDS.
Pour les licenciements intervenus à compter du 1er janvier 2011, la limite d’exonération sera de 3 PASS (106 056 euros en valeur 2011).
Pour ceux intervenus à compter du 1er janvier 2012, cette limite sera de 2 PASS ( 72 744 euros en valeur 2012).
Attention, les plafonds ci-dessus sont applicables après imputation des indemnités déjà versées lors du licenciement (notamment et surtout l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement).
Exemples pratiques :
• Monsieur T, cadre, dont le salaire brut mensuel s’élève à 5000 euros, a été licencié le 30 septembre 2010. Il a accompli deux mois de préavis et a reçu son solde de tout le 30 novembre 2010. A cette occasion lui a été réglée son indemnité légale de licenciement correspondant à 20 000 euros. Il conteste son licenciement et obtient gain de cause par jugement en date du 10 janvier 2012.
Son employeur est condamné à lui verser 18 mois de salaire, soit 90 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Cette somme est intégralement exonérée de charges sociales. Elle ne sera soumise à CSG CRDS que pour la fraction excédant six mois de salaire, soit pour la somme de 60 000 euros.
• Le même Monsieur T est licencié non pas en septembre 2010 mais en septembre 2011.
Il aura perçu en tout 90 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 20 000 euros à titre d’indemnité de licenciement, soit un total de 110 000 euros.
Le plafond est ici de 106 056 euros.
110 000 – 106 056 = 3 944
Les indemnités seront alors exonérées à hauteur de 106 056 euros et assujetties à charges sociales à hauteur de 3944 euros. A cela s’ajoutent la CSG et la CRDS.
• Pour le licenciement de Monsieur T en 2012, la fraction exonérée aurait été de 72 744 euros et la fraction assujettie de 37 256 euros.
Discussions en cours :
Bonjour Maître,
Si la transaction faisant suite à une rupture conventionnelle a été signée avant le 31/12/2012 et qu’elle prévoit des versements échelonnés sur plusieurs mois de 2013, le régime applicable sera-t-il celui de 2012 (naissance de l’obligation de versement) ou celui de 2013 (date effective des versements) ?
Merci d’avance
Suzanne B
Bonjour Maître,
Je reviens sur l’application de la CSG / CRDS aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuses additionnés à l’indemnité de licenciement.
Dans votre second exemple, la CSG et la CRDS s’appliquent-elles uniquement au montant soumis à cotisations sociales ou bien au montant de ces dommages supérieur à 6 mois de salaire ?
Merci pour votre éclaircissement.
Bien cordialement.