Cet article est proposé par le Magazine "Liberalis"...
Avec ce numéro du magazine LIBERALIS, nous vous invitons à poser un autre regard sur vos professions libérales.
Nous vous invitons à découvrir nos rubriques à travers le prisme des sentiments et de l’action comme « Se passionner », « S’étonner » pour découvrir les savoir-faire ou encore « S’enflammer » pour les témoignages de collectionneurs.
(Histoire / Fashion) : « Jean Paul Gaultier pour Stéphane Kélian, roman d’une rencontre » au Musée de la Chaussure de Romans-sur-Isère.
Le musée de la Chaussure de Romans-sur-Isère dans la Drôme, labellisé « Musée de France », est riche d’une collection unique. Sa singularité, la chaussure, et son étendue sur cinq continents de l’Antiquité à nos jours lui confèrent cette unicité.
- Musée de la Chaussure © ville de Romans
Romans bénéficie d’une notoriété dans le milieu de la mode grâce à trois grandes marques phares, Charles Jourdan, Stéphane Kélian et Robert Clergerie qui vont faire de la ville la capitale de la chaussure haut de gamme. Si la fabrication est locale, la renommée est bien nationale, voire internationale.
Le Musée accueille Jean Paul Gaultier, « L’enfant terrible de la mode », pour cette exposition inédite qui retrace sa collaboration, de 1984 à 1996, avec l’un des grands noms de la chaussure de l’époque, un visionnaire, le Romanais Stéphane Kélian : une rencontre riche et insolite, placée sous le signe de l’audace.
Installée à Romans, Capitale de la chaussure de luxe, dans un lieu emblématique, un ancien couvent de l’ordre des Visitandines devenu « temple de la chaussure », et plus particulièrement au sein d’une magnifique chapelle, cette exposition inédite nous transporte au 7e ciel !
On ne pouvait trouver lieu plus insolite, en effet, pour accueillir Jean Paul Gaultier, aux côtés de Stephane Kélian, chausseur romanais, avec lequel il collabora plus d’une décennie. L’occasion de vous conter, ainsi qu’il le fredonne dans une interview filmée, ce qui fut « un beau roman(s), une belle histoire ». Pour lui qui n’allait pas tarder à faire trembler la planète mode avec ses idées bouillonnantes et son prêt-à-porter déjanté.
- Jean-Paul Gaultier © Torrado
Avant de rencontrer Stephane Kélian, qui avait déjà développé des partenariats avec des créateurs reconnus tels que Claude Montana et Issey Miyake, Jean Paul Gaultier s’était rapproché de marques de chausseurs réputés. Avec Carel et Charles Kammer, il avait réalisé et commercialisé quelques petites collections de chausseurs associées à son prêt-à-porter qui démarrait tout juste. Ce rapprochement avec une marque installée annonce et donne une vraie visibilité au jeune créateur.
À l’époque, en effet, alors que toute la France du textile juge les idées du « trublion de la mode » trop farfelues pour oser le suivre, Stephane Kélian, dont l’entreprise brille au firmament, grâce notamment à son savoir-faire unique, le tressé cuir, sera le seul à lui ouvrir grand les bras, accédant à tous ses désirs.
Ce visionnaire sera l’un des premiers à comprendre, dès 1984, qu’il faut se projeter aux côtés de la génération turbulente des jeunes créateurs afin de garantir l’avenir du secteur. Jusqu’en 1996, leur collaboration va donner naissance à des créations inédites. Désormais, le chaussant « prudent » laisse place à une chaussure « tendance », adaptée à chaque silhouette, devançant chaque nouvelle mode, donnant naissance à de nouvelles identités.
- Stéphane Kélian © Lsnfilms
« J’ai découvert, au sein des archives de la Maison Gaultier pour laquelle j’ai longtemps travaillé, un patrimoine unique et incroyable que, comme certains de mes confrères, je connaissais un peu en tant que collectionneur » raconte avec un enthousiasme débordant Olivier Jault, commissaire de l’exposition et styliste chaussure indépendant. « Des propositions de styles étonnantes et des prouesses techniques hallucinantes, en phase avec les collections de vêtements... ».
- ©Pierre Verrier
Des pièces qui sont à découvrir, dans cette exposition, enrichie par des prêts d’Olivier Jault mais aussi de collectionneurs chevronnés, parmi lesquels l’archiviste de mode, qui fait référence aujourd’hui, l’ex-mannequin Anouschka ou encore Ryan Benacer (20age archive). Des chaussures essentiellement, griffées « Jean Paul Gaultier pour Stephane Kélian », et assorties de quelques tenues présentées sur un « catwalk » ; et encore, des publicités, des invitations et autres extraits de catalogues de défilés, illustrés notamment par Thierry Perez et Pauline Binoux ; des vidéos également avec, en particulier, une interview « tressée » des deux protagonistes. Tout un univers qui nous fait revivre plus d’une décennie d’une folle collaboration... « Une aventure humaine, unique et marquante » selon Stephane Kélian.
- ©Pierre Verrier
De son côté, Jean Paul Gaultier retiendra de Stephane Kélian, outre son talent, son enthousiasme et son audace, ainsi que sa capacité à ne jamais rien refuser. Il lui rendra d’ailleurs un bel hommage, en lui dédicaçant le catalogue de son exposition « La Planète mode, de la rue aux étoiles », en 2015, au Grand Palais. Il écrira, notamment : « On aura tout tenté et créé des merveilles ensemble. Tu fais partie de mon parcours et avec toi, ce fut le pied. Jean Paul pour toujours. »
Cette très belle exposition trouvera également son écho dans la présentation des collections permanentes du Musée, lequel conserve au total plus de 20 000 objets. On peut ainsi découvrir différents modèles de tressé Kélian dont un derby, reproduit en version XXL au cœur du centre-ville, et des créations de Jean Paul Gaultier comme ces boots de la collection « Tattoo », sur le parcours permanent, dans un dressing à l’échelle du siècle.
Du 27 avril au 3 novembre 2024.
Musée de la Chaussure, Portail Roger Vivier, rue Bistour, 26100 Romans-sur-Isère
Informations : www.museedelachaussure.fr
Photo en logo : ©Pierre Verrier