Une plainte ou une plainte réciproque peut en effet cacher un différend de personnes à l’origine du litige civil qui a atteint son paroxysme pour déboucher sur une action pénale qui semble inappropriée par rapport au réel enjeu qui est bien de nature civile.
Le problème, dans le cas d’une plainte « courante » est que les parties peuvent rester plusieurs mois dans l’incertitude : le plaignant peut avoir reçu un courrier du procureur lui notifiant le classement sans suite.
Mais dans la plupart des cas, s’il n’a reçu aucune réponse pour donner suite à sa plainte dans les 3 mois suivant son dépôt, elle est présumée avoir été classée sans suite.
Une plainte peut faire l’objet d’un classement sans suite pour les principaux motifs suivants :
- alternatives aux poursuites
- absence d’infraction
- infraction insuffisamment caractérisée
- « motifs juridiques »
- poursuites inopportunes.
Plusieurs situations peuvent donc se présenter pour lesquelles le conciliateur doit estimer si la plainte constitue ou non un obstacle à l’action civile. Quatre exemples parmi tant d’autres :
1°) Un justiciable vous saisit pour un trouble anormal de voisinage en vous informant que son voisin aurait porté plainte contre lui pour harcèlement. Ce dernier vous indique en effet qu’il a bien déposé plainte mais pour acte de malveillance, seul sujet en cours et ne reconnaît aucun litige sur le plan civil.
L’action pénale bloque effectivement l’action civile, malgré la réalité du trouble de voisinage.
Que faire ? Mettre l’action civile en « stand-by » tant que le parquet n’a pas rendu sa décision : si la plainte est classée sans suite, feu vert pour la conciliation de justice d’autant plus qu’une assignation pour trouble de voisinage serait irrecevable devant le juge, faute d’avoir procédé à une tentative préalable de conciliation.
2°) Un conciliable vous saisit car il vient d’être assigné par son bailleur social, lui-même assigné par sa voisine du dessous pour ne pas avoir mis fin au trouble de jouissance dont il prétendait être victime
Deux plaintes pour harcèlement de part et d’autre, un bailleur social, un maire, un médiateur de la ville et des chefs de la police dépassés depuis 8 ans. Après s’être assuré que les plaintes réciproques ont été classées sans suite par le Parquet, le conciliateur a eu le champ libre pour réunir en conciliation à l’audience les trois parties et leurs avocats pour parvenir à un PV de constat d’accord amiable aussitôt homologué en séance.
3°) Une mère célibataire ne paie plus ses loyers puis quitte le meublé en emportant les meubles. Le propriétaire porte plainte et saisit le conciliateur avant une assignation en justice. Ce dernier convainc l’ancienne locataire de rapporter les meubles, le propriétaire de retirer sa plainte et un accord amiable homologué vient ensuite régler équitablement le différend financier pour loyers impayés.
4°) Un conciliable saisit le conciliateur pour un litige concernant une servitude de passage qui au fil des ans a exacerbé les passions. Le conciliateur découvre au cours de ses investigations préalables une main courante et deux dépôts de plainte.
Il informe alors le demandeur que sa saisine est mise en veille tant que le Parquet ne sera pas prononcé.
Là encore, au vu des relations entre les parties, le civil a conduit au pénal et aucune action préliminaire visant à apaiser les esprits ne pourra être menée si un classement sans suite n’est pas prononcé.
En conclusion, sur douze affaires ou le pénal devait tenir le civil en l’état, le verrou a sauté après une période de mise en veille jusqu’à la décision de classement sans suite.
Et surtout des constats d’accord durables ont pu être ensuite homologués !