I. Evaluation environnementale.
S’agissant des projets qui font l’objet d’une évaluation environnementale par l’autorité environnementale qui est compétente pour autoriser un tel projet, l’article L122-1 du Code de l’environnement dispose que ce sont ceux qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine.
En outre, aux termes des dispositions de cet article, nous constatons qu’en cas de soumission d’un projet à une évaluation environnementale, le dossier comprenant l’étude d’impact et la demande d’autorisation déposée est soumis à l’avis de l’autorité environnementale.
Il convient de rappeler qu’à la suite des modifications apportées à l’article R122-6 du Code de l’environnement par le décret du 3 juillet 2020 [1], nous constatons que les autorités environnementales désignées pour rendre un tel avis sont :
1) Le ministre chargé de l’environnement
2) La formation d’autorité environnementale de l’inspection générale de l’environnement et du développement durable
3) La mission régionale d’autorité environnementale de l’inspection générale de l’environnement et du développement durable (ci-après « (MRAe) ») de la région sur le territoire de laquelle le projet doit être réalisé, pour les projets autres que ceux pour lesquels 1) et 2) sont compétents.
Il convient de noter que le décret n° 2022-1025 du 20 juillet 2022 a substitué la dénomination « la mission régionale d’autorité environnementale de l’inspection générale de l’environnement et du développement durable » à la dénomination « la mission régionale d’autorité environnementale du conseil général de l’environnement et du développement durable ».
En effet, les MRAe visent à renforcer l’indépendance des décisions et avis rendus par les autorités environnementales locales sur les projets. Ainsi, l’article R122-24 du Code de l’environnement indique que dans chaque région, la MRAe bénéficie d’un soutien technique de la part des agents du service régional chargé de l’environnement pour la réalisation des missions prévues. Dans le cadre de cet appui, les agents du service régional chargé de l’environnement sont par dérogation, placés sous l’autorité fonctionnelle du président de la MRAe.
II. Autonomie de l’autorité environnementale au regard de la jurisprudence administrative.
Pour rappel, l’article 6 de la directive du 13 décembre 2011 [2] vise à assurer qu’une autorité compétente et objective en matière d’environnement puisse émettre un avis sur l’évaluation environnementale des projets ayant des incidences notables sur l’environnement avant leur approbation ou autorisation. En outre, la CJUE à l’occasion de son arrêt du 20 octobre 2011 (affaire C-474/10), a interprété l’article 6 de la directive du 27 juin 2001 (Directive 2001/42/CE) du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement.
A cet égard, par un arrêt du 6 décembre 2017, le Conseil d’Etat affirme la position prise par ledit arrêt de la CJUE. Ainsi, la Haute juridiction administrative précise que bien qu’une autorité publique puisse autoriser un projet et être simultanément chargée de la consultation environnementale, il est primordial qu’une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité afin de garantir une autonomie réelle, avec des moyens administratifs et humains propres, permettant ainsi à l’entité administrative concernée de donner un avis objectif.
C’est dans ce contexte que le Conseil d’Etat décide d’annuler le 1° de l’article 1er du décret n° 2016-519 du 28 avril 2016 en tant qu’il maintient, au IV de l’article R122-6 du Code de l’environnement, la désignation du préfet de région en qualité d’autorité compétente de l’Etat en matière d’environnement (CE, 6 décembre 2017, n° 400559).
Il est important de noter que s’agissant d’un projet autorisé par un préfet de département différent du préfet de région, la Haute juridiction par un arrêt rendu le 5 février 2020 précise que l’avis de celui de région en tant qu’autorité environnementale est généralement considéré comme autonome, sauf si le même service a instruit la demande et préparé l’avis. Ainsi, un avis est considéré comme irrégulier lorsque la DREAL (Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) assure à la fois l’instruction du projet pour le préfet de département et la préparation de l’avis du préfet de région, à moins que le service spécialement chargé de préparer les avis au sein de cette direction ne l’ait préparé.
En l’espèce, les juges du Palais-Royal ont considéré que l’avis ne saurait satisfaire aux exigences fixées dès lors qu’il avait été émis par le préfet de région et que la décision attaquée avait été prise par le préfet de département, alors que la même unité territoriale de la DREAL avait à la fois instruit la demande d’autorisation et préparé l’avis de l’autorité environnementale (CE, 05 février 2020, n° 425451).
Par ailleurs, par un arrêt du 25 janvier 2023, le Conseil d’Etat indique qu’un avis est pris en compte comme irrégulier dès lors que ce dernier avait été préparé par un pôle relevant d’un service spécifiquement chargé de l’instruction des avis, alors qu’il dépendait de la DREAL, tout comme le service ayant procédé à l’instruction de la demande d’autorisation (CE, 25 janvier 2023, n° 448911. Voir aussi : CE, 19 octobre 2023, n° 466286 ; CE, 20 juillet 2023, n° 466162).
Par un autre arrêt récent rendu le 5 février 2024, les juges du Palais-Royal ont de nouveau souligné sur l’importance de l’autonomie de l’autorité environnementale.
En l’espèce, dans le cadre d’une demande d’autorisation pour exploiter un parc éolien, l’avis de la MRAe a été préparé au sein de la DREAL par le département « évaluation environnementale » spécifiquement chargé de préparer les avis, lequel correspond au service d’appui à la MRAe conformément à l’article R122-21 du Code de l’environnement.
En effet, une convention entre la MRAe et la DREAL indiquent que plusieurs agents dudit département sont placés sous l’autorité fonctionnelle du président de la MRAe.
Ainsi, la directrice régionale adjointe référente du service développement durable et aménagement, mentionnée dans ladite convention en tant que participante à la préparation des avis de la MRAe, est non seulement la supérieure hiérarchique des agents dudit département, mais également celle des agents de l’unité départementale.
La cour administrative d’appel précise qu’en l’absence d’éléments confirmant que la directrice adjointe n’a pas participé à la préparation de l’avis, sa présence remet en question l’autonomie réelle du service d’appui à la MRAe (CAA de Nancy, 08 mars 2022, 19NC02825).
En revanche, le Conseil d’Etat indique que lorsque la MRAe émet un avis conforme aux dispositions prévues, elle doit être considérée comme agissant de manière autonome par rapport au préfet compétent pour autoriser le projet, alors même que cette dernière a bénéficié d’un soutien technique d’agents du service régional chargé de l’environnement placés sous l’autorité fonctionnelle de son président.
En tout état de cause, le seul motif que ledit agent de la DREAL faisait partie des agents mis à la disposition de la MRAe, ne saurait, aux yeux du Conseil d’État, affecter cet avis sans qu’il soit établi que cet agent n’avait pas participé à la préparation de cet avis (CE, 05 février 2024, 463619).